Question de vie ou de mort (PV Leo & MJ )

Après une étude en bonne et due forme du dossier que lui avait remis Amon, Leo fit son chemin pour revenir jusqu'au manoir de l'élu du secteur des sciences.

Une fois arrivé devant la grande porte son coeur se mit a battre un peu plus vite. Tellement de choses pouvaient mal tourner... Mais il espérait que l'élu entende raison. Il s'arma donc de courage et frappa a la porte de bois massif

Probablement à la grande surprise de Léo, ce ne fut ni Amaz, ni Zama qui vint lui ouvrir. Peut-être était-ce parce qu'il avait senti l'odeur de l'ingénieur que Saarth'alis lui ouvrit la porte, très lentement. Son regard fit un tour d'horizon rapide, puis ne voyant que le jeune homme, il le fit entrer. La manoeuvre que ce soit lui qui aie ouvert la porte aurait pu paraître dangereuse, mais par-dessus sa combinaison, le Nomade avait enfilé un genre de poncho à capuchon, qui dissimulait assez bien son appartenance à une autre race.

- Léo. Je suis heureux de vous voir. Les deux machines s'occupent de monsieur l'Élu, alors je me suis permis de vous ouvrir.

Le gentil géant lui laissa gentiment la place. Dans l'habitation luxueuse, le silence règnait en maître. Il n'y avait aucun son.

Leo reste un moment interdit lorsqu’il voit la porte s’ouvrir sur une figure familière. Il sort bien vite de sa torpeur et s’incline légèrement vers l’avant.

"Saarth’alis. Heureux de vous voir également. "

L’ingénieur entra ensuite rapidement dans le manoir afin de pouvoir refermer la porte. Il le regarda un moment avec un air dubitatif.

"Ça… vous va bien…"

Il reste ainsi incertain pendant un instant, puis lui sourit de toute ses dents. Il le taquine. Il lui tend la main pour la serrer.

"Heureux de voir que vous allez bien. J’ai de bonnes nouvelles : Lionel se porte bien. L’attaque a grillé plusieurs connexions nerveuses alors ils ont du pain sur la planche… Ils ont également commencé une opération assez importante pour régler ses crises, mais il est entre de bonnes mains."

Il a un sourire doux.

"Vous pouvez le dire a Thyrrîn. Le pauvre se sentais mal. "

Le Nomade s'était écarté du chemin et regardait maintenant Léo avec attention. Rien n'avait changé dans son maintient, sinon qu'il avait l'air plus détendu. Voyant l'air de l'ingénieur, par contre, il pencha la tête de côté, puis gloussa, tout bas.

- ...je ne voulais pas que quelqu'un de l'extérieur voit ma différence aux premiers abords. Heureux d'apprendre que ma solution de secours me sied bien.

Léo lui tendit la main, et Saarth'alis la serra chaudement, de sa poigne étrange mais solide. Sous la bonne nouvelle, celui-ci sembla ravie, dégageant une odeur pétillante, qui se traduisit par un regain d'énergie pour Léo.

- Me voilà encore plus heureux. Je vais le lui dire de ce pas. Si quelque chose de bien a ressorti de tout ça… et bien tant mieux.

LE gentil géant fit un autre tour d'horizon, puis se mit lentement en marche, de sa démarche éternellement silencieuse. D'ailleurs, Léo put remarquer que sa jambe semblait aller mieux.

- Monsieur l'Élu est à ses appartements. Les miens se sont trouvé quelques pièces, les unes près des autres, où nous avons eu la permission de nous installer. Je ne vous retiens pas, dans tous les cas.

Ce n'était pas une façon polie de se débarrasser de l'humain, mais plutôt une porte de sortie, s'il souhaitait aller faire autre chose, maintenant.

Leo hocha la tête, profitant du regain d’énergie que les phéromones du nomade lui offraient pour vaincre son envie de rester encore un peu avec Saarth’alis pour repousser sa rencontre avec Stein. Il se dirigea tranquillement vers l’escalier.

