(terminé) La traque du responsable (Léo)

Leo écarquilla les yeux d’horreur.

"Vous… quoi ?! "

La mâchoire sanguinolente d’Heimpher, l’idée de retourner s’enfermer dans cet enfer étouffant et humide et celle encore plus ignoble d’obéir au mercenaire en charge de son « évacuation » créait un cocktail malsain dans l’esprit du jeune homme.

"Vous… Un simple bandeau sur les yeux suffirait non ? Ce n’est pas comme si j’avais le moindre point de repère pour savoir où on est non ? "

Il jeta un regard à la fois désespéré et inquiet vers Heimpher. Ça allait être horriblement douloureux pour lui non ? Son regard glissa distinctement vers son sac cette fois-ci. Il n’aurait jamais l’occasion de le saisir avant que le mercenaire s’en rende compte… mais lui… l’ingénieur serra les dents et regarda le barbu, plus assuré. Un peu.

"Trouvez une autre façon. Comment vous pensez que Pipes va réagir quand il l’apprendra ? "

Gagner du temps… Leo était en sécurité mais… peut-être Heimpher voulait-il une occasion ? une fenêtre d’action ? Si rien ne débloquait il accepterait son sort. Il allait s’en sortir après tout. Mais… maintenant que ses intuitions étaient confirmées il voulait aider le colosse.

restait à voir si il saisirait l'opportunité.

Jaygoh se met à rire, comme un malade mental. C'est un foutu sadique, ça je le savais déjà. Mais à ce point là… il vient de me dire de pas faire chier le ptit, parce que c'est une propriété privée de Pipes, et il veut le remettre dans mon bide? Espèce de connard sadique et tordu. Franchement… L'humain me regarde, et je peux voir son désespoir. De… l'inquiétude, aussi? Pourquoi cette émotion là? Je suis juste un gros monstre qui a comme raison de vivre de bouffer des humains. Au service des renégats, de l'Hécatombe. Pourquoi tu es inquiet pour le truc qui t'a chassé et qui voulait te manger?

Je vois les yeux de Léo se tourner vers mon vieux divan pourrit. Non… son sac. Ouais, son sac. Doit avoir quelque chose d'utile, là-dedans, non? Ce gars s'inquiète pour moi, et c'est même pas un des miens… le seul membre de mon groupe me regarde avec l'envie de me tuer… je sais pas quoi faire. Je sais franchement pas quoi faire. Ça doit se voir dans ma figure, parce que Jaygoh approche encore de moi. Laisse-moi tranquille… fous moi la paix, merde...

"Un bandeau? J'ai l'air de traîner ça? Pipes te veut vivant, et on va te sortir vivant. Ah… un gars avec un bandeau qui se balade en pleine rue, c'est pas subtile non plus. Alors, grosse merde, ouvre grand. Je t'étouffe avec si ça peut aider."

Il saisit ma mâchoire, de sa main cybernétique, et je gronde. Ça fait un mal de chien… il fait exprès de la bouger, pour me faire mal et voir son œuvre. Je vois bien son gros sourire… Il regarde plus Léo, mais si quelqu'un bouge, ça va être moi. Je sens les instincts qui poussent contre ma raison. Mon sang qui bouille. Mon regard devient plus sauvage. La douleur m'enrage...

"Arrête de brailler, je t'ai à peine effleurer. Si tu as de la difficulté à le faire sortir, je t'ouvrirai le bide. Hm? Ça serait pas la première fois qu'on t'ouvre comme un crustacé, non?

Sa main en métal se serre sur ma mâchoire. J'entends le craquement… et c'est le dernier truc que j'entends. Mon cerveau déconnecte. Je me sens lui saisir son foutu bras. Le courant qui me traverse, parce qu'il veut me faire lâcher. Mais je m'en fous. La rage me fait bouger. La bête, le monstre, me font bouger. Je saisis son bras. De la fumée monte de mon corps. Je le tiens bien fort, de toute ma force… et j'arrache. Nettement.

" ...si vous coopérez, monsieur, tout va bien se passer. Je ne vous ferez pas mal. Vous êtes en sécurité"

Mon corps est rage et sauvagerie, mais ma voix est neutre. Las. C'est moi qui parle… mais je sais pas quel moi. Pas le sauvage. Pas le chasseur… un moi que je connais pas. Un moi calme et doux. Je bouge tout seul, encore, et malgré la douleur, malgré le sang… je le bouffe. Net, précis. La douleur me remplit en même temps que lui. Je lui arrache son shot gun, qui tombe à terre, et une fois la chose faite… je me mets en boule à terre aussi. Je souffle fort. Je suis perdu. J'ai mal… et je me sens pas bien. Vraiment pas bien.

"Heimpher…!!! HEIMPHER!!!"

L’ingénieur avait regardé le mercenaire bouger vers Heimpher sans rien faire. Il voyait les yeux du colosse… Quelques secondes avant qu’il ne commence à bouger la scène s’était déjà déroulé dans son esprit. Il y avait longtemps qu’il n’avait pas ressentis une peur pareille. Pas devant la situation mais devant son incapacité à réagir, à décider, à… penser. Qu’allait-il se passer ? devait-il retenir le mercenaire ? Le méritait-il vraiment ? Devait-il empêcher Heimpher de succomber à ses impulsions ? Le flot de question ne cessait pas et tournoyaient dans l’esprit déjà engourdis du jeune homme.

