Entre quatre murs (DM & Leo)

Leo laissa le silence durer un moment. Il semblait tellement absorbé dans son processus de réflexion qu’il en oubliait presque de respirer. Il finit par prendre une grande inspiration, la retenir un moment et soupirer.

"Si tout ceci est vrai la prochaine question sera de savoir combien de vaisseau se sont ainsi écrasé sur notre planète… Peut-être que les mutalhytes et les orchids ont des origines similaires, perdues au fil des années. "

Il soupira de nouveau, baissant le regard.

"Quoi qu’il en soit la réponse à nos questions se trouve à l’extérieur de l’état. Et peu importe ce qui se cache là-bas il faudra être préparé lorsque nous le rencontreront. Peut-être est-ce pour cela que Pipes dit que « nous ne sommes pas prêt à savoir la vérité »."

Leo s’arma de courage. Sa prochaine rencontre avec le nébuleux protecteur de l’état risquait d’être pour le moine étourdissante.

Saarth'alis garda sa large main sur l'épaule du jeune ingénieur. Une petite odeur sucrée envahit la pièce, et une onde de détente passa dans le corps du jeune homme.

- Si vous avez besoin de soutient, je serai présent. Je vous en prie, ne vous gênez pas pour me demander quoique ce soit.

Zama se leva alors, puis approcha des autres, l'air légèrement irritée.

- Je suis désolée, nous allons devoir couper court. Ulrich a besoin de se reposer. La journée a été très demandante pour lui. Nous reprendrons une autre fois.

L'androïde leur indiqua la porte d'un mouvement de main doux, mais ferme, puis cessa de bouger. En bon invité, Saarth'alis s'inclina doucement et tourna les talons, sortant de la pièce.

Leo sentis une partie de la tension causée par les grandes questions existentielles qui l’animaient quitter ses épaules. Il posa sa main sur celle de son ami en signe de remerciement et poussa un bon soupir. Il se leva, un peu chambranlant, s’inclina presque en même temps que le nomade et le suivit hors de la pièce, non sans un petit regard vers l’élu. Il referma la porte derrière lui et resta un moment un peu perdu devant le panneau de bois massif avant de tourner les talons.

"Ce n’est pas exactement comment je m’imaginais cette soirée…"

Il marcha mécaniquement vers le salon, sans trop savoir ce qu’il se préparait à faire. Rentrer chez Gabrielle et Lionel ? A cette heure et après ce qui lui était arrivé cette option ne lui paraissait pas viable. Il eut un regain soudain de conscience à cette pensée. Gabrielle… comment avait-elle réagit en rentrant chez elle ? quel idiot… Il avait complètement oublié de la prévenir, de laisser une note… Il se passa une main dans le visage. La nuit n’était pas terminée.

"Je… je vais devoir retourner chez mes amis. Je… Lionel est partis pour l’hôpital en mauvais état. Je dois prévenir sa sœur et voir comment lui va."

Il plongea son regard dans celui de Saarth’alis.

"Restez ici et reposez-vous. Vous en avez besoins. Je reviens bientôt. "

L’ingénieur lança un dernier regard vers le salon ou la petite équipe de nomade continuait de parler avant de se diriger vers l’entrée. Affronter le froid et la nuit ne l’emballait pas particulièrement mais il était hors de question qu’il laisse Gabrielle dans le néant. Pas après tout ce qu’elle avait fait.

Léo sortit, accompagné du Nomade. Le gentil géant resta avec le jeune homme, le temps qu'il fut perdu dans ses pensées, non sans le surveiller du coin de l'œil, puis se mit en marche avec lui. Il acquiesça lentement lui-aussi et s'étira longuement.

- ...je vois totalement ce que vous voulez dire…

Le jeune homme sembla retrouver un état d'agitation, et son aîné s'arrêta donc dans son avancée. Son regard mauve se fixa dans celui de Léo, et il s'inclina de nouveau.

- Je vois. Soyez prudent, je vous en prie.

Saarth'alis le salua poliment, puis le regarda partir, avant de rejoindre son équipe.

Dehors, à cette heure, tout était tranquille. Probablement trop, suite à ce déversement d'informations, pour le moins stressantes, mais personne n'était là pour déranger le jeune homme. Quelques patrouilles de Défenseurs se promenaient, comme toujours… mais tout semblait… trop tranquille? Mort? Même, le froid qui prenait dans la plaque crânienne de Léo ajoutait une certaine tension à tout ça. Un silencieux rappel que, maintenant, les choses avaient changées.

