Où te caches-tu? (Aïra)

Elle fut surprise, ça, pas de doute. Au demeurant, elle garda son calme alors que les crépitement l'envahissaient. Réfléchir. Une solution, un bouton "off".

Elle ricanna nerveusement.

-Tu ne comptes pas me transformer en dessert? Les altérés ne sont pas à ton menu, non?

Réfléchis, réfléchis...

Gagner du temps. Ouais, ça pourrait peut-être marcher.

-C'est ton tour non?

Coup de poker.

Son petit rire est nerveux. Parfait. Son petit coeur bat plus vite, en plus. C'est pas assez. On va continuer de jouer encore...

"...j'peux faire des exceptions pour une affaire spéciale comme toi..."

Mon tour? Non, on ne joue pas à ce jeu-là. On joue au mien. Je soulève ses pieds un peu et j'ouvre la gueule. Ma grosse langue passe sur les extrémités noires. Hm... sucré un peu, encore. Puis, les pieds disparaissent dans la gueule, et je me mets à les suçoter un peu. Je la lâche pas des yeux. Je veux tout voir de sa réaction.

Merde. Merde merde merde merde merde…

Sa respiration se fit tremblante, et les crépitements presque bruyants, la ceinture se souleva de terre mais Aïra la retint. Elle se braqua sur ses coudes, sans trop se débattre, les yeux fixés dans ceux de cette étrange créature. En plus de la peur, une sourde colère se mettait à brûler en elle.

-Heimpher.

Sa voix se faisait sèche, claquant comme un coup de fouet. Mis à part cette foutu ceinture, elle n’avait rien.
La boucle, se dit-elle. Dans un œil, ça peut déconcentrer. Mais je ne veux pas lui faire mal. Pitié, dis moi que c'est un jeu. Putain, faites que ce soit un jeu malsain.

-Heimpher arrête s’il te plaît.

Le feu de rage brûlait presque autant que celui de la peur. Dans quel pétrin sa libido l’avait encore fourré?

Heh. Elle semble à point. Ouais. Je vois la peur, la colère. Elle me regarde dans les yeux et j'admire secrètement les siens. Je reste immobile, ses pieds dans ma gueule encore... puis je les fais sortir.

Je la lâche et je me couche près d'elle, sur le flanc. Je gronde doucement et je ris, tout bas.

"C'est beau, j'arrête de faire le con. Hehe. J'm'excuse."

Un autre grondement doux m'échappe et je lui lèche l'épaule. C'était drôle ça.

La ceinture se fracassa sur le sol et elle lâcha un soupirant « Putain »… Puis, nerveusement au début et sincèrement ensuite, elle se mit à rire. Rire aux éclats.

-T’es dégueulasse, fit elle, hoquetant de rire. J’ai les pieds plein de bave.

Elle se calma un peu et ricana.

-Mon seul plan était de t’envoyer la boucle de ceinture dans l’œil. Comme si ça aurait fait quoi que ce soit… Faut vraiment que j’arrête de me mettre volontairement dans la merde comme ça, moi.

Elle tourna sa tête vers lui et s’approcha. Elle lui gratta le menton puis l’embrassa sur le front.

-Merci de ne pas m’avoir gobé, je ne tiens pas particulièrement à passer mes derniers instants avec le reste du barman.

Sa réaction... je peux pas m'empêcher de rigoler. Un peu avant elle, mais totalement avec elle. Bordel... je veux revoir cette petite chauve-souris. Je l'aime bien.

"J'Aurais pu être plus dégueu que ça. Plus baveux, genre..."

La boucle de ceinture dans une oeil? Vraiment? Ça m'aurait presque rien fait. J'ai tellement eu pire... Elle approche, je la laisse faire... et... elle fait quoi, là? Les lèvres, contre mon front. C'est... donbin bizarre? Je... j'ai déjà fait ça à quelqu'un... Merde... merde... Cheveux noirs... odeur de lilas... Non. PAs maintenant. Pas de flashs maintenant! Sa voix... concentre-toi sur elle.

"...ça aurait pas été confo de toute façon. Y'était gros, l'barman. Avoir rien eu... j't'aurais peut-être gobé. Pis recraché après... Tin, j'viens d'faire mon tour."