Puis Heimpher agrippa le bras du barbu. Et Leo bougea.

Comme si ses nerfs s’étaient remis en marche d’un seul coup, ses mains se tendirent brusquement et il actionna d’abord l’aimant sous ses chaussures. Au maximum. Un puissant champ magnétique se fit ressentir et sa ceinture et son sac glissèrent vers ses pieds en même temps qu’une demi-douzaine de clous plus ou moins rouillés et d’autres détritus métalliques. L’ingénieur se saisit de ses choses et courut vers la porte sans demander son reste. Il se jeta contre la paroi et chercha frénétiquement la poignée. Afin de l’ouvrir. Ses mains cherchèrent en vain, tremblantes, avant de finalement trouver une sorte de levier. Il tenta de l’actionner, utilisant tout son corps pour le faire bouger sans arriver à rien. Il se força à se calmer, respirant laborieusement. Il faisait trop noir pour voir clair… mais il distinguait un système de verrou. Ce n’était pas un levier mais un piston qu’il avait tenté d’actionner. Et donc ça devrait être…

Ses pensées furent interrompues par l’étouffement soudain des cris du mercenaire. C’était comme si…

Il se retourna lentement et eut le souffle coupé devant le spectacle qui l’attendait. Heimpher, géant, brûlant de rage, les yeux fous, était en train d’engloutir son tourmenteur dans sa gueule ensanglantée. Un pan de mâchoire complète pendouillait, ne restant en place que parce que ladite mâchoire était distendue pour laisser passer sa proie. Il y avait tellement de sang… Le bras mécanique gisait un peu plus loin, impuissant devant le sort de son propriétaire. Que devait-il faire ? Était-ce une bonne chose ? Leo restait paralysé, adossé à la porte comme s’il voulait se fondre dans le mur.

Une grande respiration. Le spectacle perd de son impact. Une autre grande respiration. Ses idées redeviennent claires. Une troisième grande inspiration… et il sait maintenant ce qu’il doit faire.

L’ingénieur se releva, passe sa ceinture autours de sa taille et son sac en bandoulière avant de se diriger vers le colosse. En chemin il ouvrit son sac et en sortit sa trousse de premier soins, qu’il tint bien en évidence en s’approchant. Lentement. Il restait terrifié et totalement dépassé par la situation… mais peut-être pouvait-il au moins être utile ?

Leo continua d’approcher, toujours aussi lentement. Il avait côtoyé assez d’animaux pour connaître ce regard et savoir quoi faire. Il déposa lentement la trousse sur le sol et entreprit de l’ouvrir, sans quitter le colosse du regard.

"Je… crois qu’il serait plus sage qu’il reste là pour le moment. Il n’ira pas bien loin et ça nous permettra de… rassembler nos esprits. "

L’ingénieur soupira et sortis du fil, une aiguille, des tampons de coton et une bouteille de désinfectant. Son regard glissa sur le shotgun à canon scié et sur les bottes mais il n’y prêta pas attention. Maintenant qu’il savait qu’être dans l’estomac de l’altéré n’était pas une sentence mortelle il était moins à cran, c’est sûr.

"J’en déduis… que… si il sort vous aurez de gros ennuis avec vos… enfin. Vos employeurs ?"

Leo continua de préparer son matériel. Il enfila ses gants, imbiba un coton d’alcool et passa le fil pour préparer les points de suture.

"Vous… enfin. Si je peux me permettre… c’est peut-être la bonne occasion pour un… une réorientation de carrière ?"

Il se tint là, immobile, attendant l’autorisation de regarder sa mâchoire.

Il s'installe près de moi et me regarde. Une trousse… de soin? Je gronde. Jaygoh se tient pas tranquille du tout. Rassembler nos esprits… Je sais pas ce que je vais faire. Si Jaygoh s'en sort, je vais être dans la merde pendant trop longtemps… Tobias me le pardonnera pas. Jaygoh va se venger. Krieger... merde. Je vais mourir… et si je meurs pas, je vais espérer mourir...

"....ce sont pas mes employeurs… ce sont eux qui m'ont fait... pas des employeurs… les renégats…"

"Tu l'as ferme!!! Heimpher! Ferme-la et tue le! TUE LE!"

Le tuer… non... pourquoi pas? Arrête… Il a rien fait, lui! Il essaie juste de survivre! Il veut m'aider, lui! Pourquoi je le tuerais?! Non! Je comprend plus rien, encore... un mur… pourquoi un mur...

"...j'ferais quoi...? Mes instincts... veulent pas..."

Je gronde encore et je me crispe. Jaygoh est totalement incapable de bouger, maintenant. Il va manquer d'Air bientôt si je lui en gobe pas... si j'Attends assez, il va juste perdre connaissance et ça va être parfait. Il regarde ma mâchoire sans bouger, sans rien toucher, et je me rend compte qu'il a tout le matériel pour me réparer. Il attend juste ma permission...? JE tourne la tête de côté pour qu'il aie un meilleur accès et je bouge plus. J'Ai trop mal de toute façon. C'est tellement compliqué….