Le froid était mordant pour l’ingénieur à la fois fatigué et dopé aux phéromones. Son esprit mettait tranquillement toutes les pièces en place. On parlait d’une série d’événements qui dataient possiblement depuis bien avant l’état…d’un phénomène si puissant qu’il dépassait les capacités de son esprit scientifique. De connaissances et de pièces de casse têtes étalées sur une si grande distance qu’ils étaient presque impossibles a connecter. Ils avaient pourtant réussis à faire des liens que très peu de personnes devaient avoir été en mesure de faire depuis la création de l’état… qu’est-ce que toutes ces pistes auguraient pour la suite des choses ? impossible de le dire. Pas tant qu’ils ne seraient pas en mesure de traquer peu importe ce qui émettait ce signal.

Leo était tellement perdu dans ses pensées que le trajet se déroula très rapidement. Il se retrouva devant la maison de Gabrielle et Lionel, un peu mal à l’aise et incapable de prévoir la suite des choses. Peut-être Gabrielle n’était-elle-même pas encore rentrée ? Il n’y avait qu’une façon de le savoir.

Le chemin, rapide en apparence, le mena directement devant la maison de ses deux amis. La porte était fermée, mais le vent soufflait. Il n'y avait aucune trace de vie à l'intérieur, aucune lumière, simplement le vide. Les quelques traces de lutte étaient encore visibles sur le sol, devant la maison, et probablement à l'intérieur aussi. Quelqu'un avait, il fait le ménage, avec tout ça? Certainement pas.

Les lieux semblaient déserts, à première vue. Pourtant, quelque chose bondit sur la botte de Léo, en produisant de petits couinements stridents. Quand l'ingénieur baissa les yeux, il put voir Racaille, qui essayait tant bien que mal d'entrer dans la jambe de son pantalon. La petit bête devait être dehors depuis des heures… et seule.

L’ingénieur se pencha rapidement pour prendre la petite belette écailleuse dans ses bras. Il ouvrit son manteau et lui offrit de glisser a l’intérieur pour bénéficier un peu de sa chaleur. Pauvre petite bête. Juste pour ça, il avait bien fait de retourner le soir même.

Leo se dirigea vers la porte d’entrée et cogna d’abord à la porte, au cas où. Le manque de réponse propulsa son esprit en mode panique… impossible de savoir précisément l’heure mais Gabrielle devait sûrement être de retours à cette période dans la nuit. Avait-elle appris, d’une manière ou une autre, où se trouvait Lionel ? Il soupira et ouvrit la porte. La première étape serait de mettre la pauvre Raccaille au chaud, la deuxième de voir si Gabrielle n’était pas dans la maison quelque part. Après… sans doute faire un peu de ménage et se diriger vers l’hôpital afin d’avoir des nouvelles de Lionel. Si Gabrielle n’était pas à la maison se serait le prochain endroit logique où regarder.

Racaille se retrouva rapidement dans le manteau de Léo, collée contre lui, à la recherche de chaleur, oui, mais aussi de sa présence.

L'ingénieur entra et fouilla la maison. Rien de la scène n'avait été dérangé, signe que personne n'était passé par là depuis. D'ailleurs, sous sa recherche, le jeune homme se rendit compte que la maison était réellement déserte.

Il y avait les meubles à replacer, les quelques taches de sang bleu à faire disparaître, sinon peu de choses à faire. L'ingénieur pourrait repartir assez vite.

Le jeune homme poussa un grand soupir et de mit au travail. Il fit couler un peu d’eau et nettoya les taches de sang laissées par Thyrînn avant de remettre un peu d’ordre à travers les cadres brisés et les meubles renversés. La maison retrouva assez rapidement une allure plus rassurante, mais remettre en ordre la chambre de Lionel avait fait naître chez Leo un sentiment de culpabilité qu’il avait réussi à refouler durant toute la soirée.

Même s’il savait pertinemment que le coupable restait Pipes et ses manigances, il n’en restait pas moins que c’était pour l’atteindre, lui, que le terroriste s’en était pris à cette maison et à ses occupants. Sa main trouva lentement le chemin jusqu’à la plaque de métal maintenant présente à l’arrière de son crâne et il se demanda un instant si tout cela avait valu la peine. Il aurait beaucoup de difficulté à regarder Gabrielle et son frère dans les yeux après ce soir.