"Merci mon ami. Je… je dois m’occuper de quelque chose avant mais j’aimerais prendre un instant pour venir vous parler, a vous et aux autres membres de votre équipe. Je crois que nous avons beaucoup à échanger. "

Il lui fit une courte révérence et sans plus tarder il grimpa les marches quatre à quatre afin de se diriger vers la chambre de l’élu. Il espérait le trouver dans un état suffisamment stable pour lui parler. Le comble serait d’avoir fait tout ce chemin pour rien.

Une fois devant la porte il prit une grande inspiration, compta jusqu’à dix et expira lentement. Il frappa ensuite à la porte et attendis.

Saarth'alis s'inclina à son tour, bien bas, puis dégagea son visage du capuchon qui venait de tomber devant.

- Vous savez où nous trouver. Nous vous attendrons.

Tous deux partirent de leur côté. Léo retourna dans le silence relatif du manoir alors qu'il gravissait les escaliers menant à la chambre de l'Élu. Devant la porte, il put entendre le bruit régulier des machines, dont celle respiratoire, mais aucune parole. Son poing contre le bois sonna longtemps, puis des pas subtiles se firent entendre à leur tour.

Amaz ouvrit la porte et sembla très joyeux de voir Léo, là devant lui. Il lui fit signe d'entrer, se décalant pour qu'il puisse justement le faire.

- Monsieur Steinhart! Je suis heureux de vous voir! Comment allez-vous? Comment se porte votre tête? La douleur a-t-elle diminuée? Comment a été votre journée?

- Amaz… laisse-lui le temps d'arriver…

La voix d'Ulrich, faible mais tout de même là, coupa bien vite l'élan de l'androïde, qui reprit son calme. L'Élu était encore alité, le visage couvert du mouchoir de soie noire, mais ses deux bras étaient bien visibles. La couverture le couvrait jusqu'aux hanches, laissant voir son torse, affreusement affecté par sa "maladie".

La moitié de son buste était changée, de la même texture que son bras, entre le métallique et l'organique. D'imposantes veines, battant du liquide bleuté étrange, parcouraient son corps, dans des fresques qui n'Avaient pas réellement de logique. L'autre moitié, elle, avait encore l'apparence de la peau humaine, quoiqu'affreusement pâle, mais était visiblement envahie par les veines bleutées. Une bosse étrange déformait pourtant son abdomen, du côté encore intacte. Beaucoup de marques étaient visibles, soi à cause de précédentes incisions, soi carrément des déchirures, surtout du côté qui avait muté. C'était un triste spectacle, que peu avaient vu jusqu'à maintenant.

- ...je t'en prie, Léo… assied-toi... Pardonne-moi, je ne suis pas réellement présentable…

Su ces mots, Zama se dépêcha de couvrir son corps, doucement.

L’ingénieur sourit a Amaz en entrant. Il laissa la pluie de questions passer, puis rit un peu.

"Content de te voir aussi Amaz. Je vais bien, je te remercie."

Son regard glissa vers Stein au moment où ce dernier parlait et le jeune homme marqua un temps d’arrêt. Il observa brièvement le spectacle qu’offrait le torse « altéré » par la condition de l’élu avant de détourner le regard poliment. Une grande tristesse envahit le jeune homme devant la fragilité physique d’un être à l’esprit et à la morale si puissants.

Il avança doucement quand il en reçu l’invitation, se dirigeant vers l’une des chaises se trouvant près de lit. Il lui offrit un sourire doux.

"Pas la peine de t’excuser voyons. "

Il vint pour ouvrir la bouche mais la referma, un peu gêné. Il regarda les deux androïdes avec un air de culpabilité marqué sur le visage.

"Heummm… Amaz ? Zama ? Ça vous dérangerait beaucoup de me laisser seul quelques instants avec Ulrich ? "

Il tourna son regard vers l’élu.

