(Terminé) C'est par où déjà? (PV Zolvar, Leo, DM)

L'anxiété de Leo graimpa encore d'un cran lorsqu'il tourna le coin du bâtiment et se retrouva devant une autre ruelle, en tout point identique à la précédente. Il devait bien l'admettre... il était perdu.

Un collègue de l'université lui avait indiqué la position d'un terrain vague où allait pouvoir tester deux ou trois inventions personnelles en toute quiétude... mais il avait accidentellement brulé sa feuille de note lors d'une... euh... erreur de calcul et s'était retrouvé avec sa mémoire seule pour le guider. Il était maintenant évident que le jeune ingénieur surestimait grandement ses facultés mnémotechniques. Après avoir rejoint la partie plus habité du district il avait errer entre les rues en espérant trouver un point de repère quelconque... mais il s'agissait littéralement de sa première visite dans le secteur des mercenaires et il en était encore à se demander ce qui lui était passé par la tête. Il errait ainsi depuis plus de deux heures sans pouvoir retrouver son chemin, la luminosité baissant réduisant à chaque instant ses chances de trouver une âme charitable qui aurait put le mettre sur le bon chemin. Si il s'était trouvé dans le secteur des sciences la situation aurait été loin d'être aussi inquiétante, mais la possibilité de se retrouver seul à la noirceur dans un endroit totalement inconnu sans croiser âme qui vive ne l'attirait pas particulièrement. Le jeune ingénieur augmenta donc sa foulée et serra son sac remplis de ses précieuses inventions contre lui, espérant trouver quelqu'un au plus vite.

Soudain, un bruit se fit entendre sur sa gauche, dans une intersection qu'il venait tout juste de passer. impossible de dire s'il s'agissait de voix ou simplement de débris emportés par le vent... mais ça valait le coups d'essayer. Il se dirigea vers l'endroit où il pensait avoir entendu quelqu'un, son coeur battant la chamade malgré lui.

Sa journée, il l'avait passé à marcher. Du secteur central jusqu'à celui marchand, puis de celui marchand jusqu'au central encore, pour finalement, après encore plus de marche dans le central, revenir à celui des mercenaires. Il était rapidement passé à sa guilde, pour s'assurer qu'aucun travail ne l'attendait, mais s'étant frappé à un "rien au programme", il était reparti bredouille. C'était là la vie des mercenaires: pas de contrat, pas de paie. Ça l'arrangeait, par contre: la liberté qu'il avait était ce qui le motivait. Contrairement à des gens comme Eicko, lui pouvait ignorer un contrat. Son devoir n'était pas de s'assurer que la loi était respectée.

Il était reparti de la guilde les mains vides, oui, mais accompagné également. Deux collègues de travail, qu'il appréciait de temps à autres. Quelques fois, ils l'énervaient aux extrêmes: les deux avaient un point commun, celui de détester les humains. Ce n'était pas si mal, compte tenu qu'ils étaient dans le coin des Inhumains. Les humains se tenaient loin, habituellement. C'est d'ailleurs sous l'optique de rester en territoire contrôlé qu'il avait fait s'arrêter le groupe, pour parler tranquillement. Tous étaient des adultes entraînés. Ils n'avaient pas peur du noir.

- Alors donc, on examine la scène, et ce n'est pas long que je trouve un pauvre gars dans une poubelle. L'homme a visiblement reçu des coups de poings à la figure et s'est fait couper le ligament dans le talon. Impossible de marcher. L'autre, l'espèce de junkie névrosé, devient encore plus agité et...

Il s'arrêta, tournant son regard vers un bruit qu'il venait d'entendre. Des pas? Une personne seule, à première vue. Que faisait quelqu'un de seul, à cette heure, dans les rues des Inhumains? Il lança, un peu plus fort:

- Qui est là?

Il sauraient bien assez vite ce qui se passait. Peut-être était-ce un compagnon Inhumain qui retournait à la base. Ou peut-être était-ce autre chose.

Même à cette distance, les trois individus purent clairement entendre le soupir de soulagement que Leo poussa en voyant les silhouettes. Très soucieux de ne pas vouloir donner d'alerte, il leva ses mains brièvement et s'empressa de répondre.

"Ce n'est que moi! Je... je crois bien que je me suis égaré. J'aurais simplement besoins de directions pour rejoindre le secteur central, ou mieux encore le secteur scientifique."