L’ingénieur s’assura de laisser ce qu’il fallait à racaille pour se nourrir, lui donna une dernière bonne dose d’affection et quitta la maison pour se mettre en route vers l’hôpital le plus près. Il avait la mâchoire serrée et son imagination se déchaînait. Si Pipes avait blessé sérieusement son ami ou si quoi que ce soit était arrivé à Gabrielle durant son absence, leur prochaine rencontre risquait d’être plus courte et plus sèche que ce a quoi le terroriste était en droit de s’attendre.

Les pas de Léo le menèrent vers le seul vrai hôpital de l'État, celui du secteur des sciences et de l'industrie. Les seuls autres poste de soin se trouvaient à être les Avant-Postes des Défenseurs, lieu où Lionel n'aurait certainement pas eu les soins nécessaires.

Léo arriva rapidement à l'hôpital et pu presque se faire surprendre à son arrivé. En effet, Amon l'attendait à l'entrée, l'air très alerte. Dès que Léo arriva, l'Altéré se dirigea vers lui, tout en jouant avec ses mains.

- Léo! Je vous en prie, venez... mademoiselle Gabrielle vous attend. Elle est dans la salle d'attente.

L'Altéré partit comme une flèche, avançant fluidement dans les couloirs. Il le menait directement à l'aile cybernétique du complexe.

L’ingénieur resta interdit en voyant l’un des membres de l’équipe de Stein l’attendre devant la porte de l’hopital. L’heure était tellement avancé que c’était techniquement le matin…

"Amon, qu’est-ce… "

Il n’eut pas le temps de poser des questions ou même de digérer ce qui était en train de se passer que son interlocuteur devenait son guide à travers les couloirs de l’hôpital encore endormis. Leo pris une grande inspiration et suivit le scientifique sans poser davantage de question. Il oscillait entre le soulagement de savoir que Lionel était entre bonnes mains et que Gabrielle n’avait pas eu à errer sans savoir ce qui se passait et l’anticipation de devoir affronter le regard de ses deux amis.

Ses pas se firent un peu moins vigoureux, mais il continua tout de même a suivre l’altéré.

Le duo se mit rapidement en marche dans les couloirs quasiment déserts. Peu de gens étaient là, de si tôt le matin, sauf ceux qui faisaient des heures de nuit, bien entendu. Malgré tout, ceux qui devaient être présents l'étaient et Léo vit donc quelques visages, pour la plupart étrangers.

Amon le guida assez rapidement dans le complexe. Il ne se dirigea pas vers la section génétique, comme aurait pu le croire le jeune ingénieur qui le suivait, mais plutôt dans la section médicale. Plus précisément, vers celle des chirurgies et des opérations.

- Laissez-moi vous expliquer. Quelqu'un est arrivé sur un coup de vent et a déposé le Défenseur aux portes de l'hôpital, sans rester, malgré l'insistance du garde. Ensuite, il a décrété un cas de rejet d'implants cybernétiques, probablement relié à une attaque de nature électromagnétique… ce qui nous a rappelé un cas précis, à l'équipe et moi, qu'Ulrich nous a présenté quelques… jours plus tôt? Bref, après une recherche de dossier et la stabilisation du Gardien… nous l'avons fait transférer en bloc opératoire. Hekathon et Enzo sont avec lui. Ils travaillent sur ses modifications cybernétiques, sur l'alliage que vous avez soumis à Ulrich. Gabrielle a été informée de sa présence au complexe quelques minutes après son arrivée. En bref…

L'Altéré s'arrêta quelques instants, pivota sur ses pieds, puis observa le jeune homme devant lui. Visiblement, il semblait s'en vouloir. D'autant parler, d'avoir l'air aussi nerveux… Il jouait avec ses mains, de manière incontrôlable, et sa queue se balançait nerveusement le long de sa jambe gauche.

- Je suis désolé. Ça fait beaucoup en peu de temps. Avec l'heure et tout, je devrais être plus considéré. Pardonnez-moi... dans tous les cas, je vous emmène dans la salle d'attente, rejoindre mademoiselle Gabrielle. Je… vais aller vous faire quelque chose à grignoter ensuite.