"C’est important. "

Ces simples paroles suffirent pour rendre l'androïde encore plus heureux. Il se posta tout de même à sa place, soi près de la porte, mais sembla plus léger. Réellement, on avait l'impression d'un enfant qui venait de se faire complimenter.

Zama, elle, examina Léo alors que celui-ci en faisait de même avec l'Élu, sans rien dire. Elle restait attentive, de sa nature de soignant, mais semblait aussi excessivement protectrice envers Ulrich. Elle l'avait vu grandi, après tout.

Un soupir doux échappa d'ailleurs à celui-ci en entendant les paroles de Léo. Il était rassuré que son cadet ne soit pas indisposé par le spectacle qui s'était offert à lui. S'il regarda Léo, par contre, ça ne parut pas du tout: le tissu sur son visage empêchait que l'on voit où il regardait. L'aide respiratoire, elle, qu'il utilisait enterrait un peu les bruits ambiants.

- ...je vais bien. Vous pouvez y aller… Allez donc voir si nos invités ont besoin de quelque chose…

- Oui, bien sûr Ulrich. À plus tard!

Amaz s'en fut, sans autres questions. Zama, elle, se raidit un peu et tourna la tête vers Léo, non sans maugréer en allemand avant. Elle ne semblait pas du tout heureuse de se faire chasser de la sorte.

- S'il y a quoique ce soit, je dis bien quoique ce soit, appelez moi. Je ne serai pas loin.

L'androïde quitta ensuite, et ferma la porte derrière elle.

Ulrich se mit alors à se redresser, lentement, pour se mettre assis. De sa main "normale", il prit son masque, sur la table de chevet, puis l'enfila, avant de finalement tourner son regard vers Léo. Ses yeux étaient encore plus brillants et semblaient injectés de sang, en ce jour tranquille.

- ...important… rassure-moi... ce n'est pas quelque chose de grave, n'est-ce pas…?

Le ton d'Ulrich laissait voir toute son inquiétude, malgré sa voix tremblante.

Leo hocha la tête aux paroles de Zama. Il regarda les deux androïdes sortir avec un petit pincement au cœur mais il était rassuré qu’ils acceptent sans combattre. Il voulait parler à Ulrich, seul à seul, sans ses deux conseillers pour lui mettre de la pression. Il secoua doucement la tête aux paroles de l’élu.

"Ce n’est pas ça."

Il prend une grande inspiration et il ramène son sac sur ses genoux.

"Je reviens du complexe pour voir comment Lionel se porte. Tout va bien, l’opération avance et tout semble stable pour le moment. Mais… j’ai parlé a Amon, en privé."

Il sort le document de recherche et le dépose sur le dessus de son sac.

"Ils ont trouvé une manière de synthétiser des cellules souches à partir de tes propres tissus. C'est une piste qui pourrait aider a te stabiliser sans aucun dilème moral."

Il met un moment avant d’avoir la force de parler.

"Mais bien sûr tu es déjà au courant. "

Il observe une longue pause. Il regarde Ulrich avec un regard remplis de questionnement. Il sait comment continuer et avancer son point, il avait assez passé le scénario dans son esprit, mais… il tenait à voir comment l’élu réagit, avant toute chose.

L'Élu le regarda, de sa manière particulière: sans jamais fixer ses yeux, mais plutôt en observant la généralité du visage de son cadet. Il sembla rassuré d'entendre parler du bon état de Lionel, mais plus les paroles de Léo se faisaient entendre, et plus il ouvrait grand les yeux de surprise.

Son regard se déposa sur le document et il resta interdit quelques longues minutes. Sa respiration se fit un peu plus bruyante. Peut-être était-ce l'émotion, ou peut-être était-ce autre chose. Dans le moment, il avait simplement l'air de ne pas trop savoir comment il devait réagir. Du tout, même.

