(terminé) La traque du responsable (Léo)

Leo agit rapidement, utilisant ses mains afin d’essayer de limiter les dégâts dur la mâchoire d’Heimpher, avec un résultat assez limité. Presque tous les points de suture lâchèrent, et si il parvint à éviter que la blessure d’origine ne s’empire, il allait falloir refaire l’intégralité de ce qu’il avait déjà fait. Mais comme convenu, une fois le mercenaire sur le sol c’est sur lui que le jeune homme concentra ses efforts.

Il était inconscient, les manipulations qu’il avait à faire ne l’inquiétaient donc pas tellement. Pronostic rapide : pouls faible mais présent, respiration erratique, hémorragie sévère au niveau de l’épaule. Toutes les connections cybernétiques avaient étés arrachées, emportant une partie des tissus musculaires et plusieurs lambeaux de peau. Le fait d’être comprimé dans l’estomac de l’altéré semblait avoir ralentis le saignement mais maintenant son « patient » saignait abondamment. Il n’avait pas l’équipement nécessaire pour faire autrement… Après avoir rapidement nettoyé la plaie, il se leva et alla chercher le morceau de métal, a présent rouge cerise, à l’aide d’une paire de pince.

"Ça va faire mal… "

L’ingénieur serra les dents d’anticipation et s’approcha rapidement du mercenaire avec le morceau de métal a la main. Il fallait faire vite. Il se mit à cheval sur le torse du mercenaire pour l’empêcher de bouger au cas où la douleur serait suffisante pour le réveiller et appliqua le morceau de métal chauffé sur la blessure en petits coups. L’odeur de chair grillée remplis rapidement l’atmosphère confinée de la cachette. Il continua jusqu’à ce que le saignement cesse, sans faire attention aux protestations de son patient. Il se prépara à la suite des choses… Mais si il n’y avait pas de complications la prochaine étape allait être de s’occuper d’Heimpher et recommencer les points et son pansement.

Lorsque le cyborg se mit à se débattre Leo regretta instantanément de ne pas être plus lourd… son poids n’était clairement pas suffisant pour être une entrave efficace et il devait lutter vigoureusement pour maintenir un semblant de contrôle.

"Calmez-vous !"

Ils y étaient presque… Leo appliqua une dernière fois le fer rougis sur la plaie et observa un instant pour s’assurer que le sang ne coulait plus. L’agitation de son patient rendait l’examen difficile aussi se retourna-t-il pour planter son regard dans le sien.  

"J’essaie de vous… "

Trente-six chandelles emplirent son champ de vision avant qu’il eut terminé sa phrase. Un son mât et une douleur aigue à la mâchoire. Le cyborg avait beau être affaiblis par le manque de sang, le coup fut suffisant pour catapulter Leo sur le côté. Il tomba lourdement en grognant de douleur. Il se repris rapidement et tourna un regard remplis de rancœur vers le cyborg.

"Non mais ça va hein ! je peux vous laisser vous vider de votre sang aussi ! C’est votre choix."

Leo tendit une main vers sa ceinture. Au cas où le mercenaire refuserait de se calmer mieux valait ne pas être pris totalement au dépourvus.

Je les regarde aller, et je ne sais pas si je dois bouger. J'ai l'impression que si je touche à Jaygoh, je vais l'achever. Le fer touche la plaie de ce connard une dernière fois, et moi, je le vois. Le sang coule plus du tout. Heh. Tant mieux. Léo va avoir fini avec ça. Mais bon… pas avec le mal de gueule que le coup va lui donner.

Justement, Jaygoh tourne sur le flanc. Son regard croise le mien, et je gronde. Il se fige. Il sait pas quoi faire, et je m'en fous bien. Tiens toi tranquille, imbécile, sinon on en finit avec toi. Arrête de me regarder, aussi, et donne ton attention au ptit gars qui vient de te sauver la peau.

"Putain... de bordel de merde…"

Il a l'air perdu. Heh. Il cherche ses bottes. Son arme. Nah, tu trouveras pas ça ici. C'est encore là-bas. Je me mets assis, de mon côté, et je surveille. Il ne nous fera pas faux bond. Pas maintenant.

"...faudrait l'tenir tranquille en attendant…"

J'en dis pas plus. De toute façon, c'est suffisant pour que Jaygoh m'enligne de travers. C'est ça. Regarde moi pendant que le petit bonhomme prend sa ceinture.

