Au secours, mon ange Gardienne! (Pv Annabelle, DM)

Le Netralite sembla heureux de voir que le mercenaire était d'accord avec lui. Il ne voulait surtout pas que d'autres meurent en ce jour, surtout pas une bonne personne. Il acquiesça donc aux paroles d'Annabelle, gloussa en l'entendant l'intimer de ne pas servir de cible encore, puis se positionna pour observer. À peine venait-il de le faire qu'une tension presqu'électrique montait dans l'air.

En bas, l'Altéré continuait de jurer tout bas. Il grognait et s'agitait dans son armure, sans la faire le moindrement bouger. Aux paroles de la Gardienne, il grogna, puis s'agita de nouveau.

- Tu pense que j'ai pas vu de brûlures dans la vie? Votre État en fait plein...

Il grogna de nouveau, marmona un "merde, pas maintenant", puis grogna de plus bel.

- ...que je coopère... Tu veux que je te dise quoi? Attention, notre tireur a les yeux bleus? Je peux rien te dire. Je travaille pas avec lui, d'habitude. J'entre jamais dans les murs! ...hugh... putain...

Il grogna de nouveau et eut quelques tremblements étranges. Un son particulier se fit entendre, comme celui d'une pierre que l'on frotte contre le métal. La chose semblait assez désagréable pour leur criminel en conserve, dans tous les cas.

De son côté, Zolvar resta assis et silencieux. Il n'avait rien à ajouter et, franchement, il ignorait s'il aurait encore longtemps la force de le faire. L'adrénaline retombée, il commençait à replonger dans sa faiblesse.

Dans tous les cas, il donna des indications précises au cyborg, puis l'observa simplement. Il tendait aussi l'oreille, dans le cas où Annabelle aurait besoin d'aide.

La gardienne se contenta de sourire.

"Alors tu sais qu’il ne faut pas trop perdre de temps. Pourquoi tu ne commencerais pas par nous dire d’où vous venez, toi et tes « amis ». Vous dites « votre état »… du matériel qu’on a jamais encore vu et une armure assistée sans mécanisme d’éjection… Vous n’êtes pas d’ici. "

La gardienne était restée imperturbable. Elle n’avait pas l’habitude de dévoiler ses forces lors d’interrogatoires mais elle voulait que son interlocuteur sache qu’elle ne laisserait rien passer.

"Alors aller, un peu de géographie ! Ensuite je serais curieuse d’entendre ce que tu peux me dire à propos de gens capable de vous engager. Pourquoi retenaient-ils mon ami prisonnier ? Qu’est-ce qu’ils lui voulaient ?"

Elle avisa le bruit sous l’armure et se raidit instantanément. Elle tendit la main et leva la barre de fer qu’elle avait amenée avec elle, prête à agir.

"Je te préviens tu me dis tout de suite ce que tu es en train de faire sinon je te rallume et je te laisse cuire tu m’entends ?"

L'Altéré continua de grogner et de s'agiter dans son armure. L'étrange son se faisait toujours entendre. La chose lui semblait de plus en plus désagréable, même.

- Nous venons de l'extérieur de l'État... L'un de vos Scavenger est au courant... Sinon... ils voulaient savoir quelle est la dernière couleur des Mutalythes... de ce que j'en sais... je suis juste une paire de bras...

L'homme dans son armure sembla remarquer qu'Annabelle s'armait et s'agita un peu plus, sans faire bouger sa prison, encore. Sa respiration devint plus rapide, sifflante, et quelques gargouillements étranges se firent entendre.

- Hé oh! C'est toi qui déclenche ma foutue Altération, et tu veux me faire cramer après?! Je ne fais rien! Mon corps devient maboule! Merde... putain de merde...

Le bruit continuait encore et empirait, même. C'était le grattement de la pierre contre le métal, et quelque chose de cristallin qui se brise, même, par moment. On entendit même trembler dans l'armure, et d'autre gargouillements.

- ...quand est-ce que ça va finir... putain...

En haut, il n'y avait pas un son. Probablement que le cyborg se concentrait encore.

La gardienne se calma légèrement et haussa un sourcil.