- ...si ça fonctionne… et si nous avons le temps… la théorie est bonne… mais nous n'avons pas les ressources à mettre sur ce projet… pour être certain que tout fonctionne… nous aurions besoin d'une technologie que nous n'avons pas…

Le regard bleu brillant retourna sur Léo et Ulrich eut un long soupir, presque de déception. Il semblait tellement fatigué, le pauvre. D'avoir mal, physiquement parlant, psychologiquement aussi… là, maintenant, c'était encore pire.

- ...je devrais commencer à t'enseigner ce que je sais… ce qui me vient de ma famille… pendant que je suis encore capable…

Stein baissa les yeux, l'air à la fois perdu et totalement épuisé.

"Ulrich..."

Le ton du jeune homme était implorant. Il avait coupé l'élu avant qu'il ne finisse sa phrase. On voyait bien toute l'émotion qui l'habitait en ce moment. Pour un jeune homme calme et composé comme Leo le spectacle était assez alarmant.

"On va trouver les ressources et on va développer cette technologie. C'est ce qu'on fait sur une base quotidienne! C'est ce que j'ai été formé pour faire !"

Il s'arrêta, la gorge serrée. Il avait repris un contrôle relatif mais sans parvenir à chasser l'inquiétude qui l'habitait.

"Qu'on aie le temps ou non il faut essayer. Il aurait fallut essayer bien avant... Peut-être que c'est perdu d'avance, mais je refuse de laisser le temps passer en te regardant aller a ta tombe sans rien faire pour l'empêcher.

Il soupira.

"Je suis prêt a prendre la relève mais penses a tout ce que tu peux encore accomplir si on trouve le moyen de te stabiliser. Investir du temps sur ta santé c'est aider tout l'état par le ciel ! Nous avons une piste, au bout des doigts !"

Il s'arrêta. Il avait conscience a quel point il devait mettre leur relation a l'épreuve a lui parler ainsi, mais il fallait que le message passe.

Ulrich resta muet, le regard fixé sur les couvertures. Était-ce à cause des remords? De la fatigue? Ou était-ce encore autre chose? Il resta immobile, silencieux, un bon moment. On savait qu'il était encore conscient simplement parce que ses yeux étaient ouverts, bougeaient, et qu'il bougeait un peu les mains, également. Il eut d'ailleurs une petite toux, puis un long soupir.

- ...je vais faire acte de bonne volonté… et accepter, même si je trouve encore que c'est une perte de temps et… et de ressource… presque toute mon équipe va être nécessaire… et ils ont tellement à faire… ils vont de loin ralentir… sur leurs projets… je suppose que… que c'est un bien pour un mal…

L'Élu eut un autre soupir, pénible celui-là, et leva lentement les yeux sur Léo. Il semblait être terrifié. Pas par le fait qu'il n'aurait peut-être pas le temps, mais plutôt parce qu'il craignait espérer pour rien. Fonder des espoirs, simplement pour les voir disparaître dans le néant.

- ...si nous voyons que… que c'est trop tard… ne nous acharnons pas… d'accord? Je… je suis fatigué de m'acharner…

Ulrich ferma les yeux quelques instants, puis se les massa, très délicatement, de sa main intacte. Il semblait fatigué, mais aussi un peu plus décidé, maintenant.

Leo resta un moment interdit, comme s’il ne croyait pas ce qu’il venait d’entendre.

"Je… je croyais que ce serait plus dur de te convaincre, pour être honnête. "

La surprise qui s’était peinte sur les traits du jeune homme se transforma lentement en un sourire doux.

"Ulrich… j’ai déjà parlé à Amon et à Matthew. Toute ton équipe est déjà prête à t’aider du moment que tu leur en donneras le signal. Ils ont tous trop de respect pour toi pour contester tes décisions… mais tout le monde espère te voir aller mieux. "

Il approcha un peu sa chaise du lit et alla chercher le regard de l’élu.

"Tu demeures maître de ton destin. On arrête quand tu nous en donneras le signal. On ne veut pas te tourmenter non plus."