De nouveau, Amon décolla comme une flèche. Il se remit en route et entra avec Léo dans la section des blocs opératoires. Malgré l'heure très tardive, ou très tôt pour certains, la place grouillait. On sentait une certaine tension dans l'air, et beaucoup semblaient incertains. Le seul sujet de conversation qui semblait occuper toutes les lèvres restait celui du Gardien, sur lequel on changeait toute la cybernétique.

L'Altéré mena Léo dans une petite salle d'attente, toute près de la salle d'opération, cogna deux petits coups contre la porte, puis l'ouvrit doucement. À l'intérieur, Gabrielle s'était enroulée dans une couverture de laine, en boule sur une chaise. L'arrivée de nouvelles personnes semblait l'avoir fait sursauter.

- Mademoiselle Gabrielle… je vous emmène Léo. Je… vais aller vous chercher quelque chose à manger et à boire…

Amon s'en fût et laissa les deux jeunes gens ensembles, tout aussi subitement que ça. Gabrielle restait là, bien droite maintenant, clignant des yeux comme si tout ça n'était qu'un rêve irréel.

Leo entra dans la salle et demeura un moment figé en voyant Gabrielle. Après tous les événements de la soirée il avait l’impression que ça faisait des semaines qu’il ne l’avait pas vue. Il resta planté là a la regarder sans savoir quoi faire jusqu’à ce qu’Amon, fidèle a son habitude, quitte la pièce comme une flèche en les laissant seuls.

Il fallut encore quelques secondes à Leo avant de bouger. Il marcha lentement jusqu’à la chaise libre a côté de Gabrielle et s’assit doucement. Il regarda le mur un instant, se frotta les yeux, jongla manifestement avec ses idées encore quelques secondes avant de finalement tourner son regard fatigué vers son amie. Il ne parla pas tout de suite mais ses yeux en disaient long sur le cocktail d’émotions que le jeune homme ressentait.

"Je… je suis désolé… vraiment. "

Il soupira et s’arrêta un moment, l’émotion lui serrant la gorge. Il aurait aimé pouvoir faire une blague, détendre l’atmosphère et commencer a discuter normalement mais il en était incapable. Un de ses amis était présentement sur le bloc opératoire à cause de lui et il n’avait aucune idée de la manière de réconforter sa sœur. En ce moment tout ce qui lui était arrivé ne comptait pour rien comparé a ce qu’il avait fait subir a Lionel et Gabrielle. Il toussa et essaya de reprendre un semblant de contrôle.

"Je… tous les… tests ont étés effectués avec l’alliage… que j’ai développé. Il a été approuvé par Ulr… Par monsieur Stein lui-même. Je… tout devrais bien se passer."

Gabrielle continua de le fixer, comme si elle s'interrogeait sur sa réelle présence. Elle ne disait rien, même alors qu'il prenait place près d'elle. Il s'asseyait sur la chaise libre qu'elle appuyait doucement sa tête sur son épaule, toujours en silence. Un total épuisement prit place sur son visage, démontrant à quel point l'inquiétude l'avait rongé depuis des heures.

- ...ce n'est pas ta faute…

La jeune demoiselle se contenta de ça. Peut-être voulait-elle nier la réelle implication de Léo, peut-être s'en moquait-elle éperdument, mais les paroles avaient été sincères. Les paroles qui suivirent la firent acquiescer en silence, mais sans plus. Par contre, elle passa doucement son bras autour de celui de Léo et ferma les yeux. La jeune femme avait besoin de repos et la présence de son ami lui conférait le réconfort nécessaire pour qu'elle ferme les yeux un peu.

Le silence revint, troublé légèrement par les bruit distants de la salle d'opération. Personne ne passait, personne ne les dérangeait… ils avaient presque l'impression d'être seuls au monde.

Leo sentis la tête de Gabrielle se poser sur son épaule. Le poids était rassurant et pendant un instant le regard confus de l’ingénieur se perdit dans la masse de cheveux blonds. Le geste, ajouté aux paroles de son amie, permirent aux défenses de Leo d’enfin s’abaisser. Toute la pression qu’il retenait depuis qu’il avait découvert Lionel à moitié conscient dans sa chambre se relâcha et ses yeux s’embuèrent. Tellement d’émotions contradictoires essayaient de prendre le dessus… la bataille fut longue mais c’est finalement un savant mélange de soulagement et de tristesse qui prit le dessus.