"Qu’est-ce que… "

Elle semblait rassurée de voir que l’armure ne bougeait pas d’un poil malgré les grouillements de son propriétaire. Elle avait cru pendant un moment qu’il avait trouvé un moyen d’en sortir, peut-être un outil ou quelque chose. Mais il se montrait déjà plus loquace qu’auparavant et c’était déjà un signe qu’il la prenait au sérieux. Elle garda sa barre de fer mais se replaça confortablement contre le mur.

"Bon, t’as besoins d’un moment le temps que tu reprennes contrôle de ton propre corps ou tu es prêt à continuer ? Parce qu’après si tu acceptais de nous dire où votre opération est basée ce serait un autre point pour toi. "


Elle attendit patiamment, observant attentivement la suite des choses.

Les gargouillements continuèrent quelques longues minutes, accompagnés par les bruits étranges. L'Altéré gigotait encore, mais de moins en moins, comme s'il en était incapable. Qu'il n'avait plus assez de place pour le faire.

- ...je viens de te dire... que l'un de vos Scavengers le sait... je lis pas les cartes, moi... j'en ai aucune idée...

Plus il parlait, et plus ses paroles semblaient difficiles, se changeant lentement en gargouillements. Il finit justement par ne faire que ça, sans dire d'autres paroles compréhensibles. Il gargouillait et ne bougeait plus, mais vivait encore. Qui savait ce qui se cachait sous l'armure, maintenant...?

La gardienne resta appuyée contre le mur, essayant en vain de savoir ce qui se passait sous les épaisses parois de métal.

"Eh, oh. Tu es encore là ? J’aimerais éviter d’avoir à répéter mes questions et j’ai besoins de plus de détails. Avec quel scavenger faites-vous affaire ? D’où venez-vous à l’extérieur de l’état ?"

Elle s’était fait un peu plus insistante. Si elle n’obtenait pas de réponse elle remonterait tout simplement. Peut-être que Zolvar était entré en contact avec l’altéré auparavant et avait une idée de ce qui se passait ?

Les réponses de l'Altéré se résumèrent à des gargouillements légèrement dégoûtants, mais rien d'autres. Il ne bougeait plus, respirait dans des sifflements... et c'était tout. Simplement ces bruits, rien d'autres, maintenant, ne se faisait entendre de sa part. L'armure ne bougeait toujours pas, avec tout ça.

En haut, il n'y avait toujours pas de bruits. Le mercenaire pouvait contempler toute la concentration du Netralite, qui ne bougeait plus d'un cheveux. Son regard bleu irréel était fixé vers l'extérieur, vers les reflets de la lunette de visée ennemie. On entendait même plus respirer le cyborg. Par contre, la tension dans l'air était encore là, étourdissante un peu, même. On avait l'impression de pouvoir sentir l'odeur de l'ozone, comme si un éclair venait de tomber dans la pièce.

La gardienne soupira. Juste au moment où elle allait peut-être obtenir des réponses… Il avait mentionné que c’étaient ses altérations qui étaient en train de s’activer non ? Était-ce alarmant ? Elle pouvait toujours essayer d’ouvrir l’armure… mais avec les outils qu’elle avait à sa disposition ce ne serait pas une opération sécuritaire pour celui qui se trouvait à l’intérieur. Elle se contenta de se lever et de commencer à gravir les marches.

"Je reviens. Essaie de méditer un peu entretemps, réapprendre à parler ou un truc du genre. "

Elle atteignit le premier étage où elle s’approcha du mercenaire. Il ne dormait pas encore et elle mourrait d’envie de le laisser se reposer… mais ce qui se passait en bas était peut-être grave et il était le seul à peut-être savoir ce qui se passait.

"Dis-moi… tu as eu des contacts avec l’altéré lors de ton séjour chez ses employeurs ? Il euh… quelque chose viens de se passer et il ne parle plus il… euh… il grogne et il gargouille. Il a dit que c’était ses altérations qui s’activaient. Tu sais de quoi il parle ?"

Le mercenaire était assis contre le mur, près de la position du Netralite, à observer le cyborg se concentrer. Il avait les sourcils froncés, dans une mimique sévère, et semblait lutter pour ne pas trop se sentir étourdis. Fixer un point, pour que la pièce ne tourne pas tout d'un coup, sans avertir.