Il soupira. La simple pensée de faire vivre quelqu’un malgré lui était terrifiante d’un point de vue moral.

"C’est une des raisons pour laquelle je voulais te parler seul à seul, sans Amaz ou Zama : je voulais que tu prennes une décision sans te sentir forcé ou ressentir de pression de leur part. Ils… ils tiennent beaucoup à toi."

L'ingénieur souriait, lui aussi animé par une détermination palpable.

Ulrich eut un petit rire amusé, entendant que Léo aurait cru plus difficile de le convaincre. Il n'était pas totalement convaincu, mais comme son cadet, son héritier, venait de le dire, son équipe avait déjà essayé de le convaincre. Force était de constater que, peut-être, serait-il mieux pour lui d'accepter cet essaie.

Son regard retourna sur Léo, lentement encore, et garda cette même détermination. Il n'osa pas réellement parler, mais acquiesça tout de même aux paroles de l'ingénieur. ils essaieraient. Son équipe tenait à lui, oui… la plupart, il les connaissait depuis un bail…

- ...nous ferons ça… en prenant le temps qu'il faut. Je…

Le scientifique baissa de nouveau les yeux, puis toussa et se crispa un peu. On put même voir un éclair de douleur dans son regard, qui perdit légèrement de sa luminosité l'espace de quelques secondes.

- ...y avait-il autre chose dont tu voulais me parler?

Il haussa les épaules.

"On va y aller au rythme qui te convient… mais je suis toujours partant pour apprendre. Si tu te sens assez en forme pour commencer a m’enseigner « ce qui te viens de ta famille » je suis toute ouïe."

Avec la dose de phéromones de Saarth’alis une bonne partie de la fatigue due au émotions de la journée s’était envolée. Il ne restait plus qu’à voir si l’élu, lui, était en état.

"Sinon j'irais voir comment les nomades se portent, essayer d'en apprendre autant que possible sur leur culture, leur monde d'origine."

Ulrich sembla rassuré quelques instants, mais sans plus. Il acquiesça ensuite, l'air songeur, prit le temps de vérifier mentalement son état, puis pivota pour se positionner assis sur le bord du lit. Tout aussi lentement, il se leva, retira l'aide respiratoire et se dirigea plutôt vers une large commode. Il y prit son fameux manteau rouge, qu'il enfila tranquillement, légèrement tremblant. Son dos était tout aussi pire que le reste de son corps, même encore plus troublant: on avait l'impression qu'on voyait les os, par endroits. Le tout fut heureusement et rapidement caché derrière le tissu rouge, et l'Élu se tourna face à son cadet.

- ...commençons par l'important, alors… nous avons déjà parler des.. des Archivistes… Je crois que ce serait un bon début que de te les… présenter… Si tu veux bien-

- Ulrich? Mutalythe, de classe Défenseur, Gardien. Chef d'Unité, prénommé Evans, à la porte. Il semble… nerveux.

L'Androïde avait coupé l'Élu, qui eut un soupir rempli d'irritation. D'une démarche titubante, il s'avança vers la porte de sa chambre, en vue de sortir. Les solides coups du Gardien se firent alors entendre, de partout dans la maison.

- ...quel timing horrible… je vais devoir aller voir… Pourquoi le chef d'unité est-il ici…

Stein se traîna lentement vers le rez-de-chaussé, puis s'arrêta net devant les escaliers. Pour la première fois, peut-être, Léo l'entendit lâcher un juron en allemand, entre ses dents serrées.

Leo s’était tenu sur le bout de sa chaise, manifestement très attentif. L’entrée d’Amaz et la nouvelle firent naître un certain degré d’inquiétude chez le jeune homme.

"Le chef des gardiens ? "

Il avait entendu parler de lui par le biais de sa sœur. Pourquoi viendrait-il seul jusqu’au manoir Stein. En début de soirée de surcroît. Il… il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Le jeune homme se leva donc précipitamment et suivit Ulrich jusque dans le Hall d’entrée.