J'ai à peine caché le trouble dans ma voix. Pourquoi tu reviens dans ma tête, petite fille?

Elle remarqua sa voix. Elle ne dit rien, ayant bien sentit depuis le début de la soirée qu’Heimpher était un homme troublé.

Oui, un homme. Un homme de 3 mètres couverts d’écailles et de blessures, au dents pointues et bavant comme un gros chien.

Mais un homme. Il avait un cœur. Sous une bonne couche de rage, de peur, de sauvagerie, il y avait un cœur.
Elle se resserra un peu contre lui et ferma les yeux. Cette confiance totalement aveugle, elle ne se l’expliquait pas et, honnêtement, elle n’avait pas envie de se l’expliquer.

-Mon tour… Fit elle, doucement.

Elle ôta ses cheveux coincés sous son épaule, ils retombèrent éparts derrière elle.

-J’ai peur des foules et des docteurs. Ce qui est absolument absurde puisque, en contrepartie, je n’ai absolument pas peur de la mort.

Elle passa sa main sur un des cicatrices qui lézardait la carapace. Doucement.

Elle se colle, et ça me fait gronder, doucement encore. Je la regarde, tranquillement. Je l'étudie du regard, attentivement. J'aime ses dessins, sur sa peau. Comem des marquages, qui rappellent que la petite chauve-souris est spéciale.

Elle me raconte ça... et je me rend compte que je me sens pareil. Trop pareil. J'ai pas peur de mourir. J'ai rien à quoi me rattacher. J'ai pas tant d'espoirs d'avenir. Vivre pour aujourd'hui, et on verra demain... Sa main passe sur une de mes marques, et je me rappel comment je l'ai eu. Une proie qui avait un couteau. Qui me l'a planté assez profond. Mais... je suis encore là.

"Des Altérés qui ont peur des docs... y'en a trop de ça... Mourir, c'est moins pire que souffrir..."

Tellement moins pire... Le choc, trop fort, électrique, qui me travers dès que je résiste. La douleur. La flamme, près de mon oeil, sur ma gueule... Je bouge, sans vraiment m'en rendre compte. Je me tasse, je me retrouve à quatre pattes et je respire fort. Rapidement, difficilement. Non, s'te-plaît, fais pas ça... Fais moi pas mal... Arrête de me faire mal... Heimpher… je m'excuse tellement, mais… Mais je vais totalement profiter de ce qui va suivre. Tu vas m'appartenir. Rappel toi mes paroles. Je chigne et je secoue la tête. Je gronde. Non... non! Fais-moi pas mal!! Bordel... j'suis où? Je suis quand? Je vois plus clair...!

Elle le vit s’agiter et son cœur se serra dans sa poitrine.

-Heimpher. Murmura-t-elle.

Elle passa ses mains sur sa grosse tête et lui embrassa le front de nouveau. Elle parla doucement, le front collé à son front.

-chhhhhhht. Heimpher, tout va bien. Respire lentement.

Elle si petite et lui si grand. Pourtant, l’espace d’un instant, il paraissait minuscule et tellement apeuré.

-Heimpher, c’est Aïra… Respire, mon grand.

Elle commença à fredonner une petite comptine, seul souvenir encore intact de ce que son père lui chantait alors qu’elle était toute petite.

Pas les chocs! Pas le monstre! Non! S'te-plaît! J'obéis pas... je sais que j'obéis pas! Je m'excuse! Arrête de me faire mal! Une petite voix... dans mon oreille... dans... le vrai monde? Chut. Tout va bien. Respire lentement.

Lentement...? Je... je ne peux pas. Ça brûle dans mes veines. Ça coule dans mon sang. Et ce monstre... l'odeur de l'ozone dans l'air... Je ne veux pas encore me faire électrocuter!

"ARRÊTE!!!!!"

Je repousse la chose, près de moi. Je vois juste le monstre... Needles...? Les deux... sont si pareils.... Mais c'est pas lui, non? Il est... mon protecteur... mon maître! Non!!! NON! Léo! LÉO! fais-le sortir de ma tête!!!

Le silence. Je veux du silence...