Quand Annabelle monta l'escalier, il se frottait une jambe doucement. La tension dans l'air ne lui plaisait pas, encore moins l'odeur d'ozone. Il avait l'impression qu'il se ferait foudroyer dans la secondes... et ça le rendait nerveux. Il fixa tout de même la Gardienne, la détailla rapidement, surtout pour s'assurer de son bien être, puis baissa les yeux tranquillement.

- ...je... le seule chose dont je me rappel... c'est qu'il m'a tiré dessus avec des tranquillisants, quand je suis entré assez profondément dans leur repère... et que je lui ai casssé la figure... Je ne savais pas qu'il était de nouveau en service... Je n'ai pas vu son visage... et il ne portait pas d'armure quand je l'ai vu...

Son regard retourna dans celui d'Annabelle et sembla demander le "toi, comment tu t'en sors?" que ses lèvres ne voulaient pas laisser sortir. Il la fixa encore un peu, puis ramena son attention sur le Netralite, sans arrêter de frotter sa jambe.

L'Altéré ne répondit encore, rien et continua ses gargouillements. Au moins, il ne bougeait pas l'armure et n'en sortait pas.

En haut, Eridani était totalement plongé dans sa concentration. Il ne bougeait toujours pas et laissait en paix les deux autres. Peut-être ne les entendait-il même pas. Par contre, la tension dans l'air ne faisait qu'augmenter. Avec les indications de Zolvar, il semblait avoir le regard fixé sur la position du tireur. Il ne bougeait pas d'un cheveux depuis quelques minutes quand il ferma les yeux, doucement, et baissa la tête. Puis, un murmure, dans un souffle, s'extirpa de lui.

- ...je l'ai... mais il n'est pas seul...

La gardienne enregistra l’information mais secoua la tête doucement. Ce n’était rien qui pouvait vraiment l’aider à comprendre ce qui se passait. Quelle genre d’altération ce colosse avait-il subie ? A entendre ce qui se passait en ce moment dans l’armure elle avait beaucoup de difficulté à l’imaginer et ne tenait pas vraiment à le savoir. Elle s’apprêtait à tourner les talons quand son regard accrocha celui du mercenaire. La jeune femme hésita un instant, puis abandonna ses plans et vint lentement s’asseoir près du mutalhyte. Une certaine fatigue semblait peser sur ses épaules.

"Je… je vais bien Zayne… pas besoins de t’en faire pour moi."

Elle s’arrêta. Inconsciemment son esprit venait de lui rejeter en plein visage l’exécution du cyborg et l’incinération de l’altéré. Elle ferma les yeux et respira un bon coup. Une partie d’elle n’était manifestement pas en accord avec ce qu’elle venait de dire… Mais ce n’était pas le moment de réfléchir et de perdre cet ancrage qu’elle avait. Ce genre de réflexions, elle pourrait les avoir une fois en sécurité. Là elle pourrait s’écrouler et se torturer pour savoir si elle avait pu faire autre chose, si ces gens le méritaient, si elle avait aimé ce qu’elle avait fait... Mais pas maintenant. Elle ouvrit la bouche pour parler quand le Netralite en fit de même.

"Que voulez-vous dire ? Complices ? Hottages ?  "

Peu importe qui était avec lui, ça n’augurait rien de bon. Étaient-ils plus que trois dès le départ ? ou avait-il eut le temps de faire appel à des renforts ?

Le mercenaire eut un soupir. Il savait bien que ces informations là étaient tout aussi utiles que s'il aurait dit à la Gardienne que l'homme en armure aimait les beignets. C'était inutile, en plus de leur faire perdre du temps. Il étaient tous épuisés et blessés, il n'avait pas besoin d'être un médecin pour le voir. En plus, le Netralite avait perdu l'usage de l'un de ses bras. Avec sa condition de cyborg "criminel", il ne pourrait pas aller à l'hôpital... quoique, à y penser, il ne voulait pas non plus y aller, de son côté. Il suivit donc Annabelle du regard, alors qu'elle s'asseyait près de lui, et lui tapota doucement l'épaule de sa main valide.

- ...trop tard... je m'inquiète depuis que je vous ai mêlé à tout ça... je n'arrêterai pas de m'inquiéter tant que nous ne serons pas en sécurité...