Malgré le semblant d'urgence dans lequel il se trouvait le jeune homme semblait réellement soulagé, ses interlocuteur ayant d'avance acquis sa reconnaissance simplement en se trouvant là. Il continua à avancer jusqu'à ce qu'il fut à une distance respectueuse des trois silhouettes... et manqua un battement de cœur. Eux pouvaient sans doute voir très clairement le visage encore enfantin de l'ingénieur et sa crinière de cheveux noir ébouriffée par deux heures de marche. De son côté... enfin, à première vue il était très difficile de savoir ce qui se tenait devant lui (principalement à cause de l'obscurité), mais la grande silhouette en uniforme lui inspirait soudainement beaucoup moins confiance. Mais qu'est-ce que tout le monde avait à porter des masques ces derniers temps! Des mercenaires? Un bref instant Leo fut tenté de rebrousser chemin mais il tenta de se contrôler. Après tout... il avait ce qu'il fallait avec lui en cas de pépin non? Il déglutit, manifestement un peu moins sur de lui et fit un dernier pas vers l'avant.

"Vous... heum... vous pouvez m'aider?"

Son regard resta porté vers la direction des pas qu'il avait entendu. Les autres, eux, s'étaient tut. Qui pouvait bien se promener à cette heure? La réponse lui parvint rapidement quand il vit le visage trop doux du jeune homme... du jeune humain. Il serra les poings et se mit un peu avant de son trio, jetant un regard à ses accompagnateurs. Ce n'était pas le temps de causer un bain de sang. Peut-être cet homme était-il innocent. Les paroles qui suivirent le firent soupirer, profondément, mais pas les autres. Une certaine tension venait de s'installer, il pouvait le sentir sur l'arrière de son crâne.

- Pourquoi êtes-vous dans le secteur mercenaire en pleine nuit, monsieur? Et surtout en territoire Inhumain... ce n'est pas prudent.

Il avança encore de quelques pas, sans même porter sa main à son arme. Ils étaient trois. Si cet homme était un puriste qui faisait du zèle, il ne s'en sortirait pas vivant.

- Ce serait en effet la démarche à suivre. Vous ne pouvez pas rester ici.

Les deux accompagnateurs s'étaient fait silencieux en entendant les pas, mais surtout, Zolvar se taire. L'un était tout aussi grand que le Mutalythe, mais arborait des traits reptiliens, voir carrément d'alligator. L'autre, plus petit, n'en était pas moins large, semblant porter une armure assez imposante.

Les deux se tendirent, par contre, en voyant là un petit humain perdu. Ils ne firent pas un son, mais ils s'échangèrent un regard. Zolvar était un gentil boyscout, oui... mais eux, c'était une autre histoire. L'alligator avança de quelques pas, venant au même niveau que Zolvar, et l'autre recula, faisant mine de s'en aller.

- Bah voyons, Zaynichoux! On se fait un nouveau pote, et tu veux déjà qu'il parte! Secteur scientifique, heh? Tu fais quoi, là-bas? Tu surveilles les ptits des zarbis?

L'alligator eut un rire gras, méprisant. Sa queue s'agitait, frappant le sol dans un bruit mat. Il semblait ne porter qu'un jeans troué, avec un découpage expressément pour sa queue.

Des pas se firent alors entendre derrière Léo. L'autre gars s'y était rendu et attendait, voulant visiblement couper la potentielle fuite de l'ingénieur.

Durgas:

Axis:

Déjà nerveux, Leo reçus une nouvelle vague d'inconfort face au propos du premier mutalyte... eh oui : c'était son jour de chance il était tombé en pleine nuit sur trois mutalytes et au lieu de se diriger lentement vers le secteur mercenaire puis le secteur central Leo s'était enfoncé encore d'avantage dans les entrailles du district. Il n'était pas la bienvenue ici et c'était manifestement évident. Il leva encore une fois ses mains pour tenter de rassurer les trois individus sur ses intentions. Il était manifestement désarmé et n'avait aucunement l'allure d'un combattant.

"Je vous promet que c'est bien involontaire de ma part : je n'ai pas l'intention de m'attarder. Voyez-vous j'étais en train..."

