Confronter ses démons (Pv Léo)

Leo avait simplement hoché la tête, le sommeil ayant déjà pris possession de son corps il lui était difficile de formuler une quelconque approbation. Le petit ronronnement de la belette la chaleur des couvertures l’aida à trouver le sommeil très rapidement.

Il eut un sommeil agité mais ne s’en rendit pas compte. Des cauchemars où Pipes lui courait après avec une seringue géante, des scorpions l’attaquant alors qu’il pataugeait dans la neige, Lionel plié de douleurs alors que Sokolov se tenait derrière lui, le Bracchium à la main.

C’est dans cette tempête d’idées incomplètes que son subconscient le berça vers un sommeil profond.

Léo put dormir un bon moment avant de finalement se faire réveiller. Ce ne fut pas la belette, sagement couchée avec lui qui le réveilla, ou alors Gabrielle qui revenait du travail. Vers la fin de l'après-midi, ce fut simplement un hurlement de terreur qui retentit dans la maison, brusquement et sans avertissement. Suivirent ensuite quelques chants doux, le langage des Nomades. La chose éveilla Racaille, qui tomba carrément en bas du fauteuil.

Leo se réveilla d’un coup, projetant Racaille en bas du fauteuil. Quelqu’un avait mal ? Qu’est-ce qui se passait ? Encore transit de fatigue, en mode panique, le jeune homme quitta le fauteuil pour tituber jusqu’à la chambre qu’occupaient les deux Nomades. Il s’apprêtait à rentrer quand il entendit l’un d’eux parler, doucement… Se calmant un peu il décida de cogner a la porte avant toute chose.

"Ce… C’est Leo… je… est-ce que tout va bien ?"

On ne pousse pas un tel cris si rien ne cloche… mais avec la fatigue peut-être que l’un d’eux avait simplement fait un cauchemar ?

À terre, Racaille partit à la course, quelque part dans la maison, et on la perdit de vue.

Dans la chambre d'amis, le chant continuait toujours, à trois voix et très doux. Quand on cogna, par contre, il se tut, puis Léo put plutôt entendre Saarth'alis, qui semblait avoir autant sursauté que Léo.

- ...oui, pardonnez-le. Il a fait un mauvais rêve. Je le rassure. Ça va aller. Je suis infiniment désolé. Je... croyez-vous qu'il pourrait avoir de l'eau, s'il-vous-plaît?

Il n'y avait maintenant plus un son dans la maison. Simplement Léo et les deux Inconnus.

L’ingénieur hocha vigoureusement la tête, puis grogna devant sa stupidité quand il réalisa qu’ils ne pouvaient pas le voir.

"Je… oui, oui, donnez-moi un instant je reviens. "

Leo s’en fut donc en direction de la cuisine, se cognant au passage le petit orteil sur le coin du fauteuil. Il serra les dents et continua vaillamment, non sans ravaler au passage une bonne partie de son orgueil. Le tout avait un goût très amer, mais au moins il était maintenant totalement réveillé.

Il ne fallut pas trop longtemps au jeune homme pour revenir vers la chambre avec un verre d’eau fraiche. Il cogna encore une fois à la porte avant d’entrer, désireux de laisser un semblant d’intimité à ses… enfin… aux invités de Gabrielle et Lionel.

Léo put se promener sans avoir une Racaille dans les pattes. Personne ne fut témoin de son accrochage avec le sofa, donc son orgueil fut au moins sauvegardé aux yeux des autres.

Une fois dans la chambre, Léo assista à un spectacle des plus étranges. Saarth'alis s'était installé dans le lit lui-aussi, mais assis, le dos contre le mur. Thyrînn s'était blotti contre son corps et avait appuyé sa tête contre son torse. Le futur papa tremblotait, probablement de peur. Tous deux n'avaient plus le heur de leur combinaison, ni leur masque. L'ingénieur pouvait donc voir la peau bleue, plus pâle par endroit pour Thyrînn, et plus foncée pour Saarth'alis. Leurs yeux, en cibles, étaient de la même couleur que leurs lignes. Ceux de Saarth'alis étaient donc mauves, et ceux du futur papa, dorés. Lesdites lignes ne brillaient pas dans le moment, mais formaient de vrais dessins complexes sur la peau des deux Nomades. Les voies respiratoires, elles, rappelaient un peu des branchies, mais qui couvraient du nez jusqu'à la base du cou. Deux ouvertures se trouvaient sur le dessus de leur tête.