Leo grogna. Le mercenaire était beaucoup trop vigoureux vu ce qu’il venait de subir… Mieux valait ne pas prendre de chance.
Il avait maintenant son arme en main. Une décharge électrique risquait d’être assez violent sur l’organisme affaiblis du mercenaire mais s’il continuait de se débattre ce serait pire encore. La cautérisation était extrêmement violente… mieux valait ne pas avoir à le refaire une deuxième fois. Leo appuya sur un bouton et le tube métallique qu’il tenait se déploya brusquement. Un coup de poignet plus tard et le fouet s’enroula autours du torse de son patient. Un choc électrique conséquent traversa son arme un instant plus tard. Leo maintint le courant un peu plus longtemps que nécessaire, juste pour être certain qu’il se tiendrait tranquille.

Jaygoh grogne et ne veut rien comprendre. Moi, je regarde la scène. Hop, mouvement du petit bonhomme, et un connard grillé, un. Heh. Jaygoh arrête de bouger, parti dans les pommes. Heh. Une bonne chose de faite.

"...si tu connais des Défenseurs… j'pense qu'ils aimeraient le cadeau… Un Jaygoh-connard-cuit emballé…"

Parler me fait un mal de chien. Je grogne de douleur et je me retrouve sur le flanc, encore. Je saigne à ne plus finir et je ne veux pas vraiment connaître l'état de ma gueule. La seule chose que je sais, c'est que je vais pouvoir oublier la chasse pendant quelques temps… Merde. Qu'est-ce que je vais faire, moi, pendant que je guéris, hein?

Leo hocha la tête en ramenant lentement son fouet dans son réceptacle. Il prit quelques instants pour attacher solidement le mercenaire avec une chaine avant de revenir vers l’altéré. La quantité de rouge sur son visage n’augurait rien de bon.

"Zut… ça saigne beaucoup… "

L’ingénieur ouvrit une fois de plus son matériel médical et s’approcha une nouvelle fois d’Heimpher. Il ne lui restait plus grand-chose dans sa petite trousse… mais au moins assez pour refaire les points de suture et refaire un pansement.

"Bon… restez tranquille un instant. Je vais essayer de faire vite mais je ne peux rien promettre. "

Leo se remit à l’ouvrage et il se rappela assez rapidement pourquoi il s’était dirigé en ingénierie plutôt qu’en médecine. Par le ciel qu’il était hors de sa zone de confort… Mais il fit son travail et encore une fois il le fit bien. Il fallut a Heimpher endurer encore une bonne quinzaine de minute de traitement avant de pouvoir à nouveau bouger. Leo poussa un soupir profond et sentit en apposant le pansement et se laissa tomber assis a même le sol.

"Bon… en espérant que ça tienne cette fois… Il faudrait idéalement garder la mâchoire fermée un bon moment pour permettre au tout de se refermer. Ensuite il faudra faire de petits mouvements, rien de trop sec, pour réhabituer le tout a bouger."

Il regarda le géant, incertain.

"Contentez-vous de petites « proies » , d’accord ? Si les légumes vous conviennent ce qu’il y a dans les boites devraient vous permettre de vous alimenter sans trop stresser votre mâchoire. "

L’ingénieur regarda un instant le mercenaire inconscient… Jaygoh...incertain de la marche à suivre.

"Je… crois bien que j’ai quelqu’un qui serait intéressé oui. Comme ça on serait sûr qu’il ne sera plus dans nos pattes."

Jaygoh se retrouve en saucissonné. Je trouve la chose un peu drôle, mais je ne ris pas. Je sais tellement qu'est-ce qui s'en vient. J'ai pas envie de rire. Contrairement à Jaygoh, moi, je reste tranquille. J'ai déjà assez mal de même. J'ai pas envie d'Avoir encore plus mal. Heh. Nah.

Je le laisse faire. Je me retiens de mordre, mais je gronde quand même un peu. Que je le veuille ou pas, ça fait pas du bien. Je reste sur le flanc, tranquille, et je me raidis par moments. Pas plus, pas moins. Je dois pas faire le con… même si j'ai une faim de loup. Heh, ça va être pénible. Dans la lune, c'est finit avant même que je m'en rende compte. Et du moment que le petit bonhomme s'assit à terre, je viens déposer ma grosse tête sur ses jambes. J'ai… besoin de chaleur, ça, c'est encore le cas. Je l'écoute et je chiâle pas. Tout c'que tu veux, tant que tu me flatte la tête, comme tantôt. Je retrouve mon air épuisé et je me contente de faire un "oui" de la tête.