"Ulrich… qu’est-ce qui se passe ?"

Tout aussi perdu que Léo, Ulrich haussa les épaules, puis fit de son plus vite pour descendre. À la moitié du chemin, il perdit l'équilibre, mais se reprit bien vite.

Amaz revint les rejoindre rapidement, agrippa gentiment son protégé, puis descendit avec lui.

Le trio se retrouva devant la porte, et Amaz se dissimula rapidement dans le couloir d'à côté. Après une grande inspiration, l'Élu ouvrit finalement la porte au Gardien, visiblement raide.

- Monsieur Stein… Désolé de vous déranger à cette heure. Je venais m'assurer que vous étiez en sécurité. Puis-je entrer?

Ulrich se raidit un peu plus, puis se mit à tousser un peu. Le froid entrait dans la maison, oui… mais l'Élu des sciences ne semblait pas chaud à l'idée que le Mutalythe découvre les Nomades. Pas maintenant, du moins.

- Je vous en prie, chef d'unité… Dites-moi ce qui se passe… Je suis en parfaite sécurité ici…

- D'accord… Il y a eu un attentat, monsieur l'Élu. Un explosif a été placé dans votre bureau, dans l'aile de votre équipe. Il n'y a qu'un seul blessé et on ne craint pas pour sa vie… Mais comprenez que Meyers tient mordicus à ce que quelqu'un vienne voir comment vous vous portez.

Stein se figea, les yeux ronds, grands ouverts, puis se mit à tousser, sévèrement, assez que si Léo ne le rattrapa pas, il se retrouva à genoux au sol.

…chose que Leo fit rapidement. Il écouta le rapport du gardien avec les yeux écarquillés.

"Matthew… il a vu quelqu’un entrer dans ton bureau et y laisser un sac. Amon et moi assumions que c’était ton nettoyeur. "

Leo resta silencieux un moment. Le timing était trop spécifique… mais l’exécution démontrait a la fois une très mauvaise connaissance de l’élu et juste assez de planification pour que ce soit inquiétant. Ce n’était manifestement pas Pipes. S’il le voulait sans doute qu’une bonne partie de l’état mangerait les pissenlits par la racine en ce moment même. Les renégats ? Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien gagner en…

Sokolov.

Ce nom traversa son esprit comme une pierre à travers une fenêtre. Qu’est-ce que Pipes lui avait dit déjà ? Qu’il ne fallait pas que Sokolov devienne l’élu du secteur scientifique ? Ça pouvait être une piste. Mais ils avaient d’autres problèmes plus importants à régler. Le cœur de Leo se serra.

"Qui a été blessé ?"

Ulrich s'agrippa rapidement à Léo et continua de tousser un bon moment. Evans, de sa nature bienveillante, aida le jeune ingénieur à soutenir l'Élu, puis fit signe à Léo de l'asseoir. Une fois Stein assis au sol, et sauvé du risque de tomber, le chef d'unité se permit de parler.

- ...êtes-vous certain que tout va bien, monsieur Stein?

- ...o-oui... ne vous en faites pas… pour moi… j'ai… attrapé… froid…

L'excuse sembla suffisante pour le Gardien, qui resta tout de même très attentif. Son regard se planta, par contre, sur Léo, et il le fixa longuement.

- Matthew. Bien. Je vais aller voir ce qu'il peut me dire. Mais avant… je dois m'assurer que vous êtes protégé, monsieur Stein. Comprenez que quelqu'un en a voulu à votre vie. JE ne vois aucun garde...

- J'ai mes gardes… ils sont là… au temps qu'il fait… ils sont à l'intérieur…

Evans serra les dents. Avoir le dernier mot avec Ulrich était compliqué…

- Docteur Hekathon a été blessé. Comme je disais, nous ne craignons pas pour sa vie. Fort heureusement, il était déjà près du personnel médical. Il est en ce moment même entrain de se faire administrer des soins. Monsieur Stein… je vais devoir m'assurer de mes propres yeux que vous avez des gardes. Je vous en prie, soyez coopératif.