L'ingénieur n'eut pas le temps de continuer ses explications que le reptilien s'avança. Étrangement c'était maintenant l'homme en uniforme qui lui inspirait le plus confiance... Son cœur fit un bond dans sa poitrine, des souvenirs assez peu plaisants de son enfance refaisant surface.

"Je... je vous demande pardon.. je... non, je... je suis ingénieur. Ingénieur en... en métallurgie et synergie."

Il ne savait pas pourquoi il avait crut utile de préciser : l'information allait probablement servir à une nouvelle raillerie ou entrer par une oreille et sortir par l'autre. Leo jeta un coups d'œil derrière lui et ses mains devinrent soudain moites en voyant que l'autre "homme" s'était glissé derrière lui. Il était coincé à présent... Étrangement une sorte de résolution apparut alors sur les traits quelques secondes auparavant terrifiés de l'ingénieur et il planta son regard dans celui du mutalyte en uniforme.

"Monsieur, si vous ne voulez pas m'aider à retrouver mon chemin j'aimerais reprendre ma route à présent. Il se fait tard et j'aimerais rentrer chez moi... Je ne cherche pas d'ennuis."

Le scientifique fit encore l'étrange constatation qu'il reprenait ses moyens beaucoup plus rapidement face à des non-humains que lorsqu'il était confronté à ses camarades. Le jeune homme ne tremblait plus mais semblait toujours tendu comme la corde d'un violon. Il passa rapidement en revue le contenu de son sac, se tenant prêt à attraper son premier dispositif si le besoins s'en faisait sentir.

Ça n'allait pas. Non, visiblement, tout allait de travers. Il lâcha un grognement, pour s'avancer devant l'alligator puis lui donner un bon coup d'épaule, histoire de le dé-balancer. Ce fut plus ou moins concluant, mais au moins l'attention du reptile se tourna vers lui.

- Vous voyez bien qu'il n'est pas dangereux. Laissez-le tranquille. Sinon, je ramasse vos cul d'Altérés et je les ramène à Greed. Pire, c'est probablement MadTrigger qui va vouloir ta sale peau comme décoration murale. Axis, tu le laisse passer. Je m'en occupe.

Se décalant lentement, tout en baissant son capuchon, il s'approcha de Léo, pour toiser la personne derrière lui. Il retira finalement son masque, montrant un visage habituellement doux, mais aux traits maintenant sévères, à moitié rouge, et l'autre bleu. Il semblait sur le point de se mettre en colère, mais pas contre l'Ingénieur, plutôt contre les deux autres mercenaires.

- Tu attends qu'il se mette ;a pleuvoir, Axis? Bouge-toi.

Son ton était sec. Ses yeux, originairement jaunes, presque dorés, devenaient rapidement verts.

L'alligator eut un rire et croisa les bras. Sa queue continuait de frapper le sol, un peu plus fort. Par malice ou par excitation toute prédatrice? C'était un mystère.

- Un Ingénieur en syner-truc? Heh! Me semble que c'est tellement spécifique que c'en est louche!

Il lâcha plutôt un grondement ensuite, se faisant donner un solide coup d'épaule par le Mutalythe. Maintenant, l'alligator ne semblait pas heureux. Pas du tout.

- T'prends sa défense en plus? C'quoi, y'est de ton goût?

L'autre, Axis, silencieux depuis le début, se décala d'un pas sur la gauche. Il eut un profond soupir, par contre, posant une main à sa ceinture.

- Je suis du même avis que Durgas: qui nous dit que ce n'est pas un Puriste? On est peut-être trop nombreux à son goût...

Aucun des deux ne s'avança, par contre: la peau bleue du Mutalythe semblait leur enlever toute envie de le faire.

Leo n'en crut pas ses oreilles.

"Je... quoi? "

Il secoua un instant sa tête, abasourdit de ce qu'il venait d'entendre.

"Si j'était un puriste en mission vous pensez vraiment que je me baladerait en plein milieu du quarter inhumain, seul et sans arme ?!  C'est à peine si je ne me casse pas la figure à chaque pas! Vous pensez vraiment que je suis une menace?!"

Leo arrivait presque à trouver la situation comique. Très digne, il rajusta sa cravate, sans réussir à la rendre tout à fait acceptable et regarda tour à tour chacun des individus. Il s'attarda un bref instant sur celui en uniforme, ne sachant trop comment le remercier de prendre sa défense. Il fit un bref pas en arrière, histoire de ne pas trop s'éloigner de son "protecteur".