Le géant avait beaucoup de cicatrices de plus que son compère, dont quelques-uns qui étaient assez récentes. Dans tous les cas, il tendit gentiment sa large main vers Léo, voulant prendre le verre.

- Merci beaucoup... c'est apprécié.

L’ingénieur lui tendit le verre d’eau, essayant autant que possible de ne pas fixer les nomades à outrance. C’était là une nouvelle opportunité de voir la physionomie de cette nouvelle race, mais la dernière chose qu’il voulait était bien de faire sentir Thyrînn et Saarth’alis comme dans un laboratoire. Il se contenta de faire fonctionner son esprit pour garder le plus de détails possible en mémoire.

"Voilà… et… ce n’est rien voyons. "

L’ingénieur s’apprêtait à simplement tourner les talons et retourner essayer de dormir quand un détail lui revint en tête. Il se tourna vers Saarth’alis, soudain un peu plus réveillé.

"Dites-moi… je… si vous n’êtes pas trop endormis, j’ai une question à vous… enfin, Plutôt quelque chose à vous montrer. Vous allez sois pouvoir m’aider, sois trouver quelque chose d’intéressant."

La carte qu’il avait trouvée chez Hexus… c’était un peuple évolué et il parlait en plus à une équipe d’explorateur. Dans le pire des cas il apprendrait quelque chose de nouveau sur la carte, dans le meilleur des cas peut-être qu’elle pourrait leur être utile, à eux.

Le futur papa resta blottit contre son protecteur, encore tremblant. Son cauchemar avait vraisemblablement été horrible, vu à quel point il semblait affecté, le pauvre. Une fois le verre pris, Saarth'alis le proposa gentiment à son compagnon, qui le prit en tremblant. L'une des deux fentes sur le sommet de sa tête s'ouvrir, et un genre de longue langue, ressemblant à celle d'un papillon, en sortir. Elle alla se plonger dans le verre d'eau, dont le niveau baissa assez rapidement.

L'ingénieur s'arrêtant, Saarth'alis l'observa, puis haussa un sourcil à la mention de Léo. Son attention se dirigea vers la carte, et il attendit que Léo l'approche, ne voulant pas bouger.

- Je veux bien faire mon possible. En contre partie... j'aurais une question, moi aussi. Par contre, je vous la poserai après que vous m'ayez montré ce qui vous intéresse.

Il l'avait dit doucement. Visiblement, la panique de Thyrînn l'avait assez réveillé pour qu'il aide l'ingénieur.

Léo hocha la tête et sortis son carnet de sa poche.

"Bien sûr. Tout ce que vous voulez. "

L’esprit du jeune ingénieur était encore dans les vapes, mais il reprenait lentement prise sur la réalité. Il ouvrit rapidement son carnet à la page sur laquelle il avait recopié la carte et le tendit à Saarth’alis.

"Je… je suis tombé sur cette carte dans une boutique de curiosité. Elle me semblait étrange alors j’ai crût bon de noter le tout. Mais le territoire décrit ne figure sur aucune carte officielle de l’état… enfin… je veux dire, cette zône est répertoriée mais personne ne s’y est encore aventuré. Officiellement du moins. "

Leo bailla un bon coup, mais reprit son souffle aussi rapidement qu’il le put.

"Je… si vous savez quelque chose j’aimerais bien apprendre de quoi il s’agit. Sinon je… enfin. Vous êtes des explorateurs! Peut-être que c’est une piste qui vous intéresserait ?"