Je me lève, je vais vers un arbre, et je m'y frappe la tête. Le plus fort possible. Le choc est tellement fort que j'en tombe à terre. J'ai des étoiles dans les yeux, sur le dos. Je suis étourdi, sonné... et j'ai l'écho d'une comptine dans ma tête...

Elle revola de quelques pieds en un couinement de surprise.

-HEIMPHER! s'exclama t'elle en relevant la tête.

Elle se leva et s'approcha doucement.

-Heimpher...? C'est moi, Heim... Aïra, la petite chauve souris? Heim... qu'est ce qu'il se passe?

Elle ne comprennait rien mais le voir ainsi... Qu'est ce qu'il se passait dans sa tête.

-Je m'excuse si j'ai fait quelque chose je...

Elle ne savait pas quoi dire.

Le petit coin tranquille.. la mousse... La voix de la petite chauve-souris... C'était violent, ça... Tellement violent. Pire depuis que je sais que ça tourne pas rond dans mon crâne... Je tourne la tête vers elle. Je la regarde, l'air perdu. Sonné. Heh... triste que la deuxième Aïra que je vois sois pas réellemmm

"...c'pas toi... Heh... j'vais vraiment d'voir le trouver..."

C'est pour ça que je cherchais le cyborg, non? Pour m'aider à remettre de l'ordre dans ma tête. Pour m'aider à me rappeler qui j'étais. À comprendre qui je suis. Et là... je m'envois en l'air avec la première qui a du caractère, je bouffe un humain et je fais des crises en plein État... Bravo le gros... Bordel que je fais dure...

Je tends le bras vers elle. Je veux qu'elle revienne contre moi. Je veux... la paix. Dormir. Oublier... je veux mon alpha. Son odeur rassurante...

Elle soupira, soulagée et ne refusa pas l'étreinte. Elle respira son odeur, aux accents inconnus.

-Retrouver qui?

Elle se serra contre lui.

-Je veux t'aider, Heim...

Aïra se colle. Je la serre. Doucement. Je ne veux pas lui faire mal... J'enfouis mon museau dans ses cheveux et je respire. Longuement. J'attends que ma tête tourne moins un peu. Retrouver qui... est-ce que je peux te le dire? Comme si tu savais quelque chose sur ce gars pas trouvable...

"...ça d'l'air qu'ya un gars qui est bon avec les trucs de tête... les trucs mentaux. Un cyborg... un chef de culte, j'pense... quelqu'un que j'connais, en qui j'ai confiance, m'a dit d'le trouver... qu'il pourrait m'aider... à m'rappeler. Ce qui est vrai... et ce qui l'est pas..."

Je soupir. Un gros soupir plein de chaleur. Je vais avoir un sacré mal de crâne pendant un moment. Encore heureux d'avoir une foutue carapace... à la force que je dois utiliser, je me serais éclater le crâne depuis longtemps...

Elle fronça les sourcils et se recula un peu, sans pour autant se décoller. Se pourrait-il que...

-Le Netralite? Demanda t-elle

Ça lui paraîssait la parfaite correspondance.

Le Netra...? Je me redresse sur les coudes, un peu, et je la fixe. Elle connaît le gars? Pour de vrai? C'est une blague... ça peut pas être une blague. Elle a dit son nom. Sans même hésiter. Elle le connaît.

"...tu sais c'est qui?"

Je n'ajoute rien. J'ai pas l'air agressif non plus. Je veux juste de l'aide. Pas faire mal au gars... Juste un coup de main pour faire le ménage dans ma grosse tête de monstre.

Elle sourit, intriguée.

-C'est mon mentor. Il m'a aidé avec mon don et lorsque j'ai perdu mon père.

Elle haussa un sourcil.

-Tu penses... qu'il pourrait t'aider avec... tout ça?

Elle hésita.

-Je... peux le chercher avec toi. Je penses savoir où il est.

Bordel.. elle le connaît! Finalement de la chance? De la chance pour le pauvre monstre? Semblerait!!! Putain. Oui. Oui je le pense. Léo le pense aussi. On le pense tous... Et je veux savoir! Je veux savoir qui j'étais! Qui je suis!

"...j'pense que oui. j'Pense qu'il pourrait m'aider... Je veux au moins essayer! J'veux savoir! Qu'est-ce qui est vrai! Qui j'suis! Qui j'étais! Aide moi, s'te-plaît..."