"Mon nom est Leo Steinhart, je travaille sous les ordres direct de l'élu du secteur scientifique. Je ne suis que de passage mais au moins trois personnes savent où je suis allé cette nuit. Maintenant je vous prie de me laisser passer."

Voilà. C'était dit et si ils ne trouvaient pas là de raisons suffisantes pour ne pas s'attaquer à lui il allait devoir employer d'autres moyens.

Ce fut un regard rempli de rage qu'il darda sur Durgas, sa peau devenant presque totalement bleu, à l'exception d'une petite zone, partant du nez et descendant jusqu'à son menton, tout en suivant le milieu du cou.

- Redis quelque chose du genre, et je te fais avaler ta queue, imbécile! Rentrez donc chez vous avant de vous ridiculiser encore plus!

Il grogna en fixant Axis ensuite, puis fit signe à Léo de lui emboîter le pas, sans vraiment bouger. Il attendait que l'ingénieur se déplace pour mieux le suivre, et l'empêcher de se fait de recevoir un coup par derrière.

- Je vais l'escorter. Bonne soirée.

Pas besoin d'en ajouter davantage. De toute manière, si l'un des deux répliquait, il recevrait son poing en pleine figure.

Axis se décala suffisamment pour laisser passer le duo improbable. Il ne semblait pas tranquille, mais su moins, il ne disait plus un mot et gardait ses distances. Durgas, par contre, gronda profondément. Les répliques de Léo l'énervaient, et l'entêtement de Zolvar le frustrait.

- J'vais me faire un plaisir de te rappeler la soirée dans quelques jours, Zolvy. Je te le promet. Heh. On le laisse avec son Oh Monsieur je suis le pote du plus grand freak en ville, pis on va se prendre un verre, Axis?

L'autre acquiesça, observa Léo quelques secondes, puis alla rejoindre l'Altéré alligator. Lui tapotant l'épaule, il prit les devants, et les deux quittèrent, laissant Léo et Zolvar dans un silence presque total. La noirceur était là et les quelques lampes à l'huile qui étaient accrochés n'éclairaient pas vraiment les rues.

Leo maintint en place le barrage de sa dignité juste assez longtemps pour que les deux mutalytes soient hors de vue... et tout de suite après ses jambes devinrent molles comme de la cire. Il trembla un peu et eut une sorte de grand frisson. Cette situation... cette situation aurait très sérieusement put mal tourner. Il s'imagine un bref instant en train de se défendre contre un reptilien de deux mètres de haut et trouva l'image a la fois comique et très inquiétante.

Il jeta enfin un regard vers sa gauche, se rappelant soudainement qu'il n'était pas seul dans la ruelle. Le jeune homme prit un bref instant afin de détailler son sauveur avant de parler d'une voix un rien tremblante.

"Merci... merci beaucoup, qui que vous soyez. Si ils pensaient réellement que j'étais un puriste je n'ose même pas imaginer la situation dans laquelle je me serais retrouvé sans vous."

Simple et direct, le remerciement semblait provenir du fonds du cœur. Même si il venait tout juste de tester certains appareils de défense personnelle, Leo était un non-violent et était réellement soulagé que la situation se soit réglée sans un bain de sang. Un plis soucieux barra toutefois son front quand il réalisa qu'il était maintenant complètement seul avec un autre mutalyte... Certaines paroles d'Artemis lui revinrent en tête et il décida de se lancer.

"Je peux vous poser une question? Pourquoi? Je veux dire... vous auriez put rester là sans rien dire au lieu de vous exposer à une bagarre comme ça."

Les deux Altérés partirent, à son grand soulagement. Sa peau reprit, lentement, une teinte exclusivement rouge. Il resta attentif, son attention tournée vers l'endroit par lequel les deux avaient quittés. Peut-être ne se laisseraient-ils pas faire aussi facilement. Il espéra se tromper.

Son attention se tourna ensuite vers Léo, qui le détaillait du regard. Ses traits avaient repris une allure douce. Il inclina lentement la tête aux remerciements de Léo, puis se mit à marcher, lentement. Ce ne fut pas long qu'il ramena son capuchon sur sa tête, sans remettre son masque.