Il remarqua immédiatement que la Gardienne ne se sentait pas bien, se repositionna, puis passa son bras par-dessus ses épaules, pour l'attirer à lui dans une tentative d'être rassurant. Il ne savait pas si ça fonctionnerait, mais il pouvait au moins essayer. Les paroles du Netralite, par contre, le firent se raidit et il reprit son bras, maintenant attentif. Nerveux, surtout. Annabelle posa toutes les questions qui lui traversaient l'esprit avant même qu'il aie le temps de penser à les dire, et il écouta donc avec attention.

Eridani s'était redressé à ses paroles. Il avait laissé le duo tranquille, trop concentré sur ce qui se passait ailleurs. Il continuait d'observer, de ses yeux perçants, semblant incertain maintenant.

- Je n'en ai aucune idée... Je regarde ça...

À peine eut-il le temps de finir qu'un coup de feu résonna. La balle ne sembla pas avoir été tirée dans leur direction, dans tous les cas. Même, le Netralite recula un peu, abasourdi.

- ...il... cette personne vient d'abattre le tireur... Une balle dans la tête... Il semblait lui parler tranquillement. Qu'est-ce qui s'est passé... La personne... n'est plus là. Elle vient de disparaître devant mes yeux...

Le cyborg se tourna vers eux, visiblement troublé. Il ne savait pas quoi faire, ni quoi en penser. Aucun autre son ne se fit entendre, sinon les gargouillements de l'Altéré en bas. Il y avait eux, le vent, et un nouveau cadavre sur un toit en face, maintenant.

Annabelle s’était redressée, abandonnant à regret le réconfort offert par le mutalhyte.

"Je n’aime pas ça… "

Elle secoua la tête, incertaine.

"Les probabilités qu’on ait un ange gardien son assez faibles. Si vous me dites qu’ils étaient en train de parler…"

La gardienne se rassit et se prit lentement la tête entre les mains. Qu’est-ce qui venait de se passer ? Le tueur faisait-il partie des kidnappeurs ? Si c’était le cas qu’est-ce que ça signifiait ? Étaient-ils dans des eaux encore plus troubles ?

"Avez…heum… vous eu le temps de voir ou de sentir quelque chose ? Un vêtement particulier, une couleur… quoi que ce soit qui pourrait nous dire qui c’était ?"

Un ange gardien qui apparait puis disparait était un peu gros comme cadeau pour l’esprit pessimiste de la jeune femme. Mais… le danger immédiat était écarté non ? Elle regarda zolvar, complètement perdue.

Ce qui suivit le figea sur place. Simplement. Même ses facettes venaient de figer. Son cerveau ne voulait plus du tout. Qu'est-ce que c'était, encore? Une histoire de quelqu'un d'autre, qui venait de tuer la personne qui les empêchait de fuir... Il ne comprenait pas. Il ne voulait pas comprendre. Il voulait se réveiller chez lui et se rendre compte que rien de tout ça n'était arrivé. Il voulait pouvoir se rattraper à quelque chose, s'agripper à une parcelle de réalité. Elle lui glissait entre les doigts. Tout lui semblait tellement irréel, là, maintenant... Étaient-ils sauvés? Étaient-ils condamnés? Il voulait savoir. Être capable de se faire une idée. Arrêter d'espérer et de voir ses espoirs se faire broyer. Il aurait préféré se faire dire franchement qu'il allait mourir que d'avoir à endurer cette incertitude.

Son regard devint vitreux, sa respiration un peu plus difficile. Sa peau changeait de couleur, mais pas taches irrégulières sur son corps. Un peu de bleu dans l'épaule, du vert dans l'abdomen, du rose sur le visage, qui changent de place, disparaissent et se mélange dans un ballet complexe. Lui se sentait simplement... absent. Dans le vide. Déconnecté. Sa conscience s'était reculé et aucune de ses facettes ne voulait prendre sa place. Il avait l'impression de voir par une fenêtre obstruée et sombre.