Je la ramène contre moi. On roule ensemble, et je me retrouve sur le dos, elle sur mon corps. Je la regarde, je me redresse, et je l'embrasse. Doucement, très doucement.

"...aide-moi, s'te-plaît... pis j'fais c'que tu veux en échange..."

Je la fixe. Mon coeur bat fort. Tellement fort. Une chance... j'ai juste besoin d'une chance.

Elle rit alors qu'il la faisait rouler et apprécia le baiser. Elle lui rendit. Elle lui sourit, tendrement.

-J'veux rien en échange Heimpher. Ça va simplement me rendre heureuse, de t'aider.

Elle soupira.

-Essaye juste de ne pas m'oublier...

Rien en échange? Je vais te donner quelque chose quand même... je trouverai bien. Là, je te donne mon attention. Je te donne la rare affection que je suis capable de donner... On verra après. On verra quand je vais savoir.

Elle me demande de pas l'oublier... et je me fige. J'ai oublié Léo. une fois. Mais... je fais pas exprès d'oublier. Je ne fais pas exprès!!! Les chocs me font oublier, la drogue aussi... Et j'essaie tellement de me rappeler...

"...quand j'oublis... c'est pas ma faute... c'est la faute de la drogue. De l'électricité... mais moi, j'essaie de me rappeler... j'vais essayer."

Je ne peux rien promettre. Ça ne dépend pas de moi. Ça dépend de... de s'ils me remettent la main dessus ou non...

Elle l'embrasse à nouveau, doucement et sourit, r'ouvrant les yeux

-C'est très suffisant pour moi, mon grand. Je sais que tu ne le ferais pas expres.

Elle reprit un peu de sérieux.

-C'est quoi, cette électricité...? Cette drogue?

Elle comprend... pourquoi je t'ai pas trouvé avant, toi, hein? Hm... je vais devoir te montrer à Léo. Heh. Je me sens comme un petit animal qui demande à son maître s'il peut ramener son ami...

Elle demande c'est quoi, après. Je me raidit un peu. C'est quoi? De la... torture. Une punition? Je... je ne sais plus. Une manière de me... de me programmer. De me formater? de me rappeler que je dois oébir... Je ne sais pas. C'est... tellement imprécis...

"...pour me punir... pour me... rappeler à l'ordre? Pour me... faire oublier. Il... il..."

Exulte tellement en me faisant mal. En me touchant. Je vais totalement profiter de ce qui va suivre. Tu vas m'appartenir. Rappel toi mes paroles. Je m'en rappel... je m'en rappel trop. J'ai l'impression de t'entendre, là, maintenant... Je suis... tellement fatigué.

Elle lui caressa doucement la tête, une boule dans la gorge.

-Je sais pas d'où tu viens, Heimpher... mais... faut vraiment pas que tu y retourne... Tu devrais pas vivre ça. On va trouver qui tu es, on va savoir. Et si tu veux te venger, leur faire payer, qu'ils goûte à ce qu'ils t'on fait. On ira... et je vais les faire souffrir...

Elle trouvait ça abominable. Elle voulait les faire souffrir. Lentement. Avec amour... un amour empoisonné.

Elle se calma.

-As tu un endroit où aller? Un endroit où tu serais en sécurité?

Tellement d'intensité. Elle est autant fâchée... pour quelqu'un qu'elle connaît pas vraiment? Hm... je dois lui être tombé dans l'oeil. Un peu beaucoup. Je vais commencer par me libérer la tête... et je verrai si je peux me venger. Si je suis capable.

"...on verra."

J'ai un petit sourire à la dernière question. Ouais, j'en ai une. Le réservoir. La cachette que Léo m'a trouvé. Je serais trop gros pour y aller maintenant. Je vais devoir attendre d'avoir digéré...

"J'en ai un. Mon alpha m'a trouvé ça... Un ptit coin sous terre, avec d'l'eau pis dse poissons..."

Une tanière à moi. Merci Léo...

Elle sourit, collant sa tête sur son torse.

-C'est bien... Ton Alpha?

Elle était contente, il s'ouvrait un peu. Elle bailla discrètement.