Ulrich grogna tout bas, lâcha un autre juron en allemand, puis termina finalement son infernale toux. Il prit le temps te reprendre son souffle… mais ne répondit tout de même pas. Visiblement, il était hésitant.

Leo profita du fait que Stein était assis pour reprendre ses esprits. Ce n’était pas bon… mieux valait que Stein annonce directement a Meyer ce qui se passait au lieu qu’il découvre lui-même qu’il abritait les nomades. Leo se leva prestement et s’inclina légèrement.

"Je vais les chercher de ce pas. A l’heure qu’il est, ceux responsables du chiffre de nuit vont être encore endormis. Occupez-vous de monsieur Stein pendant ce temps. "

Il offrit un haussement d’épaule en guise d’excuse et entreprit de se diriger vers le corridor. Avec Ulrich qui avait affirmé la présence de gardes il lui fallait trouver quelque chose et vite. Un ou deux nomades en armure auraient fait l’affaire mais ils ne parlaient pas leur langue… il fallait une idée, vite !

Il passa dans le corridor où Amaz était allé se cacher et une fois hors de vue lui fit signe de le suivre, discrètement.

"Vous avez des uniformes ? Des armures, n’importe quoi qui peut cacher un tant soit peu quelqu’un ? Parce qu’on doit trouver au moins un garde pour présenter à notre ami gardien. "

Il avait parlé rapidement, précisément et à voix basse. Ce serait un miracle si il parvenaient a tricoter quelque chose.

Evans haussa un sourcil, mais ne posa pas de questions. Il acquiesça plutôt et observa le généticien, surtout pour s'assurer de son bien être.

L'ingénieur tomba sur Amaz, qui sursauta légèrement à son arrivée. L'androïde sembla stoïque devant sa question, puis eut comme un éclair de géni.

- Oui, nous avons ça! Du vieil équipement, qui appartenait à des membres de la famille. Des armures, entre autre. Venez, venez. Je me montrerais bien, mais je suis très mauvais pour faire semblant d'être stupide… je veux dire, être un simple automate. Bref...

L'androïde se mit rapidement en chemin, évitant soigneusement le hall d'entrée. Il marchait rapidement, silencieusement également, à un rythme difficile à suivre. Un tournant ici, un autre là, une volée d'Escalier qui descend, un porte verrouillée… puis une grande pièce. Celle-ci ressemblait à un mélange entre entrepôt et chambre à débarras. Il y avait là beaucoup de boites de métal, quelques raques où de vieilles armes étaient accrochées, et dans tout ça, un vieil uniforme, à la fois scientifique et militaire, qui semblait dater de longtemps. Assez que Léo put remarquer une ressemblance avec le casque qu'Hexus lui avait donné.

- Voilà. Fouillez. Prenez ce que vous voulez. Je le replacerai ensuite.

Leo hocha rapidement la tête et suivit Amaz sans trop de difficulté. Il courait presque derrière l’androïde. Pas de temps à perdre !

Une fois dans la pièce l’ingénieur se mit à chercher rapidement le plus grand uniforme qu’il pouvait. Il en lança deux a Amaz avec un petit sourire, ainsi qu’un casque.

"Enfile ça et prends une arme. Tu n’auras pas à faire semblant que tu es stupide, simplement à ne pas trop parler. Amène ça a Zama et allez directement voir Ulrich. Vous êtes des Loyals et avez pris le contrat de manière indépendante sans passer par Solokov. Au service d’Ulrich depuis quelques mois. D’accord ?"

Une fois le nécessaire trouvé l’ingénieur courut hors de la pièce pour se diriger vers celle où Saarth’alis lui avait dit se trouver. Il fit irruption dans la salle et pris un petit moment pour se redresser et rassurer tout le monde avant de demander au Nomade de le suivre. Il lui fit un résumé rapide de la situation en lui tendant l’uniforme.