"...j'vais rester tranquille… on donnera Jaygoh aux Défenseurs… il va me foutre la paix comme ça…"

Je soupir, la tête sur ses jambes, et je fixe le vide. Loooongue et bizarre de journée, aujourd'hui...

Bien assez tôt, un peu machinalement, la main de Leo se retrouva sur la tête du colosse en manque d’affection. L’ingénieur était épuisé a présent… ça faisait beaucoup d’émotions pour aujourd’hui. Son regard refusait de quitter le mercenaire attaché. Il avait tellement envie de s’endormir… de se réveiller le lendemain et de se rendre compte que tout n’était pas si compliqué que ça.

"Il ne quittera pas la surveillance des lockdowns quand il sera entre leurs pattes… "

Pour résumer il venait d’être complice dans la capture d’un renégat sans doute allié a Pipes et de la « mise en fuite » d’un altéré sans doute lié d’une manière ou d’une autre à l’organisation. Sa prochaine rencontre avec le « mystérieux protecteur de l’état » risquait d’être intéressante, a tout le moins.

"Je dois avouer ne pas trop savoir quoi faire par contre… Vous n’êtes clairement pas en état de le transporter… et ce n’est pas comme si je pouvais le transporter par moi-même jusqu’à un avant-poste défenseur. Encore moins le laisser attacher au beau milieu de nulle part en espérant qu’une patrouille le trouve. "

Il ne savait même pas si sa sœur, Annabelle, accepterait de l’aider. Déjà qu’il s’était fait remarqué par les défenseurs après son aventure en compagnie de Zolvar, mieux valait faire profil bas. Il ne voulait pas se retrouver sur une liste de surveillance non plus…

"Des idées ? si on attends qu’il se réveille je ne crois pas qu’il va nous suivre sagement… "

Sa petite main retourne sur ma tête, et j'ai l'impression que le monde s'arrête. Mes réflexions s'arrêtent, au moins. Ma tête se vide. Je sens la douleur, ma respiration et le mouvement de sa main. Je me demanderai plus tard pourquoi j'ai autant besoin de proximité que ça… Plus tard. Là, je suis calme. Je suis bien. Je ne veux as bouger. Je veux manger, je veux dormir, mais pas bouger. Je ferme mes yeux, je prend une longue inspiration…

Et il parle de Jaygoh.

Heh.

Mes yeux s'ouvrent de nouveau. Je suis un peu confus. Qu'est-ce qu'on fait? Je suis pas tant en état de le porter, là, maintenant. Mais… demain, je vais être capable de le porter. De l'assommer. On pourrait le remonter. Faire venir quelqu'un ici, peut-être? Je sais pas. J'en ai aucune idée...

"...on fait v'nir un Défenseur icitte… je l'assomme demain… quecqu'chose de même… Je sais pas… Ma tête veut plus fonctionner…"

J'ai pas réellement le temps de sentir mes bras bouger. Je sais juste que, maintenant, j'ai mes bras autour de sa taille et que je le serre. Je le tiens, peut-être? Je veux pas qu'il bouge. Du tout. Juste qu'il reste là. Ma grosse tête est bien calée contre ses jambes, son abdomen même, et je lui tient la taille de mes deux gros bras. J'ai l'air envahissant, peut-être, mais je m'en fous tellement...

Leo ne broncha presque pas à cette nouvelle proximité, se contentant de rajuster sa position suite à « l’attaque » d’Heimpher. Il avait l’habitude après tout… des grosses bêtes en manque d’affection, il en avait vu passer beaucoup. Il ne restait plus qu’à espérer qu’il le laisserait partir… la dernière fois qu’un buffle sauteur lui avait fait le coup il était resté coincé presqu’une heure avant que sa sœur ne l’entende gigoter sous la masse de muscle et de fourrure. Et il avait fallu encore une bonne dizaine de minute (le temps qu’elle arrête de rire) pour finalement lui porter secours.