Leo écouta attentivement les paroles du colosse. Les pièces du puzzle se mettaient lentement en place. Quand il en eut l’autorisation, il marcha jusqu’à son interlocuteur et pris le tampon de désinfectant.

"Je vous préviens ça va faire mal. Prenez une grande inspiration. "

L’ingénieur se mit au travail, délicatement mais rapidement. La solution n’était pas atrocement acide, mais plus vite il aurait terminé et moins il risquait d’atteindre le bout de la mèche de l’altéré.

"Vous savez… les instincts sont une bonne chose mais ils sont d’abord un signal presque mécanique. Et si la mécanique fait défaut, ou si on a construit la mécanique avec un besoin particulier en tête… il peut valoir la peine de ne pas les écouter. "

Un tampon, deux, trois… Le désinfectant souillé de sang se retrouvait aux pieds du colosse assez rapidement. Mais son soignant avait déjà finis. Il appliqua une pommade antiseptique et analgésique, pour protéger et endormir la douleur avant de se mettre à coudre.

"Vous êtes chanceux : le tendon n’est pas totalement sectionné… ça va prendre un moment à guérir je vous préviens, mais avec suffisamment de repos il ne devrait pas y avoir de séquelles. Maintenant défense de bouger la mâchoire. Sinon vous allez rallonger le processus. "

Leo se mit, méticuleusement, à traiter la blessure. D’abord en faisant un point d’attache solide au tendon sectionné avec un fil soluble pour que le processus de cicatrisation puisse commencer, puis en refermant la plaie. Le processus prit un long moment et toute la concentration du jeune homme. Il s’arrêta quelque fois pour remettre une dose de pommade, histoire de garder son patient calme. Une fois le dernier nœud fait, il apposa un pansement et poussa un grand soupir. Il commença à ranger son matériel, satisfait mais épuisé.

"Voilà… vous pouvez parler mais évitez de trop ouvrir la mâchoire pour les prochains jours. "

Leo s’assit à même le sol et rangea tout son matériel dans son sac. Il ouvrit la bouche quelque fois, essayant de trouver la bonne formulation.

"Vous… avez un choix à faire. Ce genre de décision se prend normalement à tête reposée, avec suffisamment de temps de réflexion. Mais je ne crois pas que vous aurez beaucoup de temps devant vous. Soit vous attendez que vos… que les renégats vous trouvent et vous ramènent à leur service, soit vous prenez contrôle de votre vie et de vos instincts."

Leo serra les dents. Il savait qu’il allait sans doute regretter ses paroles mais il ne pouvait simplement pas faire autrement.

"Je suis prêt à vous aider, si vous en avez besoins. "

Il regarda Heimpher pour la première fois depuis un moment, attendant de voir sa réaction.

La douleur… je suis habitué d'avoir mal. Probablement trop habitué. L'humain approche et me demande d'inspirer, ce que je fais. Je vais devoir retenir mes foutus instincts… C'est pas parce que je suis habitué à la douleur que je l'endure bien. C'est super différent, ça. Meh… j'en ai marre. Journée de merde qui va juste en empirant…

Il me met son truc sur la mâchoire et je gronde. Ça pique, mais j'ai eu pire comme douleur. N'empêche, ça m'énerve… Il commence à me parler après et mes deux yeux le fixent. Ils brillent de leur éclat infernal. Je respire fort, comme un animal qui se retient de mordre. Mes muscles sont tous crispés. Pourquoi je me laisse toucher, moi, déjà?

"..c'est pas une histoire de si on écoute ou non… c'est pas ça. C'est pas simple comme ça…"

C'est pire. Nettement pire. Comme mon sang qui se met à bouillir et toute cette pression là, dans mon corps, qui fait bouger quelques pistons… me font avancer. Attaquer. Me font perdre la tête. Je ne décide plus. Le sauvage décide. Le monstre décide. C'est tellement compliqué. Il me met quelque chose d'autre sur la gueule, qui sent fort, et ça picote un peu. Après… ça fait moins mal. Au moins, c'est déjà ça.

"...défense de bouger la mâchoire?"

C'est quoi cette blague? Si je ne bouge plus la gueule… je pourrai pas manger. Surtout… c'est le premier à vouloir m'empêcher d'attaquer des gens, et là… Bouger la mâchoire pour le moment, peut-être? Il commence à coudre, et je comprend. Tant mieux. J'ai eu un peu peur…

Je le laisse faire, en grondant de temps en temps. Quelques fois, c'est à cause de la douleur. D'autres, c'est à cause de l'impatience. J'attend autant qu'il faut. De toute façon, je suis fatigué. J'ai des brûlures électriques, je le sais… L'os de la mâchoire, justement, de cassé aussi. Je tombe dans la lune et je sais qu'il a finit, juste parce qu'il me met un pansement. Ça me rappel toutes mes blessures…

Eeeet il recommence avec ses conneries. Je peux parler, mais pas trop l'ouvrir? Il se fout de moi? Le premier à me faire recracher une puriste, mais le premier à signer l'arrêt de mort de Jaygoh. Dans quel camp tu es, toi? À quoi tu joues? Bordel de merde… est-ce que je peux vraiment laisser mourir ce connard? LE bouffer, surtout? Probablement pas… mais bon. C'est pas comme si j'avais le choix.