L’ingénieur n’avait littéralement aucune arrière-pensée en lui montrant la carte. Pour lui une connaissance qui restait bien enfouie perdait de son utilité, de sa valeur… il voulait simplement que cette carte trouve une utilité.

Le Nomade acquiesça doucement quand Léo accepta son marché, puis prit délicatement le callepin. Il fronça visiblement les sourcils, qui n'étaient pas fait de pilosité dans son cas, tout en ayant l'air d'avoir une certaine difficulté à la lire. Il prit tout de mème son temps, tout en écoutant Léo parler. Thyrînn regarda lui-aussi, toujours blotti contre l'autre Nomade, mais avec un air plus examinateur de son côté. D'ailleurs, entre les quelques paroles qu'il prononça dans sa langue, Léo put reconnaître le "Zold'mahr" dans ses dires.

-Premièrement... la zone que Zold'mahr a marqué, avec une forme animale, est une zone dangereuse où de grands prédateurs chassent. N'y allez pas, c'est dangereux. Celle dans votre ville est un endroit où nous nous réunissons suite à nos... incursions dans vos murs. Les quelques autres à l'extérieur sont des campements que nous avons utilisés et qui sont toujours fonctionnels. Pour ce qui est de cette grande marque... c'est une communauté de gens comme vous qui vit là-bas. Leur ville a une odeur de sang et de mort... Des choses horribles s'y passent, nous en sommes certains. Je vous recommanderais de l'éviter également. La trave qui ressemble à des lignes est un sillon que nous trouvons suspect. Pour ce qui est du reste de la zone...

Saarth'alis eut un soupir, se frotta les deux du revers de la main, puis ramena son attention sur la carte.

- Nous avons remarqué que cette zone était relativement vide. Le sol a été... retourné? Nous ne savons pas pourquoi. La terre est chaude, là-bas, et quelques prédateurs vivent exclusivement en ces lieux. Il n'y a aucun signe d'habitation, sinon celle d'une petite communauté de... comment dites vous... de ces gens qui sont aussi des plantes. C'est ce que nous en avons vu.

Il tendit de nouveau son calepin à Léo, regarda le verre vide que tenait son protégé et le prit, pour le déposer sur la table de chevet.

- Dites-moi... pour ce qui est de ma question... Savez-vous ce qu'il y avait, avant votre ville? Avez-vous des écrits qui parlent d'avant votre État?

La question semblait importante pour le Nomade, qui montrait des signes de nervosité.

L’ingénieur avait bu les paroles de Saarth’alis et aussitôt l’examen de la carte terminée, il la reprit afin d’annoter ce qu’il pouvait. Il n’était pas explorateur, ce n’était aucunement dans ses ambitions de voyager à l’extérieur de Sicherheit… mais… peut-être à cause d’une certaine curiosité qui était propre à tous les gens de science il ne ratait jamais l’occasion d’apprendre quelque chose de nouveau. Et puis… peut-être étaient-ce là des informations qui seraient utiles à Artémis, ou à Zolvar, qui sait…

Le jeune homme écouta attentivement la requête du Nomade et fronça les sourcils à son tour. Non pas qu’il soit hésitant à répondre… mais… par où commencer ?

"Je… euhm… Nous avons beaucoup de, de mythes, d’hypothèses… mais au final très peu de documents datant d’avant Sicherheit existent encore. Je vais faire de mon mieux pour vous dire ce que nous savons."

Il se racla la gorge. Il n’avait rien d’un historien… mais il avait travaillé sur certains projets visant à restaurer de vielles technologies, il avait donc certaines connaissances sur le passé.

"Nous savons que de grandes cités existaient autrefois… Sicherheit a été bâtie sur les ruines d’une ville relativement petite c’est pourquoi très peu de ruines de cette époque subsistent encore. Ils disposaient de moyens… prodigieux. Par exemple ils étaient capables de récolter l’énergie provoquée par une explosion, et de la rediriger comme ils le souhaitaient. Vous imaginez ? Créer de l’électricité à partir d’une flamme ? Faire avancer un carosse ou un traineau sans devoir le faire tirer ? "

L’ingénieur repris sa respiration, et continua son récit.