Sa tête, lourde de fatigue, vint presque naturellement s’appuyer sur celle de son amie. Il se laissa aller, complètement vulnérable pendant un bon moment, le nez remplis de l’odeur des cheveux de Gabrielle. Il finit par rouvrir les yeux un bref instant, uniquement pour rajuster un peu la couverture de son amie sur ses épaules avant de les refermer. Il n’essaya même pas de briser le silence. En ce moment il se sentait mieux qu’il ne s’était sentis depuis un long moment et il comptait en profiter aussi longtemps qu’ils ne seraient pas dérangés. Gabrielle avait besoins de repos… et lui aussi.

La chaleur de son amie blottie contre lui ajoutée à la fatigue mentale de l’ingénieur lui firent rapidement basculer dans un sommeil réparateur. Il n’avait même plus la force de rêver et c’était tant mieux. Il ne restait plus qu’à espérer qu’il se réveillerait plus doucement que la dernière fois.

Les deux jeunes gens dormirent un moment, dans la tranquilité relative de la salle d'attente. Avec le temps, la salle se remplissait, mais les gens restaient subtiles, voyant le jeune couple qui somnolait.

Ce fut quelques heures plus tard qu'une douce main se posa sur l'épaule de Léo, le secouant très délicatement. Ce fut Amon qui se trouva devant lui, tenant deux bols et une carafe chaude dans ses trois autres mains. Il ne disait rien mais les observait attentivement.

Leo ouvrit doucement les yeux et cligna quelques fois avant de complètement se réveiller. La vision d’Amon l’observant attentivement n’aidait en rien sa sortie du monde des rêves mais au moins c’était une figure familière.

Son corps était très endolori et sa tête lui faisait un mal de chien. Une fois son retour complété il se dégagea doucement de Gabrielle, essayant de ne pas la réveiller.

"Bon matin Amon… "

Il soupira et grimaça sous la douleur. Il attrapa le pot de comprimés que Pipes lui avait laissé et en avala deux avant d’aller plus loin. Les effets tardaient a se faire sentir mais au moins la douleur n’était pas aussi virulente qu’à son dernier éveil.

"Vous avez des nouvelles de Lionel ?"

L'Altéré offrit un petit sourire à Léo, le voyant se réveiller. Son air s'obscurcit un peu en devinant la douleur sur le visage de son cadet, et une certaine inquiétude passa dans ses grands yeux.

- Bon matin... oui, nous avons des nouvelles. Une bonne partie de la cybernétique a été corrigée. Il est en salle de repos. Le reste va être fait demain. Vous pouvez aller le voir sans problèmes... mais, je vous en prie, mangez avant...

Gabrielle ouvrit alors les yeux et regarda autour. Elle eut un faible sourire en voyant les deux autres et bâilla longuement, l'air toute engourdie.

Leo hocha lentement la tête, soulagé de savoir que tout était pris en charge et que tout se passait bien, malgré l’ampleur de la tâche. Déjà que l’opération de conversion devait être éprouvante, Lionel se retrouvait en quelque sorte à tout subir une deuxième fois.

Il offrit un petit sourire à Gabrielle et lui posa une main sur l’épaule.

"Prends le temps de te réveiller. Amon nous a apporter à déjeuner. Après nous irons voir Lionel, ça va ?"

Il soupira. Les comprimés commençaient à faire effet et le brouhaha de la salle d’attente devenait plus supportable. Il regarda un instant ce qu’Amon leur avait apporté sans grande conviction. Son ventre lui criait beaucoup de choses mais la faim n’en faisait pas partie. Il fit taire son inconfort et se força à manger au moins quelques bouchées. Le jeune avait beau être dans ses habitudes professionnelles, il ne parvenait pas a se rappeler de son dernier repas et ça c’était mauvais signe.

L'Altéré continuait de les regarder alors que Léo parlait doucement à Gabrielle. Sa queue se balançait nerveusement derrière lui et ses pupilles s'élargissaient, rétrécissaient, sans cesse. Leur aîné semblait assez nerveux, mais les Cantoris étaient également de cette nature. Peut-être étaient-ce simplement les Altérations, ou peut-être était-ce la tâche qu'ils avaient eu à faire… personne ne pouvait vraiment savoir. Dans tous les cas, il tenait encore toute sa petite préparation du matin et regardait maintenant Gabrielle avec un petit sourire rassurant.