- Vous me remercierez quand je vous aurai conduit au bon endroit. Et si vous aviez été un puriste... je n'aurais pas pu les arrêter. Fort heureusement, ce n'est pas le cas.

Ses pas étaient lents, comme s'il voulait que l'ingénieur puisse le suivre facilement. Dans les faits, s'il avait eu la preuve que Léo avait été un puriste... il aurait laissé les deux autres faire et serait simplement parti. Il vouait une haine sans nom à ces humains des bas étages. Un de moins aurait aidé la société. Ça ne s'était pas produit, et il n'avait donc pas besoin de penser à tout ça. Non, maintenant, il devait raccompagner cet homme, et penser à ce qu'il ferait de son temps pour ce qui restait de soirée. Prendre un verre avec ses compagnons mercenaires était hors de question, maintenant. En plus, Durgas lui en voulait... Il eut un soupir, puis s'arrêta à la dernière question de Léo. Pourquoi?

- C'est mon devoir de citoyen d'intervenir quand je le peux. Il n'y a pas de Défenseurs dans ce Secteur. La loi, c'est nous mercenaires qui nous assurons qu'elle est respectée. Et puis, si nous voulons que l'État devienne un endroit agréable à vivre, nous devons travailler pour que ça arrive. Laisser des innocents mourir va envenimer les choses... En plus, c'est contre mon code moral. Contre ma formation de Défenseur également.

Il se tut. C'était une bonne réponse, qui regroupait un peu de toutes ses croyances. Son attention retourna sur Léo, encore, et il lorgna la mèche blanche.

-D'ailleurs, si je puis me permettre... La section la plus près du mur est sous l'influence des Inhumains. Il y en ensuite, au milieu du secteur, les Trigger Happy. Finalement, la zone la plus à l'intérieur de l'État appartient aux Loyals. Les deux zones qui ne sont pas aux Inhumains sont sécuritaires pour les humains. Pas la nôtre.

Il prit le temps de mettre ses idées en place, puis eut un léger sourire.

- Où voulez-vous aller, entre le secteur Central et celui des Sciences et de l'Industrie, finalement?

Leo emboita le pas à son nouvellement attitré protecteur. Il n'était pas particulièrement petit, mais il ressemblait quand même à un enfant lorsqu'il se tenait ainsi juste à côté du mercenaire.

Il écouta très attentivement la réponse qu'il lui donna et haussa un sourcil. Il ne connaissait pas grand chose aux mercenaires mais... même dans le reste de Sicherheit ce genre de discours était au mieux très rare. Même si aux oreilles de Leo il était remplis de sens. Il n'ajouta rien sur le sujet sinon un sourire compréhensif : bien que Leo ne possédait pas la... disons la force nécessaire pour appliquer ses principes dans la rue mais il obéissait lui aussi à une éthique très stricte. C'est entre autre pourquoi, même si il avait parfaitement les connaissances pour, il n'avait jamais construit ou développé d'arme à feu.

Il écouta attentivement les explications du mutalyte et essaya de reconstituer le plan du secteur dans son esprit. Il était rendu si loins?! mais... mais ça voulait dire qu'il avait marché dans la mauvaise direction depuis plus de deux heures! Il eut une mine déconfite avant de se tourner vers l'inconnu.

"Au secteur des sciences et de l'industrie. C'est là que j'habite mais je ne veux pas non plus prendre trop de votre temps : a partir du secteur central je serais parfaitement en mesure de me retrouver"

Il ne put retenir une mine piteuse à la constatation de la route abominablement longue qu'il devrait franchir avant de retrouver son oreiller. Il ne voulait pas l'imposer à son nouveau compagnon.

"Je... j'y pense : j'espère que vous n'aurez pas d'ennuis à cause de moi : ils avaient l'air d'être vos... euh... collègues non?"

Le mercenaire hocha tranquillement la tête en entendant les indications de Léo. L'un ou l'autre, dans son cas, ça ne changerait pas grand chose. Une heure de plus ou de moins... Avec le nombre d'heure qu'il marchait par jour, et son entraînement physique quotidien, on pouvait dire qu'il atteignait toujours son quota d'activité physique. S'il y avait bien quelque chose qu'il voulait éviter, c'est que son propre corps le trahisse.