Le cyborg se mit à couvert de la fenêtre, puis regarda Annabelle. Il ne tremblait pas, incapable de le faire, mais il n'était définitivement pas à l'aise. Il cligna des yeux quelques secondes, essayant de se rappeler ce qui venait pourtant de se passer, puis s'agenouilla difficilement au sol. LA chute de l'Altéré sur son corps se faisait sentir. Ses articulations de jambes n'aimaient pas ça.

- ...la personne n'a pas pris le fusil de précision. Je n'ai rien "senti", mais... Un long imperméable noir, un peu ciré et déchiré par endroit. Un large capuchon. Des yeux jaunes, lumineux... de taille normale, je dirais. Un masque étrange. Rien de son corps n'était en vue.

Il ramena son attention sur Annabelle, voulant voir si elle reconnaissait la description. D'ailleurs, une seule correspondait à cette apparence: celle du terroriste du 800ième, Pipes. Les Défenseurs, Meyers en personne, l'avait marqués comme étant une personne très dangereuse et à éviter de confronter en étant seul.

L'attention d'Eridani se tourna ensuite vers le mercenaire, et il accourut aussitôt en voyant son état. Il lui prit sa main indemne et se mit à masser ses bras, l'air plus paniqué par l'état de Zolvar que la révélation d'un potentiel ennemi supplémentaire.

- Zolvar? Vous m'entendez? S'il-vous-plaît, répondez-moi.... Zolvar? Zolvar!!!

Le souffle de la jeune femme fut coupé lorsqu’elle entendit la description faite par le cyborg.

"Pipes… "

Elle secoua la tête, sachant encore moins comment prendre la nouvelle. De ce qu’ils en savaient il agissait rarement directement… le fait qu’il se soit déplacé en personne et ait appuyé sur la détente prouvait qu’il avait un intérêt très fort à ce qu’ils sortent vivant de cette situation. Elle ne l’avait jamais rencontré directement, mais c’était le genre d’histoire qui poussait la jeune femme à s’informer. La bonne nouvelle était que maintenant elle savait qu’ils pouvaient sortir du bâtiment sans crainte. La mauvaise était que tout cela n’augurait pas grand-chose de bon pour la suite des choses.

Annabelle sortis de ses réflexions en voyant le mutalhyte réagir. C’était ce qu’elle aimait d’eux : peu importe ce qui se passait ils télégraphiaient sans cesse leur sentiment. Et là c’était visible que quelque chose n’allait pas. Elle tendit sa main et agrippa celle du mercenaire.

"Zayne. Tout va bien, nous n’avons plus rien à craindre pour le moment. Zayne ?!"

Elle jeta un regard au cyborg. Elle ne comprenait rien non plus de ce qui se passait… Elle posa son autre main derrière la nuque du mercenaire et planta son regard dans le sien, essayant d’avoir une réaction quelconque.

Qu'on le touche, qu'on lui parle, il ne bougeait pas. Laquelle de ses facettes prendrait les reines, maintenant? Il ne se posait pas réellement la question. Les faits étaient simple: il n'était plus réellement là. C'était juste s'il sentait les stimulus, comme lointains et impersonnels, maintenant.

Il ne bougea donc pas et n'eut aucune réaction. Son regard était vitreux un peu, son souffle lent, mais difficile... il devenait un tantinet plus froid au toucher, aussi.

Le Netralite continua un peu son massage, puis laissa la main du mercenaire à Annabelle. Il ne savait visiblement pas quoi faire dans la situation, aussi recula-t-il un peu. Son regard bleu cherchait une solution invisible autour, sans en trouver.

- ...nous devons le sortir d'ici. Je serais capable de le porter jusqu'à l'avant-poste le plus près. Je crois qu'il est en état de choc.

Il eut un soupir puis se leva, pour doucement enrouler le mercenaire dans la couverture. Ils devaient au moins le réchauffer et l'empêcher de trop prendre froid. Ce serait un début.

En bas, il n'y avait plus un son. L'Altéré enfermé dans son armure avait arrêté d'en faire. Ils étaient donc entourés par le sifflement du vent, qui faisait ressentir un froid pas trop mordant, mais tout de même présent.

Annabelle hocha la tête et aida le Netralite à enrouler le mercenaire dans la couverture.