"Ce ne sera sans doute pas très compliqué. Pas besoins de vous montrer tout de suite, mais restez prêt au cas où Evans aurait envie de fouiller le manoir. Ok ? Juste pour ajouter une présence supplémentaire. "

Il lui laissa l’uniforme et entreprit de revenir plus lentement vers le hall d’entrée. Dieu qu’il espérait que ça fonctionne…

Amaz le regarda fouiller, attentivement. La machine avait croisé ses bras sur sa poitrine et tapait du pied, visiblement énervée. Un sursaut monstre l'anima, par contre, quand Léo lui lança les deux uniformes.

- Heu… O-oui! Tout de suite!

L'androïde partit en vitesse, et toujours en silence, assez rapidement que Léo ne le vit pas quand il sortit à son tour.

L'agitation de l'ingénieur était à son comble, et son état d'esprit, ainsi que son arrivée abrupte, firent se figer les Nomades. Tous se consultèrent du regard, puis avec l'explication de Léo, le gentil géant se mit à le suivre. Son regard se déposa sur l'uniforme que Léo lui tendait, mais il sembla légèrement hésitant.

- Je ferai mon possible, même si je doute fortement que cet habit me fasse…

Saarth'alis n'ajouta rien, dans tous les cas, et alla se préparer.

Dans le hall d'entrée, Amaz était déjà là, déguisé comme il le pouvait. Les ailerons dans son dos semblaient étirer son haut, étrangement, mais il cachait bien la chose. En somme, il avait l'air d'un cyborg assez convaincant. Ils avaient cachés ses yeux supplémentaires avec un genre de bandanas. Evans s'était redressé un peu, mais ne s'était pas levé. Ulrich, lui, restait totalement neutre.

- Monsieur. Vous nous excuserez. Nous faisions une dernière ronde avant le changement de quart. Mon compagnon est justement entrain de la finir. Vous vouliez nous voir?

La voix beaucoup trop humaine d'Amaz sembla rendre le Mutalythe confus, et il examina longuement la personne qui se tenait devant lui.

- Je comprends. Votre faction, je vous pries?

- Loyals, monsieur. Monsieur Stein nous a engagé il y a quelques mois.

Evans l'examina encore quelques secondes… puis se leva, lentement. Il fit signe à Amaz d'aider l'Élu, d'un signe de tête, puis offrit justement sa main à ce dernier. Stein la prit, tremblant, et accepta l'Aide, autant du chef d'unité que de sa machine.

- Bien. Continuez de garder un œil sur lui. Renforcez la sécurité. Un attentat a été commis contre notre Élu. J'aimerais un rapport de la situation, aux deux jours. Je ne vous dérangerai pas plus que ça, monsieur Stein. Je vais ramener mon propre rapport à Meyers. Voudriez-vous que je lui passe un message?

Ulrich prit le temps de réfléchir quelques instants, puis murmura:

- ...qu'il passe me voir… quand il aura le temps… rencontre privée…

Evans acquiesça, salua gravement l'Élu, puis sortit, rapidement. Le devoir appelait le Gardien, et il l'appelait fort.

Leo était resté dans le corridor près du hall d’entrée à surveiller la scène, tendu et nerveux. Ce ne fut que lorsque la porte se referma enfin sur le gardien qu’il s’autorisa un soupir. Il fit signe a Saarth’alis que tout était sous contrôle et marcha lentement jusqu’à l’élu pour aider l’androïde à le soutenir. Il lui envoya un clin d’œil au passage.

"Amaz, tu as été parfais. "

Il regarda ensuite le chef du secteur scientifique avec un œil inquiet.

"Je peux me diriger à l’instant au centre scientifique et demander des nouvelles plus détaillées, si tu veux."

Il serra la mâchoire un instant, indécis.

"J’ai malheureusement l’impression que les renégats sont derrière tout ça. "