- Secteur des Sciences et de l'Industrie ce sera. Je me suis engagé à vous raccompagner, et ce sera judqu'au bout. S'il vous arrivait quelque chose parce que je vous ai laissé au secteur Central, je m'en voudrais pendant des semaines, peut-être plus.

Il eut ensuite un haussement d'épaule. Des problèmes avec ces deux-là? Dans le pire, il arrêterait de les voir. Dans le mieux, il leur paierait un verre et tout serait oublié. Dans tous les cas... c'était à un autre aspect de lui qu'ils allaient manquer, non au principal lui.

- Ne vous en faites pas avec ça. Ils ne me poseront pas problèmes. Et si vraiment ils m'en veulent pour si peu, c'est qu'ils ne méritaient pas mon attention. De toute manière, ce n'est pas ma personnalité principale qui les apprécie. Ce ne sera donc pas une grosse perte.

Il se tut quelques instants, réfléchissant. En avait-il trop dit? Passerait-il pour un fou? Non. Les différentes "personnalités" des Mutalythe était un fait connu. C'était d'ailleurs pour cette raison que les gens en étaient méfiants, habituellement. Ça, ou le fait qu'ils recelaient encore quelques mystères.

- Si ce n'est pas indicret, pourrais-je savoir ce qui vous a fait vous égarer aussi loin chez les mercenaires?

Sa curiosité avait parlé, et il s'accorda un petit sourire amusé. Toi et tes questions stupides... Ce ne sont pas tes affaires.

"oh, eh bien... euh..."

Leo ne semblait pas embarrassé. Après tout si il prenait autant de risques pour lui il était parfaitement en droit de savoir. Le jeune ingénieur essayait plutôt de résumer les faits simplement.

"J'avais quelques... euhm... expériences personnelles à conduire et l'université a refusée de me prêter un local pour que je puisse les faire là-bas. Je me suis donc mis à la recherche d'un espace où je pourrais les tester en toute sécurité : c'est un collège qui m'a recommandé l'espèce terrain vague qui se trouve entre le secteur des trigger happy et celui des loyals."

Il fouilla dans son sac et en sortis une feuille presque complètement carbonisée.

"J'avais noté mon itinéraire mais une de mes inventions s'est avérée un peu trop efficace pour mon périmètre de sécurité. Résultat je me suis retrouvé dans indications, sans boussole et sans carte dans un secteur où je ne m'étais jamais encore aventuré."

Il froissa la feuille et la remis dans son sac. Avec l'obscurité qui était tombée tout les points de repère de Leo avaient disparut. Il connaissait la suite. Maintenant Leo espérait seulement qu'il n'avait pas trop piqué la curiosité de son interlocuteur quant à la nature de ses expériences : il préférait garder ces détails pour lui...

"Ce... ce genre d'intolérance envers les humain est chose courante parmi les mutalytes? Ou c'est uniquement parce que j'était un intrus sur leur territoire?"

La question inquiétait un brin Leo : il avait grandis dans le secteur de l'agriculture : l'ambiance et la mentalité générale y était très différente de celle du reste de la cité. Il devait sans cesse ajuster sa compréhension de la dynamique sociale... ce qui dans son cas se révélait être une tâche monumentale.

Le mercenaire l'écouta attentivement, sans faire un son. Logique. Les mercenaires avaient des terrains vagues pour tester quelques nouvelles armes, même des stands de tirs assez impressionnants. C'était logique de venir tester chez eux.

La feuille presque carbonisée de Léo le fit hausser un sourcil. Alors c'était ce genre de test là? Tant qu'il ne blessait personne, il n'avait rien à dire. Ce n'étaient pas ses affaires. La dernière question de Léo, par contre, le fit ralentir. Parmis les Mutalythes? Venait-il de se tromper de race? Le seul du groupe qui l'avait défendu, lui dans les faits, était Mutalythe. Il eut un petit soupir et secoua doucement la tête.

- Je vous en prie, ne confondez pas ma race avec les Altérés. Ce n'est pas la même chose. Les Mutalythes n'ont rien d'humain. Et puis, de ce que je sais, le seul Mutalythe du groupe a prit votre défense.

Il regarda Léo et essaya de voir s'il avait compris. Il n'aimerait pas se faire confondre avec des Altérés, non... Eux qui avaient été humains un jour et qui les détestaient maintenant.