"Amener un défenseur ici amènerait beaucoup trop de questions… sans compter que vous avez besoins de vous reposer et que je ne crois pas qu’ils vous laissent partir comme ça. "

La fatigue revenait mais l’esprit de Leo refusait de se reposer tant que Jaygoh restait là. Alors que sa main continuait de gratter la grosse tête de son « patient », son regard parcourait son petit atelier a la recherche d’une solution. Il avait tout ce qu’il fallait pour empêcher le mercenaire de bouger définitivement. Mais pour le déplacer il faudrait une machine qu’il n’avait pas les moyens de construire ici. Quoi que…

"Je… je crois que je pourrais construire un petit chariot… Il me reste quelques roues suffisamment grandes pour pouvoir le transporter dans la neige. Avec ça je serais en mesure d’aller le porter à l’un des postes de défenseur. "

Leo soupira. Enfin une solution. Il lui serait facile de laisser le chariot à proximité d’un poste défenseur et d’utiliser une de ses bombes aveuglantes pour attirer l’attention des patrouilleurs. Il resterait à l’écart de vue et Jaygoh n’échapperait pas à la justice. Il allait lui falloir a peu près une heure pour mettre le tout en place. Il avait besoins de souder quatre morceaux de métal ensemble et de faire une jante pour deux vieille roues de bicyclette… la tâche lui paraissait si simple maintenant qu’il avait un diplôme d’ingénierie.

Il prit encore un moment pour se reposer et gratter la tête d’heimpher. A un certain moment il tomba presque endormis mais décida de secouer un peu le gros nounours aux longues dents.

"Aller… je vais devoir m’y mettre sinon on va avoir un mercenaire grincheux sur les bras. Je ne crois pas que vous serez en mesure de vous reposer avec ça."

Mais si je suis pas là, quand le Défenseur va se pointer? Si je suis allé faire un tour? Pourquoi pas? Je veux juste la paix. Me laisser flatter, m'endormir et ne plus penser... ...raconte-moi une histoire, mon oncle… Raconte-moi quand tu as vu les grands oiseaux blancs… De où ça sort, ça, encore? Je sais pas. Une toute petite voix… douce, mignonne… qui? J'essaie de trouver. J'en ai aucune idée…

Je le laisse parler et je suis à peine ce qu'il dit. Faire un truc pour emmener l'autre con… Je le serre un peu plus et m'appuis correctement la tête. Chaleur… Il a une aura bizarre… chimique un peu, mais douce… J'inspire longuement, et j'expire très lentement. Mon souffle est chaud, assez imposant aussi. Une grosse bouffée de chaleur. On me l'a dit quelques fois. Heh. Je me ferme les yeux encore, juste bien, malgré la douleur. Je veux juste me reposer… juste ça…

...et il coupe ma féérie. Encore. Un mercenaire grincheux? Heh. Un poing dans la figure, et c'est fini. Il ne dérangera plus personne. De toute façon, dans mon état, je vais dormir comme une buche. Il me secoue, et je gronde pour faire savoir mon désaccord. Non… je ne veux pas bouger. Je suis bien, là. J'ai mangé assez de merde aujourd'hui, autant au figuré qu'au littéral. Du repos… c'est trop compliqué à avoir?

"...pas si j'lui met un poing dans la figure… j'dormirai dessus au pire…"

Je ne veux pas le dire, le "laisse-moi profiter de ton calme", mais mon corps me le cri. Je ne desserre pas ma prise. Je veux le garder. Je t'ai permis de vivre. Tu me dois bien ça. Un peu de temps. Un peu de douceur. Tu as dit que tu m'aiderais. J'ai besoin de ça. Reste… dors… s'il-te-plaît...

Leo, vaincu par l’insistance de la bête, cessa de se battre et ferma les yeux une deuxième fois. Il n’avait pas l’intention de les ouvrir. La chaleur que Heimpher dégageait était loins d'être étouffante dans l'atmosphère froide de la cave. Et puis... Le mercenaire était enchainé non ? pieds et mains… la seule manière qu’il aurait de se libérer serait de réussis à défaire les écrous qui retenaient le tout et compte tenu de la localisation de ce dernier ce ne serait pas évident sans se disloquer une hanche.

Il ne restait plus qu’a espérer qu’ils aient tous deux un sommeil léger, au cas où.