"...j'lui ai arraché un bras. Il va mourir d'hémorragie. C'est pas toi qui voulait pas que je tue du monde?"

Une petite pique, peut-être. Je m'en fous. J'ai raison. Si c'est pas sa perte de sang qui le tue, c'est moi qui va finir par avoir trop faim. Heh. Et là, il dit qu'il veut m'aider. Pourquoi pas… Je sais pas. Ça vaut la peine d'essayer, non? C'est le seul qui veut m'aider, malgré ce que je lui ai fait… Il me regarde directement et je suis certain qu'il peut parfaitement voir la fatigue dans mes yeux. De la grosse fatigue.

"...m'aider… pis comment tu m'aiderais? J'suis dangereux, p'tit bonhomme. J'pensais que tu l'avais compris…"

Dis-moi que c'est pas grave. Que tu vas trouver une solution. Abandonne moi pas. J'en ai marre d'être seul. De me faire ramasser juste quand je suis utile. D'être un objet… Pourquoi je pense à ça, moi? Putain, à quel point je pense comme une catin moi?

Il eut un petit éclat de rire. Un rire jaune, sans joie.

"Oui. Ça je l’ai compris. "

Les évènements de la soirée et ceux de la précédente laissaient peu de place pour penser le contraire. Mais heureusement l’altéré avait montré sa vraie nature. Leo Se passa une main dans le visage et le regarda à nouveau.

"Et pourtant je vous offre mon aide. "

L’ingénieur resta un moment sans rien dire. Allait-il vraiment faire ça ? Il secoua la tête. La bonne question était « avait-il le choix? ».

"J’ai… j’ai moi-même des ressources assez limitées mais elles sont à vous. Sinon j’ai des contacts. Des gens qui peuvent vous aider sans rien demander en retours et d’autres qui seraient prêt à échanger un abri contre de l’information. On… on va trouver une solution. "

Il offrit un sourire encourageant à l’altéré, le premier depuis un moment. Ce n’étaient pas que des paroles en l’air. Zolvar, son ami mercenaire, pourrait peut-être contacter les Inhumans. Artemis pourrait offrir des informations, des conseils, des… enfin. Ils arriveraient bien à quelque chose.

L’esprit de Leo revint vers le mercenaire. Il avait vu beaucoup de sang, c’est vrai… mais son sort ne lui importait pas. Le jeune homme donnait toujours une chance, offrait sa considération et son respect sans contrainte jusqu’à ce que la personne à qui ils étaient destinés s’en montrent indignes. Et le barbu avait réussi cet exploit en moins de cinq minute. C’était une ordure qui avait déjà eu sa chance. Contrairement à la puriste qui avait sans doute été endoctrinée, qui avait agis de manière impulsive, le mercenaire avait le contrôle total sur ses actions. Son avis était déjà fait… mais ce n’était pas sa décision.

"Quant au mercenaire c’est votre choix. Il… il mérite peu importe ce qui va lui arriver. Mais si vous… enfin. Si vous ouvrez la mâchoire les points risquent de lâcher. Sans compter l’os de votre mâchoire… Enfin. La décision vous appartient. J’imagine qu’il n’a pas besoins de mourir si vous voulez passer à autre chose mais je ne crois pas qu’il vous laissera filer comme ça. "

Je le regarde. Je le fixe et je l'écoute. Il veut vraiment m'aider… est-ce que c'est juste une attrape? J'ai l'impression que oui. Mes instincts disent non, mais ma tête conne dit oui… Ou peut-être que c'est le contraire? Je sais plus. Est-ce que c'est important? Il dit avoir des contactes et des ressources. Que je pourrais avoir un abris. Mais est-ce que j'ai besoin d'abris? S'il le dit à personne, pour ici, je vais rester seul… Merde. Les autres vont venir. Jaygoh a dit que les autres savaient qu'il était ici… putain. Pourquoi y'a rien qui peut être simple… Surtout aujourd'hui...

"...du moment que quelqu'un sait que j'suis avec les renégats, c'est fini. Les Défenseurs vont me coffrer. "

Je dois arrêter de m'obstiner. Pourquoi je m'obstine en premier? Je veux qu'il m'aide! Je suis fatigué. JE sais pas encore de quoi, mais je le suis. Laisse-le m'aider, maudite tête conne! Par où on commence? Partir? Pour aller où? Jaygoh s'en sortira pas, ça c'est un fait. Sauf si je retiens ma faim jusque là… Est-ce que j'ai envie d'avoir à nourrir ce con? De devoir l'accueillir? Il va quand même se vider en dedans… Beurk. Je dois vraiment le faire?