"Les… ceux qui habitaient ici avant nous ont failli être éradiqué par une catastrophe il y a maintenant presque mille ans. On ne sait pas encore précisément ce qui s’est passé, mais par tradition orale les humains survivant ont toujours raconté que c’était à cause d’une avancée trop rapide de la science. Trop d’invention auraient étés perverties, ou encore ils auraient commencé à expérimenter avec des technologies qu’ils ne comprenaient pas encore tout a fait. Nous avons découvert d’immenses cratères autours de la ville… Sont-ce d’anciennes infrastructures qui ont explosés en emportant tout avec elles ? Des cratère d’obus d’une puissance inimaginable ? des météorites ? Personne ne le sait précisément."

Leo rit légèrement. L’ignorance était une source intarissable pour l’imagination.

"Peu importe ce qui s’est passé à cette époque a failli annihiler toute forme de vie. L’état a été fondé par un groupe de survivant. Probablement des agriculteurs ou des travailleurs puisqu’ils ont réussi à recréer un semblant de village autonome malgré la destruction. Ce petit avant-poste a lentement grossis, devenant une terre d’accueil pour tous les survivants des alentours. Le reste est connu. Sicherheit a plus de 800 ans maintenant. Mais à part quelques murs de pierre et une vieille fontaine rien ne subsiste de « Avant ». "

Il se gratta l’arrière de la tête.

"C’est… c’est malheureusement la réponse la plus complète que je peux vous donner. "

Ce fut le tour du Nomade de boire ses paroles, qui semblèrent le troubler à chacune dite. Il observait l'ingénieur avec une totale hésitation, un peu plus nerveux qu'avant, même. À la fin de l'exposé de Léo, il soupira longuement, parla quelques secondes dans son dialecte chantant, puis se massa les yeux, lentement.

- Je vois... c'est... dommage. J'aurais aimé en savoir plus. Je suppose que si vous l'ignorez... ce n'est pas grave. Merci d'avoir fait de votre mieux, dans tous les cas. Huit cent ans...

Il eut un autre soupir, puis bougea un peu. Thyrînn s'éloigna de ce fait, et Saarth'alis se mit debout, tranquillement. Il s'étira, d'ailleurs, exposant toujours toutes ses cicatrices. Certaines avaient une allure étrange, faite par quelque chose que Léo ne connaissait pas. D'autre étaient tellement vieilles qu'elles avaient pâlie avec le temps.

- ...je vais devoir retourner à ceux des miens qui sont toujours dehors, une fois la nuit tombée. Vous parliez d'un... éventuel entretient avec un membre important de votre société, est-ce exacte? Je vais en parler avec les miens... et dépendamment leur réponse, je vous dirai si nous souhaitons, ou non, avoir ce genre d'entretient. Merci beaucoup, monsieur Léo.

Le Nomade s'inclina bien bas... puis un gargouillement sonore se fit entendre. Les deux Nomades s'observèrent, puis Saarth'alis soupira en se massant légèrement la poitrine.

Leo hocha la tête aux propos de Saarth’alis.

"Oui, c’est exact. Si vous le souhaiter je peux parler de vous au chef du secteur scientifique. Ulrich Stein. C’est un homme droit et honorable mais surtout, un peu comme Gabrielle et moi, il dispose d’un esprit ouvert. Et il est l’un des représentants du peuple a la tour des élus… si votre peuple désire établir contact avec Sicherheit il s’agit donc d’une excellente personne pour ce faire. Du moins je crois. Si à l’inverse vous désirez rester anonymes il en sera fait selon vos désirs."

Au son du gargouillis, Leo pouffa un peu avant de placer une main sur l’épaule de son invité.

"Avant de partir vous prendrez bien un déjeuner, quelque chose à manger ? Si vous voulez rester discret je crois que ce serait une bonne idée. Venez, je crois que j’ai vu quelques fruits dans la cuisine. "

Il se dirigea vers la cuisine, invitant Saarth'alis à le suivre.