La jeune femme, elle, commença par s'immobiliser. Elle semblait se demander si elle avait bien entendu. Elle cligna des yeux quelques fois, puis les ouvrit bien grand. Un radieux sourire, qui laissait transparaître tout son soulagement, étira ses délicates lèvres.

Sans réellement pouvoir s'en empêcher, elle offrit une chaude accolade à Léo, puis se tourna vers Amon pour faire de même. L'Altéré l'arrêta juste à temps, empêchant un gros dégât de se produire.

- Merci! Merci merci merci!!!! ...on va manger… et on va aller le voir… Au nom de nos fondateurs, merci…

La jeune femme se rendit rapidement compte qu'elle avait les yeux humides et s'en retrouva timide. Elle cacha son visage dans ses mains quelques instants, laissant un instants à Amon pour s'exprimer.

- De rien. Voyons, de rien… Commencez par manger un peu. Ensuite… rappelez-vous qu'il a eu une nuit difficile. Allez-y doucement. Pour l'instant, il dort… Hekathon est avec lui. Enzo est allé nettoyer son matériel. Nous avons également le docteur DeLacroix qui le surveille. Il ne pourrait être entre de meilleurs mains.

Amon leur tendit les différents éléments de leur déjeuner, puis une fois qu'ils les prirent, observa Léo en jouant avec ses doigts. Une question semblait lui brûler les lèvres, mais il n'osait pas réellement la poser, visiblement. il les regarda quelques instants, tout de même, puis s'éloigna un peu, pour leur laisser leur intimité. Gabrielle ne remarqua en rien ce petit manège et se mit à manger, affamée et aux anges.

Leo Avait regardé Gabrielle se lever et remercier le docteur avec une certaine émotion. Soulagement et culpabilités étaient encore présents… mais heureusement les pourcentages changeaient lentement mais sûrement. Il regarda Amon et malgré sa fatigue remarqua son hésitation. Il soupira et le retint juste au moment où il s’éloignait.

"Je vais avoir besoins de vous parler quand vous aurez un moment. Après."

Il insista légèrement, espérant que son collègue comprendrait. Il tenait à régler un dossier a la fois. Il ne mangea pas beaucoup, les quelques cuiller de gruau qu’il prit suffirent à faire grogner son estomac. Il soupira en déposant le bol et se tourna vers Gabrielle, qu’il regarda un peu avant de sourire.

"J’ai l’impression que ça fait des semaines qu’on ne s’est pas vu… qu’on… qu’on ne s’est pas parlé. "

Il haussa les épaules.

"Tout a démarré si vite après notre travail sur le bracchium… des fois je dois prendre le temps de m’arrêter pour penser à respirer parce que j’ai l’impression que mon corps va omettre de le faire."

Il secoue doucement la tête, découragé. Entre ses allers-retours pour les nomades, son travail, tout ce qui se passait avec Stein et Pipes… l’ingénieur avait complètement oublié de prendre du temps pour être présent pour son amie.

Amon acquiesça, l'air de totalement comprendre le sous-entendu. il garda tout de même ses distances, par contre. Une certaine circulation était visible à cette heure: des patients, des infirmiers, quelques médecins… la plupart des patients étaient soit des Altérés ou Cyborgs, très peu d'humains se faisaient voir. Le duo était tout de même assez tranquille, malgré cette vie dans le bâtiment, ce qui aidait la timidité de Gabrielle.

La jeune femme termina de manger presqu'en même temps que Léo, à la différence qu'elle ne laissa rien dans son bol, de son côté. Elle observa Léo avec un sourire, puis haussa les épaules, l'air un peu gênée, mais en rien fâchée. Même, elle jeta un regard autour, s'approcha un peu et baissa la voix, pour qu'on ne les entendent pas.

- Avec les gens que tu aides, comment est-ce que quelqu'un pourrait t'en vouloir? Les seules petites choses qui restent à faire, de toute façon, ce sont des vérifications et quelques retouches. Rien de gros. On va avoir le temps.