Sans m'en rendre vraiment compte, je me retrouve sur le flanc, encore. À la grosse différence que ma grosse tête arrive sur les jambes de l'humain. Fait exprès ou non, je bouge pas de toute façon. J'ai mal, je suis fatigué et écoeuré… Est-ce que Tobias m'en voudrait raiment? Est-ce que j'ai vraiment d'autres choix de vie? Tapote-moi la tête et dis-moi que tout va bien aller...

L’ingénieur secoua doucement la tête. Il regarda un instant la porte, puis les alentours. Trouver un endroit discret dans le secteur de l’agriculture ne devrait pas être sorcier, en attendant.

"Les défenseurs étaient les derniers aidants auxquels je pensais ne vous en faites pas… "

Il allait continuer mais il sentit une légère pression sur ses jambes et perdit l’équilibre. Il tomba sur le vieux fauteuil et sentit la pression sur ses jambes s’accentuer. Était-ce… Il baissa les yeux et tomba nez à nez avec l’altéré, épuisé, démoralisé, confus… qui venait de prendre l’ingénieur en otage affectif.

Il fut désemparé un bref moment mais la situation lui rappela bien vite des souvenirs : son père élevait quelques gros bétails et le jeune homme s’entendait très bien avec eux. À un point tel qu’il avait réussi à convaincre son paternel de garder un des buffles sauteurs, Joso, pour la reproduction. Enfin… supposément. Il se retrouvait souvent dans des positions semblables à lui gratter ses immenses oreilles. C’est presque par instinct que Leo leva sa main, mais c’est avec un peu d’hésitation qu’il l’apposa sur la nuque du mastodonte. La situation lui semblait si irréelle…

"Je… je connais déjà un endroit dans le secteur de l’agriculture où vous seriez en sécurité et à l’abris. Au moins le temps que vous repreniez des forces. Après j’ai quelques amis scavengers. J’imagine que vous connaissez bien l’extérieur des murs non ? Et puis vous avez la liberté de travailler solo si ça vous arrange. Pas beaucoup de compte à rendre non plus."

Il continuait de peaufiner son plan d’action. Le but était simplement de proposer des options à Heimpher. Il peinait à croire qu’il le considérait maintenant comme une victime, mais son histoire était maintenant très claire. L’ingénieur soupira. Ce n’était pas le premier du genre qu’il croisait… devait-il y voir un quelque chose ?

Les Défenseurs sont les derniers sur sa liste… bon à savoir… Ça me rassure un peu. Juste un peu. J'ai pas envie de finir en taule. Pas avec les autres qui pourraient débarquer. Déjà qu'on en a des nôtres qui sont morts et un qui s'est fait capturer… Faudrait pas que moi aussi, je tombe là-dedans. Nah. Me tenir loin des cellules…

Je reste la tête sur ses jambes. Je m'en fous. Franchement, là, je m'en fous. Il pourrait me demander de me mettre à quatre pattes, je m'en foutrais et je le ferais. Mais non, il fait juste déposer ses mains sur ma tête. Il a l'habitude avec les grosses bêtes, ça se sent… Je suis une grosse bête? C'est vraiment important, que je sois une grosse bête ou non? Je dois vraiment arrêter de me poser des questions… Je suis trop confus et crevé pour ça. Me reposer un peu. Surveiller… en haut du mur...

"...j'connais bien le dehors, ouais. Mais j'pense pas que j'ferais un bon Scavenger… j'suis un chasseur…"

Ni quelqu'un de fiable, ou de l'État. Je suis juste un gros truc qui bouffe des gens. Qui pourrait se retourner et décider de te bouffer, là, maintenant. Peut-être même que je vais suivre son plan au début, et que tu moment qu'il va m'avoir laissé dans mon trou perdu, qu'il va m'avoir oublié là, je vais recommencer. Voir qu'il viendrait s'assurer que je suis sage… Nah. Probable qu'il soit gentil juste pour survivre. Je m'en fous. Pour le moment, j'ai ses mains sur la tête, et ça me fait du bien. Un peu de chaleur sur ma carapace fraîche.

Ils restèrent en silence dans la pièce sombre pendant un long moment. Le jeune homme ne savait pas trop quelle était la prochaine étape, mais une chose était claire : l’altéré avait besoins de repos. Et lui devait rassembler ses pensées. Il disait qu’il faisait partie des renégats… le groupe était clairement relié à Pipes. L’altéré qu’il avait rencontré le soir où il avait rencontré les nomades était-il l’un d’entre eux ? Sûrement… Et quel était ce nom qu’il avait mentionné ? Thobias ? il allait falloir qu’il fasse des recherches. L’ingénieur bougea légèrement pour tirer Heimpher de sa torpeur.

"Je… je crois qu’il faudra bientôt penser à bouger. Je ne crois pas que votre… camarade soit venu sans avertir personne. On peut se diriger à la cachette dont je vous ai parlé maintenant, ou se séparer et se donner un point de rencontre. Votre choix. "

Il bouge un peu, le petit humain. Déjà? Toute bonne chose a une fin… Surtout pour moi. Mes bonnes choses finissent trop vite. Je redresse la tête et le regarde un peu, l'air las. Écoeuré de ma journée serait mieux. Ça doit être ce que ma face laisse voir: de l'écoeurentite aigüe. J'ai un soupir. Un gros soupir, qu'il doit parfaitement sentir, vu notre proximité.

