Au détour d'une ruelle (Aïra)

La journée commençait bien. L'air n'était ni trop humide, ni trop chaud. C'était quelque chose de relaxant, avec une légère brise fraîche, mais pas trop. De l'intérieur de la cachette d'Heimpher, la jeune Altérée ne l'avait pas immédiatement sentie. Mais, maintenant dehors, elle pouvait expérimenter cette agréable journée.

Aider Heimpher était une chose, mais Aïra avait de toutes autres responsabilités. Familiales, entre autre, qui demandaient à ce qu'elle sorte du terrier du chasseur. En plus, le Netralite était avec lui, alors elle ne l'abandonnait pas totalement.

Partant du Secteur des Sciences et de l'Industrie, la jeune femme devait passer par le Secteur Central pour aller à celui des Habitations. Il y avait de la circulation, mais pas de foules, fort heureusement. Les rues moins passantes restaient les plus agréables à parcourir: le sol était plus meuble, moins déformé par les passages répétitifs des gens. En plus, c'était plus subtile pour se déplacer. Les Puristes n'étaient-ils pas très actifs, dernièrement?

Aïra avançait donc dans les ruelles, témoins silencieuse de toues les ondes magnétiques qui passaient inlassablement dans l'État. Les ondes devenaient un peu plus électriques près de certains individus, mais ça, elle le savait depuis que son don s'était développer. Dans tous les cas, elle remarqua quelque chose de métallique, qui s'était mis à la suivre. Pas totalement métallique, mais avec quelques parties... un cyborg? C'était la silhouette d'un homme, avec une mâchoire inférieure en métal, entre autre. Il la suivait, habillé d'un genre de manteau long. Sa démarche n'était pas nécessairement agressive, mais restait qu'il en avait une étrange. Comme quelqu'un qui se force à ne pas se voûter tout en avançant.

Elle le sentait derrière elle. Pas totalement collé, amis assez pour savoir que le fait qu'il emprunte le même trajet qu'elle n'était pas anodin. Elle tourna dans une ruelle plus petite, il suivit. Pareil lorsqu'elle déboucha sur une artère plus passante.

L'espace d'un instant, elle regretta que Heimpher ne soit pas sortit avec elle.

Mais il fallait se concentrer, surprendre le pot de colle.

Comme si rien n'était, elle tourna le coin d'une ruelle sombre, rapidement, et se cacha dans l'ombre. en attendant que son ombre ne fasse de même.

Bingo. Il n'y manqua pas.

-J'peux vous aider? Fit-elle sèchement, émergeant de l'ombre.

Pas très agressive, mais assez froide pour faire passer le message. Elle n'aimait pas se faire filer le train.

La personne l'avait suivi, comme la jeune femme l'avait prédit. Ce n'était rien de trop près, de trop collant, mais juste assez pour qu'elle voit, effectivement, qu'on la filait. Et, justement, quand elle s'embusqua et sortit de l'ombre, la personne s'immobilisa.

C'était un homme, grand et longiligne. Pas très large, le teint visiblement pâle, de ce qu'Aïra pouvait voir. Il avait une apparence particulière, mais ne semblait pas hostile. Dans les faits, il observait la jeune femme avec une certaine fascination. Comme quelqu'un qui se retrouve devant une oeuvre artistique remarquable et qui en détail toutes les lignes.

- Oh, pardonnez-moi... Je vous ai remarqué, mais je ne voulais pas vous importuner. Vous êtes altérée, n'est-ce pas?

La voix était criarde, aïgue pour celle d'un homme, désagréable un peu. En même temps, ça lui donnait une sonorité assez comique.

Le gars:

Elle croisa les bras, sur ses gardes mais intriguée.

-Peut-être. Qui demande?

Elle le scruta, tenta de reconnaître sa voix, l'aura magnétique qu'il dégageait. Il ne lui disait rien... Étrange.

-C'est pas poli de suivre les gens comme ça, vous savez?

L'homme se mit bien droit, les mains croisées dans le dos. Celle du côté droite était elle aussi en métal, sembla-t-il à Aïra. À la première remarque de la jeune femme, il eut un rire, à la fois comique et désagréable. D'un petit soupir, il chassa la longue mèche qui lui tombait sur le visage.

- Stelhen. Cyborg. Aucun risque d'être un Puriste.