Leo avait eu un sommeil léger et agité, qui aurait peut-être même put être réparateur si il ne s’était pas fait réveillé en sursaut. Le contact soudainement rompu avec Heimpher et les cris de Jaygoh furent suffisant pour ruiner tout effet positif de cette sieste impromptue.

C’est complètement échevelé et les yeux hagards que l’ingénieur se redressa en même temps que l’altéré, sans trop savoir où donner de la tête.

"Quoi, qu’est-ce que… qu’est-ce qui… "

Sa vision finit enfin par s’éclaircir un peu et il prit le temps de regarder le tableau d’ensemble. Il relaxa un peu et prit le temps de respirer et de remettre un peu d’ordre dans son esprit confus.

"Bon… eh bien je crois qu’on va devoir bouger… moi enfin, avec lui… "

Leo étouffa un bâillement et regarda rapidement autours de lui. Ah oui ! un chariot… Il ne restait plus qu’à espérer qu’il restait suffisamment de gaz dans la bonbonne pour faire des soudures décentes, sinon le processus de fabrication serait un peu plus long et moins solide…

"Je… je vous laisse garder un œil sur lui pendant que je prépare le tout ?"

Le connard a tout gâché… le tenir tranquille, heh? Pas de problèmes. Je vais faire ça. Je me lève un peu et je me traîne vers Jaygoh. Le con recule comme il le peut. C'est quoi, tu as peur de moi, maintenant, du con? Je continu d'avancer vers lui, et une fois assez proche, je lui agrippe les chevilles. Il se débat encore, avec le plus de force qu'il a, mais je m'en fous. En deux temps, trois mouvements, je me retrouve étendu de tout mon long sur lui, sur le ventre. Je le sens gigoter, mais je m'en fous. Je sais comment me placer, et il manquera pas assez d'air pour que ce soit dangereux. Au moins, comme ça, aucun risque qu'il se sauve.

"....Heimpher!!!! ...pousse-toi… gros porc…!!! ...tasse...ton...gros...cul!!!"

"Ferme ta gueule… T'veux pas m'mettre d'mauvais poil…"

Bon, j'ai pas de poils, mais il comprend le message. Je regarde Léo, l'air totalement las. Mon air veut bien dire le "envoye, vas-y" que je ne dis pas de haute voix. Jaygoh continu de gigoter et essaie de me repousser, sans succès. Pauvre petit...

"...tasse-toi... de sur moi…!!! ...je vais t'en...coller une… dans la…!!!"

Je lui fous la main sur la bouche, et ses cris de colère se changent en petits sons étouffés. Douce musique… c'est presqu'une berceuse… Ma tête se dépose à terre, lentement, du côté où il n'a pas son bras, et je ferme les yeux encore. Il a la tête libre, sauf sa bouche, alors il va s'en sortir. Et puis, Léo va avoir le temps de faire son travail, maintenant...

Leo, maintenant un peu plus réveillé, regarda la scène avec un sourire amusé avant de se mettre au travail. Au moins le mercenaire ne risquait pas de bouger maintenant.

Il trouva quelques bonnes retailles d’acier qu’il coupa à la scie et qu’il souda ensemble pour faire un cadre solide avec deux poignées. Un long tube vint ensuite se rajouter pour servir de jante et deux vieilles roues de bicyclette virent se rajouter sur cette dernière pour compléter le chariot de base. Il fixa ensuite quelques morceaux de bois pour former une plateforme solide et termina l’assemblage en incluant quelques fixations où il pourrait attacher solidement son prisonnier enchaîné. Le tout lui demanda un peu plus d’une heure de travail. Le résultat était relativement rustique mais tout était solide et fonctionnel. Et surtout allait lui permettre de livrer Jaygoh à la justice sans exposer Heimpher aux gardiens.

Leo essuya ses mains et son visage avec un torchon avant de se tourner vers le duo étendu sur le sol.