"Bouger.... je m'en fous. Au pire, je vais retourner dehors… c'est toi qui voit, si t'as envie de faire suivre ma grosse carcasse. Je m'en fous…"

Le pire, c'est que je ne mens pas. Si tu me dis qu'on se rejoins plus tard, on verra si je me pointes. Si tu me dis qu'on va à ta cachette maintenant… possible que je finisse en boule à terre… et que tu reste avec moi un peu. Je sais juste pas, et je m'en moques. Je sais juste que j'ai la grosse envie de ne plus retenir ma digestion et de tuer ce connard. De somnoler pendant que je profite de mon gros casse-croûte. Heh, douce vengeance…

Leo resta un moment sans rien dire, incertain. Tout ce qui venait de se passer, additionné à la douleur physique, semblait avoir sapé toute ses forces à l’altéré. Un genre de dépression passagère ? Ou simplement une baisse de pression. Après la giclée d’adrénaline qu’il devait avoir reçus.

Leo soupira à son tour. Même s’il le voulait, le jeune homme ne serait en mesure de rien faire sans la coopération de Heimpher.

"Si vous avez encore besoins de vous reposer je reste pour veiller sur vous… hors de question que je vous laisse seul dans cet état alors qu’une petite armée est peut-être à vos trousses. Quand vous serez prêt on bougera tout simplement. "

Il avait peut-être parlé un peu trop vite… Mais peu importe ce qu’il faisait il semblait bénéficier d’une genre d’immunité… mieux valait ne pas en tester les limites toutefois. Ses yeux commençaient à s’adapter à l’obscurité et à mieux discerner les détails de l’antre d’Heimpher. Vivait-il réellement ici ? où n’était-ce qu’une cachette ? un point parmi d’autres dans la ville qu’il avait aménagé pour se reposer entre deux sorties ?

Veiller sur moi? J'ai l'air d'un gros chien? Peut-être… si j'en ai vraiment l'air, est-ce que tu vas me gratter aussi? Me semble que j'aimerais ça, me faire gratter un peu… Heh. Je suis con. Je suis lâche… et ma tête veut pas travailler. Les instincts disent dort. Et moi, je me dis que je devrais effectivement bouger avant de me faire cueillir. Comment Thobias va réagir en voyant que j'ai bouffé ce con? Mal. Très mal.

"...on va bouger. J'me mettrai en boule après, cé tout… Heh. Bouger… dans quoi j'me suis embarqué encore…"

Je me lève et je traîne les pieds jusqu'à la porte. Probable que je revois plus mon trou. Je m'en aménagerai un autre. J'espère qu'il va être aussi confortable. J'Active l'ouverture et je pousse la porte pour l'ouvrir. Elle est lourde, mais je suis fort. Marcher avec le bide gonflé sera pas terrible… mais bon. Tant que je n'attire pas trop l'attention sur moi…

Je sors, et nous voilà dehors, dans le secteur des sciences. La bâtisse a été abandonné, de ce que j'en sais. Trop de réparations à faire avec la structure. Pas assez de matériaux. Moi, ça me plaisait. Maintenant.. ça plaira à d'autres.

Leo soupira d’aise quand le colosse leva enfin sa tête de ses jambes pour se mettre debout. Pas que l’expérience était désagréable, mais il commençait sérieusement à manquer de circulation sanguine dans ses jambes. La tête d’Heimpher à elle seule devait peser dans les 50 livres après tout…

"Une fois là-bas vous devriez être en sécurité… vous allez pouvoir récupérer. Je crois que j’ai encore quelques trucs là-bas. "

C’était encore un peu flou… mais de mémoire il avait amené un matelas et même quelques provisions non périssables. Ce ne serait rien d’extraordinaire mais c’était déjà ça. Il se leva après avoir massé un peu ses jambes engourdies et suivit l’altéré jusqu’à l’extérieur. L’air froid lui fouetta le visage comme une main griffue, mais une fois le choc thermique passé force était de reconnaitre que le temps s’adoucissait. Il reconnaissait vaguement où ils se trouvaient… la tour des Élus était visible et il croyait deviner les contours du complexe, à un kilomètre vers l’est.

"Suivez-moi… Je connais quelques routes qui sont moins passantes. Reste juste à espérer que nous n’aurons pas trop attiré l’attention. "

L’ingénieur se mit donc en marche vers sa cachette secrète. Elle se situait à l’extrémité des champs que son père, sa sœur et lui cultivaient lors de sa jeunesse. C’était une bonne marche, mais il restait attentif pour deux. Autant à l’état de son compagnon de fortune qu’aux alentours.

Le terrain était devenu plus dégagé, jusqu’à tranquillement se transformer en champ. Ils n’étaient pas dans les grandes herbes mais dans des chemins moins entretenus, qui reliaient les différents champs et permettaient le passage de machinerie plus intense que les simples charrues. Il n’y avait presque plus aucun arbre et s’ils étaient à découvert l’avantage était qu’il serait très difficile pour quelqu’un de s’approcher à leur insu. L’ingénieur ralenti.