"Si nous avons la protection de Pipes mieux vaut en profiter avant qu’il ne change d’idée. Nous aurons tout le temps du monde pour se questionner sur ses motivations une fois Zolvar en sécurité. "

La gardienne paraissait un peu plus sûre d’elle. Les questions devaient attendre… Même si le mercenaire n’était pas en danger physique ils devaient sortir de là aussi vite que possible. Peut-être qu’en le mettant en sécurité il serait plus facile pour lui de réfléchir ?

"Compris. Mais hors de question que vous le transportiez seul avec l’état dans lequel votre bras se trouve. Je peux le porter moi-même pendant un moment, sinon nous avons tout ce qu’il faut pour faire un brancard. "

Elle sera une dernière fois la main du mutalhyte avant de se lever. Ils ne pouvaient rien faire pour l’altéré au rez-de-chaussée, ils enverraient une équipe lorsqu’ils atteindraient l’avant-poste. Elle rassembla rapidement leurs affaires et se prépara à quitter la bâtiment du moment que le Netralite donnerait le signal.

Zolvar ne bougea pas d'un cheveux. Il se rendait à peu près compte qu'on l'entourait de la couverture, mais sans plus. Sa peau continuait de changer de couleur, sans jamais se stabiliser. On commençait à capter des couleurs plus pâles, également, comme si un peu de blanc devenait de plus en plus dominant.

Son regard resta fixé devant, par contre. Fixe, vitreux, avec simplement la pigmentation qui changeait. Ses blessures ne semblait pas s'être remis à saigner au moins, ce qui était une bonne nouvelle en soit. Le transporter, avec toutes ses blessures complexes, ne serait pas simple dans tous les cas.

Le Netralite acquiesça, s'assura que Zolvar était bien emmitouflé, puis partit à la recherche de matériaux pour faire un brancard. Comme Annabelle avait dit, il y avait beaucoup de choses qui pourraient les aider à construire ce genre de chose, aussi ne fut-il pas long pour Eridani de revenir avec le nécessaire.

Il se mit à la construction du brancard avec Annabelle, son bras invalide oblige. À peine une vingtaine de minutes après qu'ils aient commencé à construire le brancard, ils entendirent un bruit en bas. Celui d'un coup, fort mais contrôlé, contre la porte que le Netralite avait bloquée, puis ladite porte que l'on dépose. La nouvelle personne, en bas, ne prenait pas la peine de se faire silencieuse, visiblement. Même, ils entendirent rire, d'une voix totalement impersonnelle et sans genre. Le rire sembla figer le sang dans ce qui restait de veine à Eridani, qui tourna lentement le regard vers Annabelle, ne sachant pas quoi faire.

Annabelle stoppa net le mouvement qu’elle était en train de faire et tourna la tête vers la cage d’escalier. Les hypothèses sur l’identité du nouveau venu avaient beau être nombreuses le spectacle qu’Eridani avait décrit un peu plus tôt réduisait considérablement le nombre de déductions qu’il était logique de faire. Elle leva la main afin d’intimer le Netralite à garder le silence et en fit de même.

C’était peut-être un espoir vain de penser que Pipes ne les avaient pas encore repérés mais rester silencieux et écouter offrait plus de possibilités le cas échéant. S’il les savait déjà là alors le résultat serait le même peu importe ce qu’ils faisaient. La Gardienne avisa le fusil de précision posé un peu plus loin. Il était à portée de main mais aurait-elle seulement le temps de s’en servir ? Peu importe ce que Pipes était une seule étiquette était réelle : il était dangereux. Mieux valait se préparer à tout.

Encore, le mercenaire resta dans son état étrange. Sa peau était encore dans un mélange de taches étranges... mais toutes tiraient sur des couleurs beaucoup plus pâles, maintenant. Il entendit les bruits en bas, mais n'eut aucune réaction. Tout était toujours si impersonnel, si irréel... était-il simplement encore vivant? Il se le demandait.

Immobile, il ne nuisait aucunement aux deux autres, qui l'enroulaient en vue de le transporter. Peut-être, oui, une fois loin d'ici, réagirait-il de nouveau un minimum? Pour le moment... il ne s'en sentait pas la force. Il ignorait même s'il voulait encore continuer tout ça. Continuer de se battre, et continuer de vivre dans un monde qui lui devenait de plus en plus hostile.