"Oh, je... je suis désolé je..."

Leo bafouilla et rougit légèrement. La dernière chose qu'il voulait était justement d'offenser son protecteur.

"Avec son armure je pensais que l'autre était aussi... enfin... Je comprends très bien la rancune des altérés."

Il ne voulait pas se répandre en excuse et s'enfoncer encore plus. Il avait fait une erreur, tout simplement et il ne lui restait plus qu'à espérer que le colosse ne lui en tiendrais pas rigueur.

"Je... je voulais parler de ce quartier. Enfin, de ce que vous me disiez il n'est pas sécuritaire pour les humains. Je me demandais seulement si c'était récent, à cause des incidents avec les puristes, ou si ça avait des racines plus... profondes?"

Comme son interlocuteur le lui avait si bien rappelé il y avait une bonne différence entre les altérés et le reste des races non-humaines. Et... à moins qu'il ne soit encore plus confus qu'il ne se l'imaginais, les mutalytes, les neorithes et les orchids avaient graduellement trouvé leur place dans Sicherheit. Le jeune ingénieur espérait seulement ne pas se tromper et s'enfoncer d'avantage.

Le mercenaire se permit un petit rire. Axis, un Mutalythe? Non... c'était un Altéré bien étrange, qui était bien loin des gens de sa race. C'était comme comparer un Orchid avec un humain. Bien loin de la réalité, tout ça...

- Ne vous excusez pas. Vous ne saviez pas. Maintenant, vous êtes au courant.

La dernière question le laissa pantois. Depuis quand les hostilités duraient? Du plus loin qu'il se le rappelait... Depuis l'existence des Puristes, oui... Mais leur quartier était devenu aussi coupe gorge pour les humains depuis que Greed le dirigeait. Greed et sa haine farouche pour les humains...Il eut un soupir, puis regarda Léo, d'un air sérieux qui n'allait pas avec ses traits doux.

- Ça dure depuis un moment. Les Puristes ont toujours été un problèmes... mais les choses ont empiré quand Greed est devenu le meneur. Il s'est décidé à combattre les Puristes et à protéger les non-humains qui se font persécuter par la race humaine. Il n'apprécie pas les humains... et sa haine se propage à ses troupes. Pas toutes ses troupes, fort heureusement... mais à beaucoup.

Il fit rouler ses épaules, s'étira un peu, puis ramena son attention vers l'avant. La soirée était beaucoup trop tranquille, et les rues silencieuses.

Leo resta un moment à marcher silencieusement à côté de son guide, méditant sur les dernières paroles de ce dernier. La situation des non-humains était-elle si peu enviable pour que ce genre d'idéologie prenne racine? Encore une fois Leo constata à quel point le secteur des science était une sorte d'univers à part au sein de Sicherheit : en côtoyant des collègues mutalytes, cyborg et orchids le jeune homme avait presque tendance à oublier qu'ils étaient bien différents. Il soupira en se disant qu'il avait finalement tellement de retard à rattraper sur la situation sociopolitique de la ville pour réellement avoir une chance de la comprendre tout à fait un jour.

"Je dois avouer que tout cela m'effraie un peu... enfin, j'ai l'impression que beaucoup de personnes se radicalisent et..."

Le jeune scientifique n'eut pas le temps de terminer sa phrase : son pieds buta contre un pavé mal ajusté et il s'étala de tout son long contre le sol. Le sac à bandoulière s'ouvrit sous l'impact et répandit tout son contenu sur la pierre de la ruelle. Si le mercenaire avait eu le malheur de cligner des yeux il aurait manqué toute la scène. Leo grogna imperceptiblement et se mit péniblement à genoux.

"Désolé je... j'étais distrais je..."

Il s'empressa de rassembler en hâte le contenus de son sac. Le mutalyte put distinguer quelques carnets de notes, mais aussi plusieurs pièces métalliques : des tubes, des sphères... certaines étaient ornés de fils ou de protubérances et il ne put s'empêcher de remarquer que Leo maniait certaines d'entre elles avec beaucoup de précaution. Leo fit rapidement le compte et lorsqu'il fut certain qu'il n'avait rien perdu il releva un regard désolé vers son guide.

"Je vous demande pardon je... je suis très maladroit quand je suis perdu dans mes pensées."