"Nous ne sommes plus très loin. D’ici quelques minutes nous… "

Toc. Il sentit l’immense mâchoire écailleuse de poser sur le dessus de sa tête et resta un moment interdit, sans trop savoir comment réagir.

"Je.. euhmm… "


Il leva lentement le regard, n’osant trop bouger la tête sous les écailles râpeuses.

"Tout va bien ? "

Le portrait qu’ils offraient devait assurément être comique… mais Leo était sincère dans sa question. L’altéré semblait complètement perdu.

"Vous savez… très souvent en cas de dilemme il suffit de prendre une décision. Si une envie maladive vous prend de changer de décision alors c’est un signe et si vous vous sentez bien alors c’en est un autre. Je… je peux seulement imaginer ce que vous vivez… "

Un beau grand terrain dégagé. On peut facilement nous voir, mais difficilement nous approcher. Ouais… ça va être un endroit particulier, ça. Moi qui est habitué aux petits trous sombres… me voilà dans un grand champ. Une route entre les champs? Je m'en fous. Franchement, je m'en fous.

J'ai mon menton sur sa tête et je laisse le temps passer. Il a l'air tellement incertain. Une partie de moi me dit de le laisser tranquille. Une autre me dit de le bouffer. Une autre encore me dit le soulever et de le garder contre moi, dans toute sa chaleur et son côté fragile. Je… j'ai eu l'habitude de garder une petite chose fragile dans mes bras… mais je ne me rappel plus quoi. Ce n'est qu'une impression.

Il parle, et ça me sort de la lune. Si je vais bien? Non. Je ne sais pas. J'en sais rien. Une bête ne pense pas à comment elle va. Juste à si elle a une tanière et de la nourriture. Je sais pas. Probablement pas. Je me sens… bizarre. C'est le mieux que je peux dire.

"Je sais pas… Il va mourir. Je suis pas sensé tuer des non-humains. Je vais être dans la merde si ça s'apprend. Mais il me fait tellement chier. Je sais pas quoi faire. Je sais juste que si je le garde, il va mourir."

J'ai envie de le recracher. De le tuer, aussi. De bouffer le petit humain pour qu'il le soigne, et de les garder près de mon cœur. Je… j'ai envie de me mettre en boule au sol et de les laisser venir me chercher. De combattre jusqu'à la mort pour qu'ils ne me ramènent pas. Heh. J'y comprend plus rien… mais je laisse mon menton sur sa tête. Si ça l'avait dérangé, il me l'aurait dit, non?

Leo resta là sans bouger. Il retombait réellement en enfance, avec un gros animal imposant son besoins d’affection. Ce n’était pas envahissant et il avait l’habitude. Et puis… il avait dit qu’il voulait l’aider non ?

"Vous parlez encore comme si vous n’aviez pas le choix de retourner chez vos… hum… employeurs ? Je veux dire, que vous laissiez sortir cet homme ou non les conséquences risquent d’être assez intenses. Vous ne pouvez pas simplement prendre votre liberté ? Disparaitre dans la nature ? "

Leo ferma les yeux un moment. Malgré le dégoût que lui inspirait le mercenaire coincé dans le ventre de son camarade, il devait spécifier un point.

"Peu importe ce que vous décidez je serais là pour aider à recoudre et soigner. Vous… ou lui."

Leo leva doucement la main et flatta un peu la mâchoire d’Heimpher. Le côté encore intact, évidemment. Un peu comme il le faisait avec les buffles sauteurs que son père dressait.

"Tout ce qui importe c’est que vous preniez une décision. Si vous voulez sauver le mercenaire c’est maintenant ou jamais… je crains que dans l’état où il est ça risque d’être délicat de le sauver. Surtout au beau milieu de nulle part comme ça. Pour le reste eh bien vous pourrez toujours y penser après vous être reposé un peu."


Le jeune homme fit un inventaire mental de ce qui lui restait. Peut-être assez de bandages ou de gaze mais il ne pensait pas avoir ce qu'il fallait pour cautériser la plaie. Sans rien pour arrêter le saignement ce serait probablement la seule option...

Disparaître dans la nature... je peux pas faire ça. Nah. Ils vont me trouver. Je les connais. JE suis pas comme toi, petit gars... je ne peux pas décider de changer de travail demain. JE ne peux pas décider de me caser, de faire une famille et de devenir un vrai citoyen. Si on apprend que j'existe, c'est la prison. Et s'ils me ramènent... je pense même pas me souvenir de toi. Probablement pas.

Il va m'aider, au moins. Heh... on va le sortir et le donner aux Défenseurs. Une bonne action de ma part, et une manière d'avoir la paix un peu. Et bon... je suis déjà dans la merde. Pourquoi ne pas empirer mon cas, hein?

"...on va l'aider. Faut juste savoir comment on fait ça... Heh. Faudrait se mettre à l'abris au moins un peu..."