"Parfais, ça devrait faire l’affaire. Je… je ne sais même pas quelle heure il est. Le mieux serait d’attendre la nuit pour sortir le tout et le placer là-dessus. Je ne crois pas qu’on pourra être très discret avec ça… "

J'ai une douce berceuse dans les oreilles, et un petit humain qui se met au travail. Un peu de chaleur, aussi… heh… Ma tête et mes paupières deviennent tellement lourdes. Bah… ah, pourquoi pas…

Léo fait son travail, et je m'en rend même pas compte. Je me suis endormi, là, sur ce con, à marmonner dans mon sommeil. Je sais que je le retiens. J'ai des instincts, et du moment qu'il bouge, je le retiens assez fermement. Il ira pas nulle part, et il ne parlera pas non plus…

Quand la petite voix du petit bonhomme se fait entendre, je sursaute presque. Je me soulève un peu, surpris, puis regarde dans sa direction… Attendre la… la nuit, ouais. Bordel… réveil bizarre…

"Je sais pas non plus… mais si i fait pas encore nuit, moi, je dors… bordel…"

Jaygoh ne gigote plus, mais j'entends sa voix étouffée. Et puis merde, je ne tasse pas ma main. Il continuera à râler ses bêtises pour lui-même, le con...

Leo hocha la tête et alla rapidement ouvrir la trappe menant à l’extérieur pour avoir une idée de l’heure. Un peu de neige avait été balayée par-dessus la plaque de bois mais pas assez pour que ce soit problématique.

Le ciel était encore noir, mais il semblait à Leo que la période entre chien et loup venait tout juste de se terminer. Il tendit l’oreille et n’entendit rien. Ce n’était donc pas le petit matin mais bel et bien le début de la soirée. Ils pourraient donc se mettre en route dans quelques heures… Il secoua la tête en revenant dans la cave. Lionel et Gabrielle allaient encore se faire un sang d’encre pour lui. Ses disparitions nocturnes devenaient un peu trop fréquentes à son gout.

"Bon… il suffit de laisser le temps aux rues de se vider et je pourrais aller porter… monsieur aux défenseurs. Ça laisse quelques heures pour vous reposer en attendant mais… "

Il désigna le chariot.

"...Avec ça je devrais être en mesure de l’apporter seul. Suffira de savoir si vous voulez me suivre au cas où ou non… J’imagine que de le voir se faire récolter devrait être assez satisfaisant. "

Leo n’avait aucune idée de l’historique entre Heimpher et Jaygoh… mais quelque chose lui disait que ce n’était pas là leur première histoire du genre. Pour réagir ainsi Heimpher devait attendre cette occasion depuis longtemps.

Je le regarde aller, et je sens l'air pendant qu'il ouvre la trappe. Le frais… doit faire nuit, comme de rien. Jaygoh gigote encore et je me replace, pour qu'il étouffe un peu, cette fois. J'en ai marre, et mon regard mauvais le fait savoir.

"...j'vais suivre… au cas où. J'verra bien si j'trouve ça drôle ou non… "

Satisfaisant… dans un sens, oui, dans l'autre, non… Je sais tellement que je vais me faire taper sur les doigts, si on me met la main dessus… Heh. S'ils me retrouvent, je suis dans la merde… Tellement dans la merde.

N'empêche, je me ferme les yeux. Jaygoh a de la difficulté à respirer, mais pas assez pour étouffer. Juste assez pour qu'il se tienne tranquille. Assez, aussi, pour qu'il garde son air à la place de parler. C'est parfait, ça… Je le vois jeter un regard mauvais à Léo, mais j'en fais rien. Tant pis pour toi. Moi… je relaxe et je ferme les yeux.

"Parfais… je viendrais vous réveiller lorsque le moment sera venu. "

Leo évita soigneusement le regard du mercenaire et lui tourna le dos. Ce n’était pas comme s’il allait se sauver maintenant qu’il avait près de trois cent kilos de muscles qui le retenait sur le sol. Il regarda autours de lui et s’activa en attendant que la nuit avance un peu.

Rien d’assez bruyant pour déranger Heimpher, mais il prit quand même la peine de faire un peu de ménage dans le petit abri. Il mit la main sur une couverture qu’il avait apporté à un moment et la déposa sur Heimpher. Elle ne couvrait a peu près que la moitié de son énorme corps mais c’était mieux que rien… Il avait des chandelles a profusion, encore un peu d’huile pour la lampe et de gaz. Il fallut une grosse demi-heure à l’ingénieur pour concocter un petit système de chauffage à l’aide de sa torche et d’un diffuseur improvisé.