Elle lui offrit un sourire doux et lui tapota gentiment l'épaule. Une ombre de fatigue planait encore dans son regard, mais elle ne le laissait pas trop voire.

- Tu vas devoir te reposer avant tout. Je suis certaine que tout ça a été difficile… on verra pour le Brachium après!

La jeune femme lui sourit de nouveau, puis jeta un œil du côté d'Amon, furtivement. Elle mourait d'envie d'aller prendre des nouvelles de son frère, et c'était très facile à remarquer. Son agitation était presque perceptible dans l'air et donnait un air énervé à son visage, pourtant d'un habituel doux.

- ...on y va? Tu as fini? Je veux voir comment il va...

Leo hocha doucement la tête et lui offrit un sourire timide.

"Merci Gabrielle. Merci de comprendre. "

Il déposa son bol et se leva, faisant signe à Amon qu’ils étaient prêts à le suivre. Il se doutait du calvaire que la jeune femme devait endurer en ce moment et il ne tenait pas à lui faire subit plus longtemps. Du côté de l’ingénieur la fatigue semblait encore très présente, les antidouleurs n’aidant en rien à rester éveillé. Mais il était à tout le moins plus solide sur ses jambes lorsqu’il entreprit de suivre Amon et Gabrielle jusqu’à la chambre où Lionel se reposait.

La jeune ingénieure lui fit un sourire franc, large, qui voulait tout dire. Elle ne lui en voulait pas, pour rien au monde. Dès qu'il se leva, elle vint prendre l'une de ses mains et la tint fermement, tout en se dirigeant vers Amon.

Celui-ci leur jeta un œil, puis les guida. Ils passèrent dans deux couloirs, arrivèrent dans une zone un peu plus tranquille, puis le groupe s'arrêta devant une porte fermée. L'Altéré tendit l'oreille, sa queue donna quelques petits coups nerveux derrière lui, puis il cogna deux coups, subtiles. Ce ne fut pas long que la porte s'ouvrit, découvrant Hékathon.

Le Mutalythe les observa quelques secondes, leur fit signe de ne pas faire trop de bruit, puis les fit entrer. La pièce était tout de même large, assez haute également. Quelques bureaux, plus pour les infirmiers que pour le patient, occupaient le long des murs. Quelques appareils étaient également là, dont un qui suivait le rythme cardiaque du patient. Il n'y avait pas de fenêtre, mais plusieurs chaises pour la visite. Une lit, au fond, soutenait le Gardien, qui semblait endormi.

L'état de Lionel semblait stable, de ce que les jeunes gens pouvaient voir. Il était couvert jusqu'au cou d'un couverture légère. son visage, par contre, était enroulé dans des bandages, ne laissant voir qu'un seul de ses yeux, fermé. Il respirait profondément, lentement et ne semblait plus en douleur, maintenant.

Gabrielle ne prit pas deux secondes pour approcher, rapidement mais silencieusement. Elle s'installa sur la chaise la plus près de son frère et l'observa rapidement également. L'inquiétude était revenue, comme un ras de marée, pour la jeune femme, qui découvrait là un spectacle pour le moins triste. Elle ne savait visiblement pas quoi faire, ni quoi dire, même si elle mourait d'envie de prendre l'une des mains de son aîné.

Leo entra dans la pièce à sa suite, saluant Hékathon au passage. Il observa un moment le décor mais bien vite son regard se dirigea vers le lit qui soutenait son ami. Il ne fit aucun mouvement pour retenir Gabrielle, mais la suivit et posa une main sur son épaule dès qu’il la rattrapa au chevet de son frère.

"Ils n’ont pas encore terminé l’opération. Changer toutes les connections représente un travail colossal… Mais il est entre de bonnes mains, manifestement."

Il se tourna vers Hekathon et Amon, leur envoyant un regard empreint de gratitude malgré sa propre inquiétude. Il voulait rassurer Gabrielle avant toute chose aussi faisait-il taire la voix de la culpabilité qui était revenue pour laisser celle de la logique, plus raisonnable, s’exprimer. Il resta tourné vers les deux membres de l’équipe de Stein.

"Son corps réagit de manière positive au nouvel l’alliage ? Tout semble en ordre ?"

Le signal était clair : « dites-moi tout docteur ». Amon avait dressé la table pour leur dire que tout allait bien mais manifestement avec la vision que le patient offrait il allait falloir plus de détails.