Ce fut au tour de Saarth'alis d'acquiescer d'un mouvement de tête aux paroles de Léo, l'écoutant tout de même attentivement.

- ...comme je disais, je vais consulter les autres membres de mon groupe en premier lieu. De toute manière... avec Thyrînn ici, je sais que je pourrai trouver quelqu'un à qui passer le mot. Bref...

Vint ensuite le gargouillement, et le Nomade eut un soupir gêné. Il regarda la main de Léo, de ses yeux en cibles, puis acquiesça de nouveau. Sortant de la chambre avec l'ingénieur, il se mit lentement à marcher. Se retrouver dans la maison, comme ça, sans les propriétaires, semblait le mettre mal à l'aise.

- ...merci beaucoup.

Effectivement, dans la cuisine déserte, Léo put trouver un panier de fruit. Il y avait surtout des pommes et des poires, mais aussi quelques petits fruits que les Néorithes cultivaient.

Leo secoua la tête.

"Nous ne vivons pas dans une abondance décadente mais nous ne manquons de rien. Quelques fruits ne sont vraiment pas grand-chose. J’en rapporterais quelques-uns si vous voulez être sûr que Thyrîn ne mette pas en danger les réserves de Gabrielle et de son frère. "

Il rigola un peu, prit le panier de fruit et le tendit doucement à Saarth’alis.

"Je ne sais pas si vous les connaissez, mais celui-là a une chair croquante et un peu acide. Celui-là est plus tendre et plus sucré, et ceux-là sont juteux et très doux."

Il attendit qu’il fasse son choix avant de reposer le panier, à sa portée. Quelque chose le tracassait visiblement tout d’un coup.

"Je… je me suis engagé à vous aider. Et quand je l’ai fait je m’attendais à devoir aider une quarantaine de personnes, cinquante peut-être. Mais… Si vous êtes seulement sept il me serait facile de vous procurer des vivres en quantités suffisante pour vous durer plusieurs semaines, de ce que vous me dites. Ça me laisse donc plus de marge de manœuvre pour d’autres besoins que vous auriez. "

Il soupira.

"Ce que je veux dire c’est qu’on parle ici de votre survie. Je ne veux pas que vous vous gêniez pour faire appel à moi. Je vous offre mon aide sans restriction. Voilà. "


Pourquoi ça avait été si dur à dire? Parce qu'il n'était pas habitué à ce que ce soit quelqu'un d'autre qui ait besoins de son aide... tout simplement.

Le Nomade le suivit, puis eut un petit gloussement. Il observa les fruits que Léo lui présentait, écoutant également la description de chaque fruit, puis en prit deux petits, du bout des doigts.

- Oh, ne vous en faites pas pour leurs vivres... nous avons besoin de nous nourrir une fois par semaine... Ça peut être fait avec des jus en plus de fruits... ou de quelques sortes d'insectes également. Il n'y a rien à craindre pour eux concernant la quantité qu'il ingère.

Justement, une langue, comme celle d'un papillon, sortit de sur le dessus de sa tête, puis vint aspirer, lentement mais sûrement, le fruit à l'intérieur d'elle. On pouvait bien voir la progression du fruit dans la langue/paille, qui le faisait monter vers le sommet de la tête, contraction par contraction. L'ingénieur vida ensuite son sac... et Saarth'alis sembla légèrement troublé. Il avait les yeux grands ouverts, le fixant de ses cibles mauves, sans trop savoir quoi dire.

- ...je vais me rappeler vos paroles, ne vous en faites pas. Par contre, rappelez-vous également que nous sommes un peuple fonctionnant sur les échanges. Nous aimons rendre ce que nous nous faisons donner. Alors... s'il y a quoique ce soit, faites-moi en part également. D'accord? Que vous ne le faisiez pas... serait un peu comme un affront pour moi. Vous comprenez?

Une autre langue vont aspirer le deuxième fruit, et tous deux disparurent dans la tête du Nomade.