L’ingénieur continua de s’afférer à rendre le tout plus confortable et une douce chaleur régnait à présent dans la cave. Il ouvrit la porte et la vision de la lune haute lui confirma que les rues risquaient d’être beaucoup plus calmes. Il retourna à l’intérieur et secoua doucement son protégé protecteur pour le réveiller.

"Heimpher ? C’est le bon moment. Après ça vous pourrez passer les trois prochains jours à dormir si vous voulez… "

L’ingénieur entreprit de sortir le chariot à l'extérieur, tâche qui lui arracha quelques grognements mais qui ne s'avéra pas trop compliqué. Il avait prévu le chariot en fonction de l'espace qu'il avait pour le sortir, tout comme il avait préparé le chariot avec des attaches pour fixer les chaines qui entravaient déjà le mercenaire. Inutile de prendre le risque qu’il s’échappe non ? Si Jaygoh ne se débattait pas trop l'opération serait très simple.

Je me rendors, encore. Je bouge un peu, je m'en rend compte cette fois. Des drôles de rêves, encore. La voix de la petite fillette, qui me flotte dans les oreilles… maudit que mes nuits sont pas reposantes quand je rêve à des trucs de même… je dors quand même, tout le temps que petit bonhomme me laisse. Jaygoh reste tranquille, il a pas le choix. J'entends à peine les bruits de l'humain. Je suis habitué aux bruits…

Mon nom me réveille en demi sursaut, par contre. Je me redresse un peu et je regarde autour, un peu déboussolé. Le moment… ouais, le moment. Je lui fait un signe de tête, me lève, ramasse Jaygoh et monte lâchement. Le pauvre petit bonhomme à l'air d'avoir besoin d'aide… je l'aide un peu aussi, en emmenant le gros con sur mon épaule. C'est pas long qu'il se remet à chiâler.

"Heimpher….! Qu'est-ce… que vous pensez… que vous faites… hein?!"

"J't'ai pas assez cogné pour que tu la ferme, ça à l'air… on t'emmène prendre l'air."

J'ajoute rien. J'aide Léo à le mettre sur le chariot, je le retiens en fait et le dépose à la bonne place, mais le reste… c'est à lui de le faire. N'empêche, je le regarde, un peu incertain. C'est là qu'on se sépare. Que je vois s'il va revenir. Que je décide de ce que je fais. De mon avenir… Heh.

Leo accueillit l’aide d’Heimpher avec gratitude. Une fois Jaygoh sur le chariot il ne fallut que quelques instants à l’ingénieur pour le fixer solidement au cadre métallique. Il sourit et sortis un morceau de tissus de sa poche qu’il utilisa pour bâillonner solidement leur « prisonnier ». Il se frotta un instant l’arrière de la tête, histoire de trouver un peu de détermination et se tourna vers le colosse.

"Bon, eh bien je vais le livrer aux autorités et je tente de revenir aussi tôt que possible avec des vivres. Idéalement un plan, également… je n’ai aucune idée de l’aide que mes contacts seront en mesure de donner mais je compte bien essayer de vous trouver une porte de sortie. Peut-être que certains groupes de mercenaires seraient disposés à engager un « freelance » ? "

Leo sourit à l’idée de demander aux scavenger… sa dernière visite à la caserne ne s’était pas très bien déroulée. Enfin. Il se saisit des deux branches du chariot et se prépara à partir.

"D’ici là beaucoup de repos et par pitié évitez de trop bouger la mâchoire. Il faudra que je revienne au plus tard demain refaire le pansement. Défense de gratter. "

L’ingénieur était prêt. Il ne restait plus qu’à savoir si l’altéré serait en mesure de se débrouiller seul en son absence.

Jaygoh se retrouve sur le chariot, et bâillonné en plus. J'ai un petit sourire, mais pas plus. Ça me fait mal de toute façon. Maintenant… ce sont les au revoir. ou les adieux. Je croise les bras et le regarde, le regard encore vague du sommeil… pas me gratter, pas étirer ma gueule, il va revenir demain… ok. JE pense que je vais dormir, de toute façon… Ouais...

"J'vais m'tenir tranquille… bonne chance avec c'con là… On verra pour les autres trucs…"

J'ajoute rien et je retourne dans la cachette. Jaygoh se débat comme un fou, mais ça sert à rien. Moi… je veux juste la paix, là-maintenant. Dormir pour de bon, pour les quinze prochaines années avec de la chance...