Le mercenaire haussa les épaules. Les gens se radicalisaient, oui... mais la situation en elle-même poussait à le faire. Les non-humains se sentaient tous en danger. Les gens se sentaient insécure dans les rues. Les Défenseurs perdaient de leur présence rassurante. La plupart du temps, ils arrivaient trop tard et trouvaient un cadavre carbonisé... Il eut un soupir, lui-même un peu lunatique, mais revint rapidement dans le moment présent quand Léo frappa son obstacle. Sa main passa non loin du bras du scientifique, sans le saisir, et il l'observa, l'air de se demander comment il s'en sortait.

- ...ne vous excusez pas. Si j'avais été un peu plus rapide, vous ne seriez pas tombé. Avez-vous besoin d'aide?

Son regard passa rapidement sur les différents objets, et il haussa un sourcil. Qu'est-ce que c'était? Trainait-il de quoi les tuer depuis tout à l'heure...? Il grogna, mais sans plus, et croisa les bras sur sa poitrine.

- Faites attention où vous mettez les pieds.

Il n'ajouta rien, surveillant de nouveau la ruelle. Définitivement, c'était beaucoup trop tranquille...

Le silence resta avec les deux hommes un bon moment. Les rues étaient vides à cette heure et il n'y avait donc pas un son, sinon celui du vent qui sifflait entre les bâtiments.

Un autre se fit entendre bien vite, par contre. Comme quelques petits bruits lointains, qui se changèrent rapidement en sanglots. Quelqu'un pleurait, dans une ruelle adjacente. C'était une voix douce, presque de soie, et aiguë. Une femme sanglottait, non loin d'eux. D'autres sons se firent également entendre; ceux de pas traînants, le bruissement d'un tissu contre un mur de pierre... La demoiselle devait se servie des murs pour avancer. Puis, un son mat, comme une personne qui tombe au sol. Repérer la femme était facile, surtout avec l'absence de bruit dans leur secteur.

"J'essaie, mais avec cette obscurité je n'y vois rien moi..."

En terminant de placer le dernier tube dans son sac, Leo marqua un temps d'arrêt. Il tendit l'oreille et eu une mine soucieuse. Quelqu'un avait besoins d'aide? Quelqu'un était perdu aussi?

"Vous entendez?"

Il se releva péniblement et ne jeta qu'un bref regard au mutalyte avant de se diriger promptement vers l'endroit où il avait entendus les sanglots. Si il avait bien écouté et ne se trompait pas sur sa personnalité, ce dernier n'allait pas tarder à le suivre. Il glissa une main dans son sac afin d'attraper la minuscule trousse de premier soins qu'il avait l'obligation de transporter en tout temps. Les membres du corps scientifique avaient tous une formation médicale de base et tout comme les mercenaires et les défenseurs étaient tenus de maintenir l'ordre, les scientifiques étaient tenus d'aider dans la mesure de leurs moyens.

Le non-humain secoua lentement la tête. D'accord, il faisait noir... mais s'il traînait vraiment des objets dangereux pour leur sécurité, il devait faire attention. La question de Léo le fit ensuite se redresser un peu. Entendre..? Oui, il entendait.

Léo ne se trompa pas sur Zolvar. Le Mutalythe suivit, rapidement même. Quelqu'un était mal en point, peut-être en danger. Il devait aider. En plus, il avait entendu dire que tous les scientifiques recevaient une formation de base pour soigner. Il pourrait s'assurer que personne ne dérange Léo pendant qu'il aidait le demoiselle en détresse.

Le duo n'eut pas grand chemin à faire pour trouver la provenance des pleurs: dès qu'ils tournèrent le premier coin sur la gauche, ils la virent. C'était une femme, humaine, qui s'était affalée contre le mur de la bâtisse. Elle semblait épuisée. Ses vêtements étaient déchirés par endroits et exposaient presque sa poitrine.

La jeune femme était blonde, les yeux bleus. Elle semblait dans la fin vingtaine, début trentaine. Elle tenait ses bras contre elle et pleurait presque silencieusement. Entendant les pas des deux hommes, par contre, elle leva les yeux, puis sembla prise de panique.

- ...ne m'approchez pas!!!

Son regard effrayé se fixa sur la haute silhouette dont elle ne voyait pas le visage. Léo ne semblait pas l'effrayer, mais son guide, lui...