Il eut un autre risque, puis acquiesça doucement. Ses mouvements avaient quelque chose de brusque, tout le temps, comme s'il était d'un naturel très énergique, nerveux aussi, peut-être.

- Ma curiosité me fait parfois faire des choses impolies... mais... vos Altérations sont magnifiques. Je voulais vous le dire. Avoir le loisir d'observer. Si ça ne vous dérange pas trop, bien sûr. Ah, et je sais bien: on regarde avec les yeux.

un autre petit gloussement lui échappa et il sembla sentir l'air, un peu. Il faisait réellement tache dans le décor, mais beaucoup de gens particuliers se promenaient dans les rues de Sicherheit, non?

Elle hausse un sourcil.

Qu'est ce que c'est qu'ce truc? Se demanda t-elle.

- mouais, ok, en quoi sont elles mieux que les autres?

J'le trouve louche... se dit elle.

Elle observa autour. La rue d'à côté n'était ni loin ni déserte. Une chance. De plus, il était fait de métal. Une échappatoire était plus que probable, au cas où.

Elle le regarda observer.

-Vous êtes un genre de touriste des Altérations?

Elle avait dit ça d'un air désabusé.

Le dénommé Stelhen se redressa un peu, comme sonné par la réponse un peu brusque. Il pencha la tête de côté, doucement, puis croisa les bras, dévoiant finalement ce qui était une main au gantelet métallique griffu.

- D'un point de vue esthétique, elles sont mieux que les autres. Plus jolies. Ça vous donne... un air mystique, noble même.

La voix criarde s'était teintée d'admiration sincère. Pourtant, l'homme devant elle sembla se sentir un peu plus tendu. Sa mâchoire qui se resserrait le démontrait bien.

- Recherchiste. Dans les faits. En interventions médicales et scientifiques. Ce qui me rend plus observateur. Moins... méprisant sur les Altérés en général, aussi.

Il eut un gloussement, puis regarda autour. Il chercha visiblement du regard, comme s'il attendait quelque chose, mais au niveau du sol. C'était... particulier.

Elle l'observa.

-Vous... attendez quelque chose?

Elle sentit les fourmillements apparaitrent dans ses mains et ses pieds. Elle était prêt. Ça sentait le piège à con à plein né.

-Je suis désolé de me montrer brusque mais, par les temps qui courrent, les Altérés comme moi se méfient des gens qui les suivent dans les ruelles. Mais merci du compliment, je le transmettrais à mon médecin.

Stelhen eut un petit rire, encore. Sa voix devint un peu plus sèche et il s'accroupit, doucement.

- Dans les faits; mon chat. Mais le voilà.

Un grand félin, probablement un sphink, accourut d'une rue adgacente, pour venir près du cyborg. Suite à un autre petit rire, il le prit dans ses bras et le garda contre lui, le soutenant d'un bras et le grattant de sa main de libre.

- Pourquoi moi, un cyborg, vous ferais-je du mal? Je travaille avec des Altérés tous les jours. Des très sympathiques, comme des moins... mais je les apprécie tous. Par exemple: nous en avons un qui ressemble un peu à un scorpion. Qui a la nervosité de, également. Il ne faut pas faire de mouvements brusques près de lui!

Il eut un gloussement, puis chassa de nouveau la mèche blanche qui lui tombait sur le visage.

- Allons en un lieu moins isolé, si ça peut vous rassurer. Je n'y verrais pas d'inconvénient.

Le chat resta lové dans les bras de son maître, mais son regard était fixé sur Aïra, qu'il observait tranquillement.

Elle l'observa, hésitante et mal à l'aise.

-Je vous remercie de votre solicitude mais je ne tiens pas particulièrement envie de me faire observer et scrutter... ça arrive suffisement de fois par jour. Merci du compliment, mais je vais devoir y aller.

Mama l'attentait et l'aspect de se faire reluquer par un truc pareil ne la réjouissait pas énormement. Elle avait un plan en tête. Rassurer sa mère, prendre des vêtements de rechange, de la bouffe et retourner assister le Netralite. Pas d'arrêt, pas de personnes à voir.

Simplement cela.

-oh, également, un petit conseil: abordez donc directement les gens plutôt que de les suivres dans les rues. Ça vous fera perdre moins de crédibilité.

Elle lui tourna le dos et partit. Prennant soin, au demeurant, de concentrer son énergie à le clouer au sol. À la tonne de métal qu'il avait sur lui, cela ne devrait pas être un trouble, pensa t-elle.