Pour que personne ne me voit vomir un cyborg ensanglanté. Ouais. J'aurais du le dire, ça. Toujours te protéger. Toujours chasser... Argh!!! Chut. Chuuuut... Concentre-toi sur sa petite main, qui te flatte la mâchoire... c'est con, mais j'aime ça. J'aime tellement ça. Continu de me flatter. Heh... Un fournisseur d'Affection, hein? J'ai le droit à ça, moi, de l'affection?

Les mains de Leo continuèrent leur mouvement encore un moment, le temps que son esprit fasse le tour des solutions qui s’offraient à lui. Il donna deux petites tapes pour signifier la fin de la séance de caresse.

"Bon eh bien dans ce cas il ne faudra plus tarder. Sinon on va se retrouver avec un cadavre sur les bras… Suivez-moi. "

Ils en avaient encore pour quelques minutes de marche… ils étaient tout près. Après avoir continué une centaine de mètres sur le chemin de terre battue le jeune homme s’enfonça a travers champ jusqu’à une petite butte couvert de plantes rabougries par le gel. Il tassa quelques-unes des grandes tiges pour révéler un genre d’ouverture, une vieille porte en bois renforcée. Le tout était presque invisible, même une fois les plantes dégagées. Leo ouvrit la porte pour découvrir un vieil escalier. Sans attendre de voir si Heimpher suivait ou pas, il commença à les descendre. C’est a peine deux mètres plus bas qu’ils touchèrent le sol. L’air était froid et humide et l’obscurité quasi-totale.

"Bon allons… voyons voir… mais où est-elle… ah… "

Heimpher put entendre Leo fouiner un moment, faisant tomber quelques objets avant que le son d’une alumette qu’on craque ne se fasse entendre. Quelques instants après une lampe à l’huile crépitèrent et une douce lumière éclaira les restes d’un genre de chambre froide ; derniers vestiges d’une maison qui devait avoir été présent a un moment, mais rasée pour faire place aux champs. Le plafond était assez bas et des racines le perçaient, tombant près des visiteurs. Quelques étagères étaient remplies de morceaux de métal en tout genre, d’engrenages et d’outils. Dans un coins une petite table et un vieux matelas recouvert d’une bâche en plastique. Le tout n’avait visiblement pas été visité depuis des années.

"Installez-vous… quand vous serez prêt… enfin… je crois que le plus simple va être que je reste a côté pour supporter vôtre mâchoire et m’assurer que les points ne cèdent pas. Reste que c’est une possibilité et que dans tous les cas ça risque de faire un mal de chien. À moins que vous n’ayez une meilleure idée… "

Faudra pas tarder. Ouais, là-dessus, il a raison. Je le suis, sans vraiment savoir où on va, et je le regarde faire. Il dégage un genre de porte et descend, sans vraiment regarder si je suis. Ça me dérange pas trop. Ce qui me dérange le plus, c'est le plafond bas. L'obscurité, elle, est pas un problème… mais je dois me promener penché, et ça, ça m'énerve.

J'arrive en bas avec lui et je regarde. Assez bien caché, avec un matelas. Heh, ça fait des lustres que j'ai pas dormi sur un matelas. Je vais être bien, semblerait. J'espère. Dans le pire, je changerai de place. Ça, c'est si le petit bonhomme vient pas voir si je suis encore là bientôt...

"Bon bah… je me fous à terre et j'le fais sortir. On arrangera ma gueule après, je m'en fous… Heh. Tout ça pour un gars que j'déteste…"

JE devrais le manger, le laisser mourir. Mais non. Une partie de moi ne veut pas. Tant pis. Adieu paix sale, sans Jaygoh dans les pattes… Je me mets à terre, à quatre pattes, et je me prépare… ça va être moche. Une bonne inspiration, un long soupir, et je commence à contracter mes muscles pour le faire remonter.

Leo termina de faire le tour des lieux le temps qu’Heimpher fasse son inspection. Les boites de conserve qu’il avait amenées il y a quelques années étaient encore à leur place. Il en prit une ou deux abimées qu’il jeta dans un coin de la pièce mais il devait rester assez de nourriture pour quelques jours sans problème. Une semaine, si l’altéré faisait preuve de contrôle et de parcimonie. Ou s’il chassait un peu en même temps.

L’ingénieur trouva un chalumeau et un morceau de métal qu’il installa dans le petit étau sur l’établis. Il alluma la torche au gaz et plaça le tout de manière à ce que le morceau de métal reste sous la flamme et que rien ne bouge. Puis, il s’approcha de son invité et s’agenouilla à côté de lui. Il soupira et sortis sa trousse de premier soins de son sac.

"Je suis prêt quand vous l’êtes. Je vais faire ce que je peux mais il est possible qu’il ne survive pas… vous comprenez ? "

Leo n’était pas médecin… il avait une bonne idée de ce qu’il devait faire mais recoudre quelqu’un au beau milieu de nul part sans équipement était quelque chose de totalement nouveau pour lui. Mais après tout… un corps humain n’était qu’un autre système de machinerie non ? Un système très fragile qui ne fonctionnerait plus jamais comme avant en cas d’erreur… Il soupira et plaça ses mains sur la mâchoire de l’altéré, prêt à l’aider.