Leo avait observé les mécanismes biologiques du Nomade avec intérêt, essayant quand même de ne pas fixer trop intensément son interlocuteur. Beaucoup de choses chez eux étaient fascinantes, mais c’était grâce à ce genre d’activité toute simple que l’ingénieur prenait conscience de l’étendue des différences qui existaient entre leurs deux races.

Aux propos de Saarth’alis il hocha gravement la tête. Bizarrement il savait immédiatement comment gérer cette situation.

"Je comprends parfaitement… Si vous voulez payer votre dette vous pouvez le faire en information, en connaissances. Je suis scientifique et je dois avouer que je suis resté très perplexe devant plusieurs choses que j’ai eu l’occasion de voir : vos armures, votre langue... "

Il tentait de formuler le tout avec respect et contenait sa soif de connaissance.

"En échange de mon aide je prendrais certaines choses que vous êtes en prêt à m’enseigner, technologies que vous êtes prêts à partager… Ce genre de choses peuvent vraiment être utile à tout l’état. Je n’exige rien que vous ne soyez pas disposé à enseigner, ceci dit."

Il attendit de voir ce que son interlocuteur avait à répondre. Il savait ce qu’il demandait allait peut-être l’inquiéter aussi s’empressa-t-il d’ajouter :

"Je ne veux rien de militaire… les… vos armes ne m’intéressent pas. "

Les fruits avaient finalement terminés leur progression dans les langues du Nomade, qui croisa les bras en écoutant Léo. Malgré sa grande stature, il n'était plus intimidant, maintenant. Il observait l'ingénieur comme une personne sage et posée. Un soupçon d'inquiétude se fit voir dans ses yeux, par contre, en entendant ce que l'ingénieur voulait en échange, inquiétude qui le quitta bien assez vite quand Léo précisa qu'il ne voulait rien de militaire.

- ...je suppose que ce pourrait être chose faisable. Je veux bien vous donner certaines connaissances en échange de votre aide. Posez-moi vos questions et je verrai si je peux vous fournir une réponse.

Le Nomade eut alors un petit sursaut et baissa la tête, pour regarder la petite Racaille qui venait de déclarer un assaut à son pied. La belette se roulait sur le sol tout en gratifiant l'extrémité du Nomade de coups de pattes et de mordillements. Elle faisait quelques petits bruits mignons, ce qui sembla amuser leur invité.

L’ingénieur alla mettre un peu d’eau à chauffer et revint s’appuyer sur le comptoir par après. Tant de questions tournaient dans sa tête… mais il tenta de faire le tri afin de se concentrer sur ce qui serait utile à l’état et surtout sur ce qu’il serait en mesure de développer.

"Très bien… commençons par une question toute simple : disposez-vous de… de véhicules autonomes ? Nous avons tenté de recréer depuis longtemps un moteur capable de transporter passagers et marchandise sans grand succès : notre système électrique n’est pas assez fiable et nous n’avons pas encore trouvé de carburant assez énergétique. Si vous me dites que vous êtes voyageurs comment vous déplacez-vous ? "

Il hésita un peu, mais enchaîna tout de suite sur une autre question.

"Et… vous pourriez me parler un peu de votre armure ? Je n’ai jamais rien vu de tel. "

De son côté, Saarth'alis se pencha et prit la petite Racaille dans ses bras, pour l'observer puis la flatter lentement. La belette écaillée semblait, tout d'un coup, assez troublée d'être dans les bras de cette chose inconnue, assez qu'elle resta sur le dos dans les bras du Nomade, totalement immobile.

La première question se faisant entendre, le géant secoua négativement la tête, lentement. Ils n'avaient pas de véhicules autonomes, donc, d'où il venait.

- D'autres peuples que nous connaissons en ont, oui, mais nous n'utilisons pas ce genre de chose. Nous avons des montures, en temps général. Maintenant... malheureusement, elles n'ont pas survécu.

La question qui suivit sembla le rendre un peu confus, mais il accepta tout de même de répondre, hochant la tête lentement. Une longue expiration s'échappa de lui, faisant sentir la chaleur de son souffle à l'ingénieur, malgré la distance. Racaille, dans les bras de Saarth'alis, se raidit un peu.