Stelhen la fixa, sans rien dire. Quelque chose de froid se glissait dans son regard, mais le reste de son corps restait détendu.

- ...je m'en rappellerai. J'espère avoir la chance de vous recroiser. Je me ferai pardonner mon comportement.

Un grognement naquit dans sa gorge alors que l'étrange pression se faisait sentir sur son corps. Elle put l'entendre, tout comme le:

- Vient, mon beau Diamant... nous allons retrouver notre chasseur...

Un frisson, long, pointut, aigüe lui parcourut la colonne. Elle garda son calme et s'éloigna, sans se retourner.

Des chasseurs... Elle avait un mauvais présentiments.

Elle ne se mis pas en route de la cachette, au cas. Elle arriva chez elle, Mama était là.

-Salut. Fit la jeune femme, cachant son trouble.

Elle vint l'embrasser, prendre de ses nouvelles. Elle écoutait à moitié, pensant à la scène, en boucle.

-Je ne serais pas souvent là, pour les prochains jours. Fit elle, un instant plus tard. Le Netralite et moi venons en aide à une âme démunie. Tu vas t'en sortir?

-Tu sais bien que oui, Aïri. Fit elle avec un clin d'oeil. Tu les saluera pour moi.

Aïra ricanna. Elle repartit en vitesse, un gros sac sur l'épaule.

Alors qu'elle se dirigeait vers l'abris, elle surveillait, scannait les allentours.

Sur le chemin de la maison, la jeune femme ne fut pas suivie. Elle était en paix, sans dérangements, du moins, extérieur. Ses pensées troubles étaient la seule chose qui l'embêtait.

Aïra retourna vers l'abris. Ses pas la menaient à travers les Secteurs, aussi vite qu'elle les faisait aller. Des regards se posaient sur elle, encore et toujours. Sur le bord de quitter le secteur central, par contre, tout fut troublé. Par un miaulement de chat. Le sphynx était là et la regardait. Au coin d'une rue, il était simplement là. Seul, à première vue...

Émergea alors, devant elle, une femme. une humaine, plus petite qu'elle, mais plus large. Sa posture montrait sa haine, et son regard était mauvais.

- ...vous... maudites abherrations...!!!

Instinctivement, elle ignora la femme, sentant les crépitement sur ses bras devenir plus que métaphysique. Elle tenta de passer sur sa droite, rapide, regardant par terre, scannant pour tout objet de métal pouvant servir de potentielle arme de défence.

Elle accellera le pas.

Elle n'avait clairement pas envie de gérer ce genre de situation.
Et si seulement elle pouvait semer ce crétin de chat...

La femme lui barra la route. Férocement. Même, elle saisit Aïra par les épaules, violemment. Autour, quelques petits objets métalliques traînaient. Un briquet vide, abandonné. Un renforcement de fenêtre, formant un genre de morceau de métal de la longueur et de l'épaisseur d'une règle, le long d'un mur. Le couvercle d'une poubelle, non loin, sans ladite poubelle.

- Ce sont des monstres comme vous qui ont enlevé mon fils!!! Des monstres!!! VOUS ÊTES TOUS DES MONSTRES!

La femme la secoua, avec une certaine hystérie. C'était le regard d'une mère qui n'a plus son enfant, entre folie et haine profonde.

Instinctivement encore, Aïra se servit de son centre de gravité pour faire basculler la dame et celle-ci se retrouva par terre. La jeune femme profita du moment de choc pour s'éloigner, marmonnant un "désolé pour votre fils, je ne sais pas de quoi vous parlez" et en tendant le bras vers le couvercle de poubelle et le fit revoller de toutes ses forces sur le félin.

Elle reculla et reprit son trajet, au pas de course, désormais.

Sans aucune connaissance en combat quelconque, la pauvre femme se retrouva rapidement au sol. Elle se mit à hurler de rage, proférent maintes insultes peu élogieuses. Se remettre debout fut long, assez pour qu'Aïra s'éloigne. Le chat, lui, feula sous l'attaque et déguerpit.

Alors que la jeune Altérée fuyait, elle pouvait encore entendre les cris de la femme. Cris qui se changèrent, peu de temps après, en un hurlement perçant de terreur. Puis, le silence. Aucune trace du chat, simplement Aïra qui courait entre les rues, les bâtiment et qui se dirigeait vers la cachette.

Elle ne se retourna pas, courut jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus.

Elle décida d'éviter les artères passantes et se retrouva rapidement dans une ruelle. Elle fit une pause, respira.

Une goute lui perla sur la joue. Elle se l'essuya rageusement. Non. Elle ne devait pas se mettre à pleurer comme une gamine pour ça.

Elle continua sa route, tentant de faire le vide dans sa tête.

Le chemin pour la jeune femme fut éprouvant, émotionnellement parlant. Pour le reste, il n'y eut pas d'autres dérangements. Pas de chat, pas de gens, juste elle.

À la cachette, l'écoutille était fermée. C'était normal. Heimpher avait parlé d'odeurs à l'Altérée, comme quoi elles ne sortaient pas quand l'entrée était fermée. Ce qui était logique.

En bas, les deux hommes étaient en face à face. Visiblement en méditation. Le Netralite avait pris les poignets d'Heimpher dans ses mains et les massaient, doucement, tout en le surveillant. Il le faisait souvent, et c'était étrangement calmant comme effet.

Elle ne dit rien, déranger la méditation ne se faisait pas. Elle s'avança en silence et posa son sac sur le sol.

Elle alla s'asseoir sur le bord du point d'eau, remonta ses pentalons et mis ses pieds à tremper.

Elle se perdit dans ses pensées, les yeux fous de la femme se mélangeant à la dernière phrase de l'étrange inconnu.

Son mentor lui jeta un coup d'oeil, mais ne dit rien. La brume bleue du Netralite faisait de douces vagues dans la pièce, entourait Heimpher comme un nuage d'encen. L'impression dégagée était relaxante, appaisante.

La méditation dura une petite demi-heure, encore, puis le Netralite tapota les avant-bras d'Heimpher, doucement.

- Revenez à moi, Heimpher. Lentement. Suivez ma voix. Ouvrez les yeux.

Dès que ce fut fait, le Netralite sembla satisfait.

- Bien. Vous avez une prédisposition pour la méditation. Prenons une pause. Nous ne devons pas épuiser nos esprits. Et puis, Aïra est revenue.

Sa tête se tourna vers la jeune femme, qui put voir ses yeux, brillants toujours d'un bleu surnaturel, se fixer sur elle.

Loin... tellement loin... Des ombres, des murmures, des sons flous... Des odeurs, aussi, qui me frôlent. Je sais pas d'où, je sais pas de quand... mais je suis perdu dans tout ça, à essayer de voir, de comprendre. PAs tellemetn facile... mais la présence du cyborg me calme. Bordel, il a le tour. Il a un petit quelque chose... qui me calme, me concentre... et il masse bien.

J'entends sa voix, loin. Je la suis. Reviens à moi. Et j'ouvre les yeux. Il tapote mes avants-bras. L'odeur d'Aïra envahit mes naseaux. Je souris.

"Merci. On va faire ça."

Je me lève et je vais la rejoindre. Mes apttes vont dans l'eau aussi et je colle ma grosse tête sur son épaule. Elle a l'air... bizarre. Non. Quelque chose va pas. Je le sens. Je le vois.

"...t'fais une drôle de tête. Pis ce sont pas les altérations. Qu'est-c'qui s'passe?"

J'ai rien fait... J'ai pas choisis d'être ainsi... merde... merde c'était qui? Ses pensées s'entrechoquaient.

Une larme coulla sur sa joue et elle sursauta.

Elle s'essuya la joue rapidement et vit Heimpher à ses côtés.

-Hey... J'ai... le trajet fut compliqué. Une puriste... et... un mec bisare... avec un chat, une voix stridente et étrange... il reluquait mes marques... et disait... chercher un chasseur...

Elle se tendit, des frissons dans son dos en repensant au chat.

Le Netralite approcha lui-aussi de la jeune femme, mais ne vint pas se coller autant qu'Heimpher. Dans les faits, il posa une main sur son épaule, du côté inverse à Heimpher, et écouta tranquillement sa protégée.

- Peu importe ce qui s'est produit, tu n'es pas responsable des émotions négatives des gens, Aïra. Tu n'es pas responsable de leur trouble, et c'est par détresse qu'ils le projettent sur toi.

La main métallique la massa un peu, doucement. La brume bleutée vint envahir l'air autour d'elle. Ça donnait une impression... tamisée, à ses sens.