- C'est une armure d'un type standard, adapté pour le combat et les longs voyages. C'est l'alliage qui en fait qu'elle est spéciale... Un alliage que notre peuple seul peut forger. Il est réceptif à nos lignes et aux phéromones que nous pouvons émettre, entre autre. C'est un peu une sorte de métal... organique, dira-t-on. Il a la capacité de se régénérer, selon les instructions que nous lui donnons. C'est... le plus que je peux vous dire, je pense bien. Le reste est difficile à expliquer.

L'eau se mit à produire un sifflement dans la bouilloire, sur le feu, signe qu'elle était prête.

Le jeune homme écouta attentivement le Nomade et se prit une pomme en attendant que l’eau soit prête. Son dernier repas remontait à longtemps aussi savourât-il le fruit. Il hocha légèrement la tête quand il eut la réponse à sa première question. On peut toujours rêver. Quand il eut la réponse à sa deuxième question par contre il eut un petit sourire.

"Je suis spécialisé dans les métaux et les alliages… Si vous êtes en mesure de me l’expliquer ou si l’un des membres de votre groupe l’est c’est une information qui pourrait être très utile. J’ai déjà vu des collègues travailler sur des matériaux de la sorte, mais ils n’ont jamais été capables de produire ce genre de résultat avec quelque chose de rigide. "

Leo alla ensuite se faire une tasse de tisane et en offrit une à Saarth’alis. Décidément cette armure piquait sa curiosité. Avec les armes que l’état utilisait cette technologie avait très peu d’utilisation militaire, mais en situation de survie un matériel auto-réparateur pouvait faire toute la différence. Un autre détail lui vint en tête.

"Ce… ce que vous êtes en mesure de faire. Les bonds prodigieux, votre vitesse… cela est-il en partie reliée à l’armure ou s’agit-il de capacités naturelles ?"

Il prit une gorgée de son infusion et ferma les yeux de bonheur. Il commençait à retrouver pied, les évènements de la journée précédentes devenant lentement plus faciles à digérer.

"Sinon vous avez… j’imagine une certaine forme d’électricité ? Notre système ici est relativement efficace mais définitivement pas assez pour garantir son utilisation stable ou à grande échelle… ce genre de chose est possible dans votre foyer?"

La spécialisation de Léo sembla franchement surprendre son invité, qui haussa un sourcil tout en penchant la tête de côté. Encore une fois, ça n'avait rien de méprisant. C'était simplement... surprenant? Dans tous les cas, il acquiesça lentement, sembla remettre ses idées en place, puis se mit à parler.

- C'est un métal organique, qui va répondre aux stimulus, comme nos phéromones, la chaleur, le coupant, perforant... entre autre. Il est surtout très réactif à nos lignes ou nos chants. Notre peuple a ce genre de métal depuis des lustres... et nous avons appris à bien "communiquer" avec lui. Je ne connais pas de métal humain qui s'y apparente en composition... Dans tous les cas, il nous réponds. Assez que si je veux qu'un couteau dans cette matière ne me coupe pas, il va le faire. Dans le même principe, si quelqu'un d'autre venait qu'à mettre mon armure, elle ne bougerait pas aussi bien, par résistance...

Un petit rire lui échappa ensuite à la question, et il secoua doucement la tête. Non, ce n'était apparemment pas l'armure qui leur permettait de tels exploits.

- L'armure n'y est pour rien. Elle sert à bloquer les attaques... mais pour ce qui est des bonds, de la vitesse... c'est nous. Nous suivons un entraînement depuis notre plus jeune âge. Un peuple de combattants honorables, où tous sont aptes à se défendre... Il y aussi nos lignes qui nous aident, mais c'est un concept assez... impossible, je dirais.

Le Nomade accepta finalement la tisane, sur laquelle il souffla longuement. Il déposa d'ailleurs Racaille, qui resta comme figée à ses pieds, puis plongea une langue dans le liquide. L'infusion descendit dans la tasse, sans un bruit, alors que le mastodonte observait Léo.

- Nous avons une forme d'électricité, oui. Nous utilisons beaucoup d'éoliennes ou de barrages hydro-électriques. Ici... nous avons l'impression que c'est une question de magnétisme qui rend les choses si instables. Nos systèmes de communication de fonctionnent pas à cause des interférences... C'Est étrange. Mais oui, chez nous, l'utilisation d'un réseau électrique est possible. De manière efficace, même...

En moins de deux, la tisane disparut, et Saarth'alis déposa lentement la tasse sur un comptoir. Son regard avait retrouvé quelque chose d'alerte et brillait même un peu, maintenant, d'une légère lueur mauve. Ça donnait un air intimidant à ses yeux en cibles.

Leo enregistra soigneusement ces informations, incapable de dire précisément lesquelles lui serviraient mais trouvant le tout fascinant tout de même. Un minéral organique ? Un organisme malléable ? Beaucoup de questions subsistaient quant à l’armure mais il était maintenant évident que les scientifiques de Sicherheit ne parviendraient jamais à recréer ce métal sans la sensibilité hormonale des nomades. La remarque de son hôte sur leur système électrique lui fit hausser un sourcil par contre.

"Des instabilités magnétiques ? Comment… comment les percevez-vous ?"

Ils avaient cherché durant des années la cause de ces soudaines chutes du système électrique… peut-être qu’en isolant simplement les câbles électriques avec un manchon en ferrite les responsables pourraient grandement améliorer l’efficacité du système de tout Sicherheit. Mais il fallait pour ça être capable d’isoler et surtout de capter les perturbations donc parlait Saarth’alis.

L'haussement de sourcil de Léo ne sembla pas mettre le Nomade en état de doute sur ses affirmations, au contraire. Il acquiesça donc, tout en croisant les bras, l'air très sérieux.

- Pas simplement des instabilités. L'Atmosphère est saturé d'ondes magnétiques. Les boussoles, les communications par signaux, l'électricité... ça rend tout inutilisable ou instable. Nos instruments ont été capables de quantifier les ondes... et elles sont excessivement élevées. Soit c'est quelque chose dans la composition du... sol qui cause ce magnétisme, soit c'est autre chose...

Il eut un soupir et baissa la tête, tout en jouant un peu des doigts sur son bras. Ses lignes se remirent à briller, dans une vague lente et progressive, pour toutes s'éteindre ensuite.

Leo hocha la tête. Le mouvement, la construction de circuits… il s’y connaissait assez en électricité et en magnétisme pour faire ses recherches mais ça n’allait sans doute pas être évident. Peut-être que le système électrique n’avait pas toujours réagit de cette manière ? Cela méritait d’être investigué. Pour une raison étrange Leo ne pouvait s’empêcher de penser à tous les fils qui jonchaient le sol et tapissaient les murs du repaire de Pipes… peut-être que c’était là une piste ? Une quantité aussi importante d’électricité devait générer un champ magnétique considérable…

"Merci de cette information… entre les bonnes mains elle pourrait vraiment améliorer la qualité de vie de beaucoup de gens. "

L’ingénieur eut un sourire, manifestement très motivé à l’idée d’embarquer sur un nouveau projet. Un qui serait utile à grande échelle cette fois. Son regard glissa vers les lignes de Saarth’alis. Manifestement il avait repris des forces… et il devait partir.

"Vous étiez pressé… me semble-t-il. Je vous remercie grandement pour les informations que vous m’avez fournies. Si vous ne considérez pas encore votre dette comme remplie je trouverais d’autres questions pour notre prochaine rencontre. "

La tête de leo retombait lentement dans un état de fatigue intense… peu importe ce que le nomade lui aurait livré comme information supplémentaire il doutait d’être en mesure de retenir quoi que ce soit. Il fournis un dernier effort par contre.

"Mais avant… vous avez eu le temps de mettre quelque chose en place? Pour communiquer avec Thyrînn ?"